Question de M. DEMUYNCK Christian (Seine-Saint-Denis - UMP) publiée le 12/02/2009

M. Christian Demuynck attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire sur la décision de la Commission européenne de relancer les procédures d'autorisation des organismes génétiquement modifiés dans l'Union européenne. En effet, la Commission européenne pourrait dans les prochains jours demander aux autorités françaises de lever la clause de sauvegarde sur le maïs OGM Mon 810 ou maïs BT. La Commission européenne, s'appuyant sur les avis convergents de plusieurs autorités scientifiques, dont l'EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments), dans un avis du 29 octobre dernier, a estimé qu'aucun fait scientifique nouveau ne justifiait cette clause. Il apparaît donc clairement que l'examen prochain qui en sera fait devrait conduire la Commission à en demander la levée.
Il tient à lui rappeler que le MON 810 est cultivé sur près de 28 millions 100 milles hectares dans le monde et depuis 1998 en Espagne et que toutes les autorités compétentes ne voient aucune justification à une quelconque interdiction, Il souhaiterait connaître les raisons qui conduisent la France à refuser son expérimentation et sa culture.
Loin d'être un spécialiste en matière d'OGM, il essaie comme de nombreux citoyens de se faire un avis objectif, sur une question qui revêt une importance majeure, tant dans la lutte contre la faim, qu'en matière de santé publique, de respect de l'environnement ou de compétitivité économique, agricole et scientifique.
Il lui rappelle d'ailleurs que la France est le premier producteur européen de semences et le deuxième exportateur mondial. C'est dire que quel soit le choix de notre pays, celui-ci aura des conséquences importantes.
Aussi, il lui demande les motifs qui le conduisent à maintenir cette clause de sauvegarde.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de l'écologie publiée le 04/03/2009

Réponse apportée en séance publique le 03/03/2009

La parole est à M. Christian Demuynck, auteur de la question n° 431, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

M. Christian Demuynck. Je souhaite revenir sur le débat que suscite maïs MON 810 et qui a connu ces dernières semaines de nouveaux développements.

Voilà un an, à l'issue du Grenelle de l'environnement, la France décidait d'activer la clause de sauvegarde concernant le MON 810, l'unique plante transgénique jusqu'alors cultivée en France, et ce sur la base du principe de précaution.

En octobre dernier, l'Autorité européenne de sécurité des aliments, ou AESA, écartait l'idée selon laquelle cet organisme génétiquement modifié pouvait comporter un risque pour la santé humaine et animale ou pour l'environnement. L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, vient d'ailleurs de confirmer cette absence de risque sanitaire dans un avis rendu le 20 février 2009.

Ces deux autorités scientifiques, à l'expertise reconnue, ont conclu qu'aucun fait scientifique nouveau ne justifiait cette clause de sauvegarde et que cette dernière pouvait donc être levée.

Sachant que le MON 810 est cultivé sur 20 millions d'hectares dans le monde, en Espagne depuis 1998, que les autorités compétentes ne voient aucune justification à une quelconque interdiction, je souhaiterais connaître les raisons qui conduisent notre pays à refuser son expérimentation et sa culture.

Ce refus crée, par ailleurs, un climat de suspicion autour des OGM, alors que nous en mangeons tous les jours ! Il est tout de même paradoxal qu'un pays offrant des OGM à la consommation en refuse la culture et l'expérimentation.

Cette position est particulièrement préjudiciable à notre pays. Elle nous fait prendre un retard considérable dans la compétition mondiale en matière de biotechnologies, notamment par rapport aux États-Unis, retard d'autant plus dommageable que la France est le deuxième producteur mondial de semences et qu'elle dispose d'une remarquable expertise en recherche agronomique.

En outre, si elle ne prend pas la mesure du sujet, la France s'expose à de grands risques, soit de dépendance à l'égard des détenteurs étrangers, en particulier américains, de procédés protégés par la propriété intellectuelle, soit de fuite de ses chercheurs. Il faut d'ailleurs remarquer que le laboratoire de recherche Bayer a quitté la France.

Madame la secrétaire d'État, je profite de l'occasion qui m'est donnée pour vous interroger sur le retard pris dans la nomination du président du Haut conseil des biotechnologies.

Depuis les avis défavorables émis par les deux commissions parlementaires compétentes concernant le premier candidat, aucun autre nom n'a été proposé par le Gouvernement, même si celui de Catherine Bréchignac circule actuellement pour occuper ce poste. Or ce retard voit la France dans l'impossibilité d'expérimenter des OGM en 2009.

Madame la secrétaire d'État, je vous demande de nous préciser les motifs qui vous conduisent à maintenir cette clause de sauvegarde et de nous informer sur les intentions du Gouvernement pour développement la recherche en matière de biotechnologies dans notre pays.

M. le président. Avant de vous donner la parole, madame la secrétaire d'État, étant pour la première fois amené à présider la séance en votre présence, le vieux parlementaire que je suis tient à vous souhaiter la bienvenue et à vous dire le plaisir, voire le trouble – privilège de l'âge ! – qu'il éprouve à vous voir au banc du Gouvernement. (Sourires.) Je vous souhaite d'ailleurs la même longévité dans vos fonctions que celle qui est la mienne au Parlement de la République ! (Nouveaux sourires.)

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Merci, monsieur le président !

M. le président. Vous avez la parole, madame la secrétaire d'État.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Monsieur Demuynck, le Gouvernement a effectivement décidé de prendre une mesure de sauvegarde et d'interdire la culture, sur le territoire français, du maïs MON 810 par arrêté du 7 février 2008.

Cette décision fait suite à l'avis du Comité de préfiguration de la haute autorité sur les OGM et a été prise en raison des interrogations soulevées par les scientifiques français au sujet des impacts environnementaux potentiels de cet OGM.

Quelles sont les incertitudes ? À l'évidence, elles concernent non pas les impacts sanitaires, mais bien les impacts environnementaux, notamment celui de la toxine contenue dans ce maïs sur les espèces dites « non cibles » et sur le sol. D'ailleurs, reconnaissant elle-même l'existence de telles incertitudes, l'agence européenne a demandé des informations supplémentaires à Monsanto sur ce point.

Nous avons besoin d'éléments de réponse clairs. L'arrêté prévoit la levée de la clause de sauvegarde lorsque la procédure européenne de renouvellement de l'autorisation de l'OGM MON 810 sera terminée. Or cette dernière est en cours et les résultats sont attendus pour cette année. Les analyses sont conduites par l'Espagne.

J'ajoute que le Conseil des ministres européens de l'environnement, a confirmé, à l'unanimité, dans ses conclusions du 4 décembre 2008, la nécessité de revoir les procédures d'expertises qui sont conduites par l'AESA. À ce jour, nous n'avons pas eu de propositions de la Commission sur ce point.

Par conséquent, tant que ni la réévaluation et ni procédure de révision du dispositif d'expertise européen ne sont achevées, il nous semble tout à fait prématuré de proposer une levée de la clause de sauvegarde.

Cette question a d'ailleurs été posée hier, pour l'Autriche et la Hongrie, au Conseil «Environnement » à Bruxelles. Une très forte majorité – vingt-deux États, y compris l'Espagne, sur vingt-sept – ont voté contre la Commission sur cette question, pour des motifs identiques.

Cela étant, vous avez tout à fait raison, monsieur le sénateur, il ne faut pas renoncer aux biotechnologies et à la recherche dans ce domaine. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé d'y consacrer 45 millions d'euros sur une période de trois ans.

M. le président. La parole est à M. Christian Demuynck.

M. Christian Demuynck. Madame la secrétaire d'État, j'ai bien entendu vos propos et je suis quelque peu rassuré par le montant de l'enveloppe qui sera consacrée à la recherche sur les biotechnologies, car nous ne devons absolument pas prendre de retard par rapport aux États-Unis.

Je crois utile de rappeler que tant l'AESA que l'AFSSA ont indiqué que le MON 810 ne présentait aucun risque pour la santé humaine ou animale. Il importe de le dire et de le répéter, compte tenu des affirmations et des contrevérités qui circulent sur les OGM.

À l'évidence, en vertu du principe de précaution, il faut se montrer prudent quant à l'utilisation qui est faite des OGM. Pour autant, si je suis favorable à la culture du maïs MON 810, c'est qu'elle est largement pratiquée dans le monde, que ce soit aux États-Unis, en Amérique du Sud, en Espagne, et depuis plus de dix ans. L'expertise liée à l'histoire de cette culture permet d'être pleinement rassuré.

L'inquiétude tient au risque de pollinisation. Or, selon l'ensemble des études menées par les organismes et chercheurs dans les pays de culture du MON 810, ce risque est réduit à néant dès lors que les bonnes techniques sont appliquées.

J'attire l'attention du Gouvernement sur l'obligation que nous avons de ne pas rater la marche des biotechnologies et d'investir énormément dans ce domaine. La terre est confrontée à de graves problèmes alimentaires. Elle compte aujourd'hui 6 milliards d'habitants, dont 800 millions meurent de faim. Nous serons 9 milliards en 2050 !

Madame la secrétaire d'État, les 45 millions d'euros que vous avez annoncés sont de nature à me rassurer, et je suivrai avec attention l'avenir du MON 810.

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