Question de Mme PROCACCIA Catherine (Val-de-Marne - UMP) publiée le 06/08/2009

Mme Catherine Procaccia attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les incidences des ultraviolets sur la santé.

Un groupe de 20 experts issus de 9 pays vient de classer l'exposition aux rayons ultraviolets artificiels dans les causes de cancer avéré. Une autre étude a conclu que l'exposition à ces UV avant l'âge de 30 ans augmentait de 75 % le risque de mélanome, la forme la plus agressive du cancer de la peau. Dans la mesure où l'utilisation d'appareils de bronzage émettant des UV est largement répandue, particulièrement auprès d'un public jeune, elle demande quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour appeler à la plus grande prudence et permettre aux consommateurs de ces cabines UV de les fréquenter en toute connaissance de cause. En outre, elle souhaiterait savoir si les pouvoirs publics vont être amenés à demander aux gestionnaires de ces cabines de limiter les cartes d'abonnement à 10 séances maximum, le seuil de tolérance déterminé par les scientifiques.

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Réponse du Ministère de la santé et des sports publiée le 23/09/2009

Réponse apportée en séance publique le 22/09/2009

La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 609, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, madame la ministre, mes chères collègues, au moment où les Français rentrent de vacances et où ils sont tentés de prolonger un peu leur bronzage, mais surtout après tous les articles parus cet été dans la presse, je voulais interroger la ministre de la santé sur les centres et les cabines de bronzage qui utilisent les rayons ultraviolets, ou UV.

En effet, le bronzage favoriserait autant que la cigarette le développement d'un cancer. Jusqu'à présent, les UV artificiels étaient considérés comme « probablement » cancérogènes mais, récemment, un groupe d'experts issus de neuf pays viennent de les classer dans la catégorie « cancer avéré »

Une méta-analyse a en effet conclu que l'exposition aux UV artificiels avant l'âge de trente ans augmentait de 75 % le risque de mélanome, la forme la plus agressive du cancer de la peau. Cette étude souligne également que l'utilisation d'appareils de bronzage émettant des UV est très largement répandue, particulièrement chez les jeunes femmes. Ces résultats ont été publiés dans la revue médicale The Lancet Oncology.

Les dermatologues, eux, sont plutôt satisfaits de cette étude. La vice-présidente du Syndicat national des dermatologues-vénéréologues rappelle en effet que cela fait plus de douze ans qu'ils alertent le public sur le danger des UV artificiels, car une fréquentation répétée à un âge très jeune des cabines entamerait largement le capital solaire et représente donc un facteur de risques.

Les professionnels du bronzage, quant à eux, ne sont pas non plus surpris par ces résultats. La présidente de la Confédération nationale de l'esthétique parfumerie, la CNEP, qui regroupe six syndicats de la branche, explique que, depuis 1992, les rayonnements solaires sont jugés cancérogènes et qu'il est normal que les UV artificiels le soient aussi.

Selon les conclusions d'un rapport, il ne faudrait pas dépasser dix séances par an.

Le bronzage artificiel est donc à consommer avec modération, sans pour autant qu'il faille aller jusqu'à supprimer toute exposition parce que soleil peut être adapté à certaines prescriptions : il y a du bon dans les UV, d'abord pour le moral, mais aussi, parce qu'ils favorisent l'assimilation de la vitamine D, pour les os.

Quoi qu'il en soit, les UV artificiels sont fortement déconseillés aux personnes sujettes aux allergies, aux consommateurs d'anxiolytiques et aux peaux trop blanches.

Depuis le début des années 2000, bon nombre de centres de bronzage artificiel se sont développés, surfant sur la vague du bien-être. Je ne sais pas si tous respectent la réglementation. Je ne pense pas non plus que les utilisateurs y trouvent un document prouvant que le personnel a été formé, qu'il connaît les risques d'une surexposition et qu'il est capable d'en informer les usagers.

Il est théoriquement interdit aux mineurs de fréquenter ces centres de bronzage, mais je ne suis pas non plus persuadée qu'une pièce d'identité soit systématiquement exigée de toute personne paraissant âgée de moins de dix-huit ans.

Enfin, vous le savez, même s'il existait une interdiction des cabines en libre-service dans notre pays, n'importe quel particulier pourrait toujours trouver en deux clics sur internet des solariums en vente libre, et je ne sais pas si ceux-ci respectent les normes.

En conséquence, madame la ministre, je vous serai reconnaissante de m'indiquer si vous avez l'intention de mettre en œuvre un certain nombre de mesures, en particulier pour appeler les usagers à une plus grande prudence.

Envisagez-vous d'encadrer cette pratique pour permettre aux utilisateurs de cabines UV de les fréquenter en toute connaissance de cause, par exemple, en rendant obligatoire l'information par des messages sur la dangerosité, y compris en contrôlant le nombre de passages en cabine UV, par mois ou par an ?

En d'autres termes, madame la ministre, pensez-vous pouvoir renforcer la réglementation française pour la rendre plus protectrice ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Je me tourne d'abord vers notre président de séance pour le rassurer : non, monsieur le président, non, vous n'êtes pas seul ! (Sourires.)

M. le président. Merci, madame la ministre !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Claude Lévi-Strauss ne disait-il pas qu'il éprouvait un sentiment de solitude lorsqu'il se retrouvait, au cours de ses expéditions, en compagnie des femmes et des enfants ? Il se sentait seul uniquement parce que les hommes étaient partis ! (Nouveaux sourires.)

Madame Procaccia, je vous remercie de poser cette question, qui nous rappelle un peu les vacances !

Vous souhaitez attirer mon attention et celle du Sénat sur la question des risques sanitaires liés à l'exposition aux ultraviolets artificiels : la matière, qui pourrait être considérée bien futile est, tout au contraire, une question de santé publique très importante.

L'Organisation mondiale de la santé a récemment reconnu le caractère « cancérigène » des rayons ultraviolets A artificiels émis par les installations de bronzage. Une analyse de l'ensemble de la littérature scientifique a effectivement conclu que l'exposition aux UV artificiels avant l'âge de trente ans augmente de 75 % le risque de mélanome.

Étant très attentive à ces risques, j'ai demandé à ce que les mesures de prévention qui existent déjà soient réexaminées et, si nécessaire, renforcées.

En matière de réglementation, il faut savoir que nous ne partons pas de rien : la France est même en avance par rapport à d'autres pays voisins.

Ainsi, la vente et la mise à disposition du public d'appareils de bronzage utilisant des rayonnements ultraviolets sont réglementées depuis 1997.

Cette réglementation impose notamment la présence d'un personnel qualifié dans les établissements mettant des appareils de bronzage à la disposition du public, et l'information des utilisateurs sur les risques liés à une exposition aux rayonnements ultraviolets.

Elle prévoit, en outre, la déclaration des installations auprès de la préfecture de département, ainsi qu'un contrôle technique régulier des appareils par un organisme agréé.

Enfin, elle interdit l'utilisation des installations de bronzage par les mineurs.

J'ai demandé à mes services de réaliser une évaluation approfondie de l'application de la réglementation française relative aux installations de bronzage artificiel. Car il ne suffit pas d'avoir une réglementation, encore faut-il qu'elle soit observée !

Particulièrement attachée à la qualité et à la sécurité, je demanderai, si cela se révélait nécessaire, un renforcement de la réglementation actuelle, lequel serait alors grandement facilité par les dispositions figurant à l'article 61 de la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, votée récemment, à l'élaboration de laquelle vous avez apporté une participation à la fois attentive et pertinente, ce dont je vous remercie encore, madame la sénatrice. Il y est en effet prévu à la fois le renforcement des contrôles pour les activités à visée esthétique et des sanctions en cas de non-application de ces dispositions.

Par ailleurs, dès juillet dernier, j'ai demandé à l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l'INPES, de renforcer la communication sur les risques des ultraviolets artificiels, comme il le fait déjà pour les risques solaires.

Pour une communication efficace, l'INPES va engager une étude sur les connaissances, la perception et le comportement des utilisateurs de ces installations, qui sont aujourd'hui aussi bien des hommes que des femmes.

Par ailleurs, l'Institut national du cancer, l'INCA, sera chargé, sur la base d'une expertise, qui va être mise à jour, datant de 2005 et émanant de l'Institut de veille sanitaire, de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail et de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, de proposer les recommandations nécessaires pour l'élaboration de nouveaux messages sanitaires.

Madame Procaccia, je prends cette affaire extrêmement au sérieux. Je le répète, nous ne partons pas de rien et nous attendons les recommandations de l'INCA pour mettre à jour la méthode de communication sur ces rayons ultraviolets.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Madame la ministre, je n'ai aucun doute quant à votre investissement sur toutes les questions relatives à la santé, dont celle que j'ai soulevée.

Je souhaite simplement que la campagne d'information qui pourrait être menée soit aussi efficace que celle qui porte sur les méfaits du soleil. Les personnes qui vivent dans des départements comme le mien, même si elles partent deux ou trois semaines dans l'année en vacances, ne sont pas véritablement exposées à ce risque. En revanche, les centres de bronzage se sont développés sur tout le territoire. Pour en avoir fréquenté quelques-uns dans le passé, je l'avoue, je sais qu'aucune mise en garde, à part une petite affichette, ne m'a été donnée par qui que ce soit. Quant au personnel de ces centres, il ne me semble être là que pour distribuer des jetons.

Les cartes de fidélité, qui permettent d'obtenir une réduction au bout de cinq ou dix séances, prouvent que, loin de modérer la fréquentation des centres de bronzage, on incite tout au contraire la clientèle à y revenir plus souvent.

Sans vouloir poser de problèmes aux professionnels, j'aimerais tout de même que l'on s'interroge sur de telles pratiques commerciales.

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