Question de M. CHAUVEAU Jean-Pierre (Sarthe - UMP) publiée le 02/04/2009

M. Jean-Pierre Chauveau attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les dérives constatées par une excessive implantation des professions médicales et paramédicales en zone franche urbaine (ZFU).

Instauré en 1997 pour faciliter l'installation d'entreprises et réussir à enclencher sur ces sites une véritable dynamique économique, le dispositif ZFU, au vu de son bilan, a été relancé puis étendu. Ses aspects positifs sont incontournables. Pourtant, dans certaines zones franches, des contournements de l'intention du législateur sont régulièrement dénoncés. Il s'agit, en particulier, du transfert des professions médicales et paramédicales. En effet, profitant de l'effet d'aubaine que représente le dipositif ZFU, certains professionnels de santé déplacent abusivement leurs cabinets médicaux ou paramédicaux. Il en résulte une forte concentration de ces professions en ZFU, au détriment des quartiers périphériques ou des communes situées à proximité. Ce fut le cas dans la ZFU du Mans ces dernières années, au désavantage des autres quartiers de l'agglomération, et ce processus se reproduit aujourd'hui dans la ZFU d'Alençon à l'encontre des cantons ruraux qui jouxtent cette ville.

Cette situation crée une inégalité manifeste d'accès aux soins. Ce déséquilibre est fortement préjudiciable aux populations.

Au-delà des restrictions qui existent déjà (exonérations des cotisations sociales personnelles dont le bénéfice n'est pas accordé aux professions libérales), il lui demande quelles sont les mesures envisagées pour limiter ces implantations abusives.

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Réponse du Ministère de la santé et des sports publiée le 27/05/2009

Réponse apportée en séance publique le 26/05/2009

La parole est à M. Alain Fouché, en remplacement de M. Jean-Pierre Chauveau, auteur de la question n° 508, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.

M. Alain Fouché. Madame la ministre, le succès du dispositif des zones franches urbaines, les ZFU, est incontestable.

Entré en vigueur en 1997 pour faciliter l'installation d'entreprises et enclencher une véritable dynamique économique sur les sites concernés, le dispositif ZFU, au vu de son bilan, a été relancé, puis étendu. Au-delà des chiffres, il existe une preuve évidente de cette réussite. Malgré une alternance droite-gauche, les zones franches situées dans les quartiers populaires n'ont pas été remises en cause.

Certes, au fil des ans, le dispositif a été progressivement amélioré, mais il est vrai que des mesures très attractives risquent toujours d'être détournées de leur objet. Dans ce contexte, la vigilance s'impose car, en la matière, quelques-uns de nos compatriotes sont particulièrement créatifs ! Ainsi, dans certaines zones franches, des contournements de l'intention du législateur sont régulièrement dénoncés : il s'agit, en particulier, du transfert des professions médicales et paramédicales.

Une des dérives récentes est révélée par l'excessive implantation, et donc l'excessive concentration, de ces professions, car certains professionnels de santé, profitant de l'effet d'aubaine que représente le dispositif ZFU, déplacent abusivement leurs cabinets médicaux ou paramédicaux. Il en résulte une forte densité de ces professions en ZFU, au détriment des quartiers périphériques ou des communes situées à proximité. Toutes les professions libérales sont concernées, mais les exemples concernant les professionnels de santé sont les plus choquants.

Tel a été le cas de la ZFU du Mans ces dernières années, au détriment des autres quartiers de l'agglomération. Ce processus se reproduit aujourd'hui dans la ZFU d'Alençon, aux dépens des cantons ruraux qui jouxtent cette ville. Il en résulte une inégalité manifeste d'accès aux soins. Or, cette inégalité n'est pas compréhensible puisqu'elle est la conséquence d'un dispositif législatif. Le déséquilibre induit est fortement préjudiciable, puisqu'il accélère le mouvement de désertification médicale. Il s'agit là d'une question d'aménagement du territoire.

Au-delà des restrictions qui existent déjà – exonérations des cotisations sociales personnelles dont le bénéfice n'est pas accordé aux professions libérales –, je vous demande, madame la ministre, quelles sont les mesures envisagées pour limiter ces implantations abusives.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Monsieur le sénateur, je vous remercie de vous faire l'interprète de M. Jean-Pierre Chauveau et je vous serais reconnaissante, par avance, de bien vouloir lui transmettre ma réponse.

Votre collègue s'interroge sur l'éventuel effet d'aubaine que pourraient entraîner les diverses mesures d'incitation à l'installation des médecins libéraux en zone franche urbaine, susceptibles de conduire à une concentration de ces professionnels de santé dans certaines ZFU, au détriment des zones avoisinantes.

Je tiens à rappeler que les zones franches urbaines ont été créées par la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville, que l'on cite parfois par son acronyme PRV. D'autres lois, outils des politiques de la ville ou de l'aménagement du territoire, définissent les aides destinées à soutenir l'installation des médecins dans ces zones reconnues comme prioritaires, où l'exercice de la médecine est rendu difficile du fait, notamment, de la composition sociale et culturelle de leur population et de sa précarisation, qui imposent au praticien de tenir un rôle à la fois social et médical. Progressivement, des situations de sous-médicalisation risquent de s'y développer et d'induire, en de nombreux endroits, des difficultés d'accès aux soins.

Il ne m'appartient pas, vous le comprenez, de revenir sur le dispositif des zones franches urbaines qui a toute sa légitimité et relève de la politique de la ville et non pas de la politique du ministère de la santé. Il est cependant nécessaire de réfléchir à l'amélioration de la répartition des professionnels de santé, en mettant en œuvre des dispositifs à la fois incitatifs pour ces derniers – car, vous le savez, je demeure très attachée au principe de la liberté d'installation – et équitables pour les territoires, afin de mettre un terme aux effets d'aubaine que vous dénoncez.

Dans ce cadre, j'ai voulu que le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires – dont nous allons bientôt examiner le titre II, qui aborde les questions très délicates de la démographie médicale – place l'accessibilité des soins au premier rang de ses priorités et offre des leviers d'action permettant d'agir en ce sens.

Ce projet de loi prévoit donc un certain nombre de mesures destinées à inciter les professionnels de santé à s'installer en prenant en compte au plus près les besoins de la population : il tend à faciliter l'orientation des jeunes médecins vers les zones prioritaires, avant même la fin de leur cursus universitaire, et à favoriser la généralisation des coopérations entre professionnels de santé. Il prévoit également que les établissements de santé pourront créer et gérer des centres de santé, ce qui peut apporter une réponse en termes d'offre de soins, notamment en milieu urbain.

En outre, le projet de loi prévoit que les schémas régionaux d'organisation des soins, les SROS, auront un volet ambulatoire, permettant de définir une organisation des soins plus adaptée aux besoins de la population, en lien avec les professionnels de santé, les élus et les usagers du système de santé. Il sera ainsi possible de faire le point sur les besoins et l'offre de soins existante dans l'ensemble des territoires de proximité qui composent une région.

De plus, les agences régionales de santé joueront un rôle de guichet unique des nombreuses aides qui existent pour favoriser l'installation des médecins dans les zones où leur densité d'implantation est trop faible. En effet, les jeunes internes avouent eux-mêmes qu'ils ont beaucoup de mal à se diriger dans un maquis réglementaire devenu, comme vous l'avez souligné, de plus en plus touffu.

Dans ce cadre, le SROS déterminera les zones de mise en œuvre des mesures visant à l'amélioration de la répartition des professionnels de santé libéraux. Ainsi, la définition de ces zones sera plus adaptée aux besoins locaux, ce qui permettra de limiter les effets d'aubaine que vous avez dénoncés et de garantir que l'installation répond bien à un besoin identifié.

Monsieur le sénateur, ces éléments sont, je le crois, de nature à répondre aux inquiétudes que vous portez.

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. Madame la ministre, vos propos témoignent bien de la grande attention que vous portez à la concentration des médecins dans les ZFU, et des efforts que vous menez pour inciter ces professionnels de santé à s'installer en milieu rural et dans les quartiers plus difficiles, où ils ne sont pas assez nombreux.

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