Question de M. NÈGRE Louis (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 12/02/2009

M. Louis Nègre attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les conditions d'emprunts actuellement offertes au secteur local.

Malgré le plan de sauvetage adopté en octobre dernier, les garanties apportées au système bancaire, les élus, et plus particulièrement les maires des villes moyennes, s'interrogent sur la trop grande différence existant entre le taux de refinancement interbancaire de la BCE (qui se situe à 2 %) et les taux proposés actuellement par les principaux prêteurs au secteur local.

Là où il était possible d'obtenir, il y a six mois, pour des prêts « simples » - à taux fixe ou à taux variable - des marges sur encours de quelques dizaines de points de base au-dessus de l'euribor (de l'ordre de 70 points de base), un niveau bien supérieur (de 150 à 200 points de base) est aujourd'hui proposé aux collectivités territoriales.

La crise de liquidités a certes bousculé beaucoup de certitudes, mais il faut quand même souligner ce paradoxe, alors que l'euribor à 1 an baisse de 60 % sur la même période (de 5,5 % à 2,2 %).

Il souligne que, faute d'obtenir des prêts à des taux raisonnables, il existe aujourd'hui un risque d'attentisme des décideurs locaux et finalement un risque de grippage de la relance et des efforts d'investissements demandés aux collectivités.

Afin de boucler dans des conditions optimales les projets pour 2009, il souhaite lui demander quelles mesures elle compte prendre vis-à-vis des banques pour opérer les changements profonds indispensables. Faut-il par exemple envisager, à l'instar de ce qui existe en Suède, au Danemark, en Norvège, en Finlande ou encore aux Pays-Bas, la mise en place d'une agence publique de financement pour le secteur public local ?

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services publiée le 04/03/2009

Réponse apportée en séance publique le 03/03/2009

La parole est à M. Louis Nègre, auteur de la question n° 435, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

M. Louis Nègre. Ma question concerne les conditions d'emprunt actuellement offertes aux collectivités locales.

Malgré le plan de sauvetage adopté en octobre dernier et les garanties apportées au système bancaire, les élus, plus particulièrement les maires des villes moyennes, s'interrogent sur la trop grande différence existant entre le taux de refinancement interbancaire de la Banque centrale européenne, qui est aujourd'hui de 2 % – il devrait, semble-t-il, être prochainement ramené à 1,5 % – et les taux proposés actuellement par les principaux établissements prêteurs aux emprunteurs locaux.

Alors que, voilà six mois, il était possible d'obtenir, pour des prêts « simples », à taux fixe ou à taux variable, des marges sur encours de quelques dizaines de points de base au-dessus de l'Euribor – de l'ordre de 70 points de base –, un niveau bien supérieur – de 150 à 200 points de base – est aujourd'hui proposé aux collectivités. La crise des liquidités a certes bousculé beaucoup de certitudes, mais y a tout de même là un paradoxe quand on sait que, au cours de la même période, l'Euribor à un an a baissé de 60 %, passant de 5,5 % à 2,2 %.

Faute, pour les décideurs locaux, d'obtenir des prêts à des taux raisonnables, ceux-ci risquent de se réfugier dans l'attentisme, d'où la menace d'un grippage des efforts d'investissements demandés aux collectivités et, finalement, de la relance.

Faut-il envisager la mise en place d'une agence publique de financement pour le secteur public local, comme il en existe en Suède, au Danemark, en Norvège, en Finlande ou encore aux Pays-Bas ?

Afin que nous puissions boucler nos projets pour 2009 dans des conditions optimales, je souhaite savoir quelles mesures le Gouvernement compte prendre vis-à-vis des banques pour opérer les profonds changements qui sont indispensables dans ce domaine ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Monsieur le sénateur, vos préoccupations relatives à l'accès au crédit et aux conditions d'emprunt des collectivités territoriales sont partagées par le Gouvernement.

En effet, dans le contexte actuel, il est primordial de ne pas entraver l'investissement des collectivités territoriales et de leurs groupements, qui représente plus des deux tiers de l'investissement public global. Toutefois, s'il revient au Gouvernement de veiller au bon accès au crédit des collectivités territoriales, c'est naturellement à elles seules que revient le choix de leur mode de financement.

Comme vous le savez, le Gouvernement s'est fortement engagé à soutenir le crédit à l'économie, notamment aux collectivités locales. À cet égard, je vous rappelle les mesures qui ont d'ores et déjà été mises en œuvre pour répondre à ce besoin de financement.

La loi de finances rectificative pour le financement de l'économie du 16 octobre 2008 a mis en place la Société de financement de l'économie française, qui a permis de lever des fonds sur les marchés avec la garantie de l'État. Ces financements sont ensuite distribués aux établissements de crédit en contrepartie d'engagements de prêts aux agents économiques, notamment aux collectivités territoriales. À ce jour, ce sont ainsi 33 milliards d'euros qui ont été prêtés aux banques pour qu'elles financent l'économie.

Le Gouvernement a en outre ouvert spécifiquement au mois de novembre 2008 une enveloppe exceptionnelle de 5 milliards d'euros de prêts sur fonds d'épargne à destination des collectivités territoriales afin d'assurer le financement de leurs investissements sur la fin de l'année 2008.

Vous le voyez, le Gouvernement met en place des moyens, mais cela serait insuffisant si l'on ne s'assurait pas qu'ils sont bien utilisés au financement de l'économie. La progression des encours de crédit aux collectivités locales est dès lors l'indicateur suivi par le Gouvernement pour évaluer la contribution des banques au financement de l'économie.

En contrepartie des dispositifs mis en œuvre pour soutenir le crédit à l'économie, les banques se sont engagées à augmenter leurs encours de crédit à l'économie de 3 % à 4 % en rythme annuel. Vous le savez, Christine Lagarde a mis en place un observatoire du crédit, dont le rôle est de vérifier chaque mois que les banques respectent leurs engagements en matière de prêts à l'économie.

Les derniers chiffres disponibles montrent que le crédit aux collectivités locales est aujourd'hui le secteur d'activité le plus dynamique, avec une croissance des encours de prêts aux collectivités territoriales de 4,9 % entre septembre et décembre 2008, contre 1,4 % tous crédits confondus. Il est donc clair que les collectivités locales profitent de leur bon profil de risque et conservent un bon accès au crédit.

S'agissant plus particulièrement de l'évolution des marges bancaires, elle reste à ce stade difficile à apprécier, et cela pour plusieurs raisons.

Il faut tout d'abord rappeler que les collectivités territoriales ont, en raison d'une forte concurrence entre les réseaux bancaires, bénéficié jusqu'à une période récente de conditions de prêts favorables, caractérisées par des marges relativement faibles sur les prêts à taux fixe ou à taux variable.

Plus généralement, la fixation des marges par les banques résulte de plusieurs facteurs qui tiennent non seulement aux conditions financières supportées lors des opérations de refinancement, aux politiques commerciales des différents réseaux bancaires, mais également à la situation financière de chaque emprunteur.

Il est donc délicat de tirer des conclusions définitives des conditions de prêts actuellement pratiquées par les banques, d'autant que les collectivités territoriales ont recours de manière limitée à l'emprunt – à hauteur de 25 % environ – pour financer leurs investissements.

Ces conditions de financement se retrouvent dans le niveau des intérêts supportés par les collectivités territoriales. Ils représentent en effet 4 % de leur budget de fonctionnement, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas excessif.

La création d'une agence publique de financement du secteur public local, qui recourrait par exemple elle-même aux marchés financiers et qui serait chargée d'apporter des financements aux collectivités territoriales, ne saurait constituer une voie exclusive pour répondre à la demande immédiate des collectivités territoriales. Il convient de rappeler à cet égard le bon déroulement des émissions obligataires menées sous l'égide de l'Association des communautés urbaines de France ces dernières années, sans qu'il ait été besoin de recourir à une telle agence.

Il reste que la question que vous soulevez est importante. Le Gouvernement demeure donc très attentif à l'évolution de la situation. Si d'aventure cette situation se dégradait, nous examinerions de près vos suggestions.

M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.

M. Louis Nègre. Monsieur le secrétaire d'État, je me réjouis de l'effort réalisé par le Gouvernement et je me félicite que les encours auprès des collectivités locales aient augmenté de manière substantielle par rapport à ceux des prêts qui sont consentis à d'autres catégories d'agents économiques.

Cela dit, le problème que l'on constate sur le terrain tient à l'importance du différentiel par rapport à l'Euribor, puisqu'on est passé, en quelques mois, d'une marge de 70 points de base à une marge se situant entre 150 et 200 points, alors même que le Gouvernement a fait un effort exceptionnel en faveur des banques, ainsi que tout le monde le reconnaît. C'est là une situation que les élus locaux ont du mal à comprendre !

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