Question de M. PATRIAT François (Côte-d'Or - SOC) publiée le 18/11/2009

Question posée en séance publique le 17/11/2009

Concerne le thème : Les collectivités territoriales

M. François Patriat. Mme Christine Lagarde, après avoir vilipendé les élus locaux, vilipende les collectivités territoriales en les qualifiant, c'était dimanche dernier, de « féodalités » que l'État n'a plus lieu de financer !

M. Roland Courteau. Eh oui !

M. Jean-Pierre Sueur. C'est scandaleux !

M. François Patriat. Vos deux projets de loi, monsieur le secrétaire d'État, sont placés sous le triple signe de l'improvisation, de la précipitation et de la recentralisation punitive. (Protestations sur les travées de l'UMP. – Marques d'approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Un sénateur socialiste. Ils sont mal placés !

M. François Patriat. J'ai parlé d'improvisation, mes chers collègues. Imagineriez-vous construire une maison sans avoir au préalable défini son utilité et les moyens de la financer ?

Plusieurs sénateurs socialistes. Mais non !

M. François Patriat. Iriez-vous construire la carrosserie d'une voiture sans en avoir prévu le moteur et le périmètre ?

Plusieurs sénateurs socialistes. Mais non ! Jamais !

M. François Patriat. Comme nous y a invités M. Raffarin, définissons d'abord les compétences, définissons le périmètre et, ensuite seulement, définissons les moyens !

Un sénateur socialiste. Bien sûr !

M. François Patriat. Votre réforme, monsieur le secrétaire d'État, est également placée sous le signe de la précipitation.

Comment remplacer des impôts par d'autres impôts, aujourd'hui ? Vous proposez par exemple que les entreprises de réseaux participent, demain, au financement des collectivités locales. Cela signifie que la région Bourgogne, qui finance aujourd'hui le TER, le train express régional, va devoir demander une contribution supplémentaire à la SNCF, qui ne manquera pas de la lui réclamer par ailleurs. Cela signifie surtout que nous allons nous automutiler d'une ressource qui n'existera pas !

Enfin, j'ai évoqué le caractère de « recentralisation punitive » de ces projets de loi. Demain, les régions seront dépourvues d'autonomie fiscale ; elles percevront une dotation de l'État, une part de la valeur ajoutée votée par le Parlement et une dotation hypothétique des entreprises de réseaux. Quelle sera leur autonomie ? Le ministre chargé des relations avec le Parlement l'a reconnu en privé le week-end dernier : nulle.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Évidemment !

M. François Patriat. Demain, elles n'auront plus qu'un budget affecté. Dans ces conditions, nul besoin d'élus, le préfet pourra affecter lui-même les crédits !

M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Patriat.

M. François Patriat. Il me reste dix secondes, monsieur le président !

Avec ce budget affecté, c'est la fin de la décentralisation, c'est l'an I de ce que j'appelle « la recentralisation punitive » ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)


Réponse du Secrétariat d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales publiée le 18/11/2009

Réponse apportée en séance publique le 17/11/2009

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, c'est maintenant, et vous le savez bien, qu'il faut supprimer la taxe professionnelle pour les entreprises, car cette mesure va consolider la reprise économique. (Protestations sur les mêmes travées.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On le voit, depuis dix ans !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. La taxe professionnelle pénalise très durement nos entreprises, dissuade les investissements et encourage les délocalisations. Je vous rappelle que, en une dizaine d'années, la France a perdu plus de 500 000 emplois industriels à cause de cette taxe, que nous sommes le seul pays d'Europe à prélever. (Protestations prolongées sur les mêmes travées.)

Il y a urgence à agir. C'est pourquoi le Président de la République a souhaité qu'elle soit supprimée dès le 1er janvier 2010.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La taxe professionnelle a baissé depuis dix ans !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Cependant, je le redis solennellement devant la Haute Assemblée, le Gouvernement s'est engagé à ce que l'année 2010 soit une année neutre, une année « blanche » pour les collectivités territoriales.

M. Bernard Frimat. Et après ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Elles ne bénéficieront de leurs nouvelles ressources qu'en 2011, ce qui nous permettra de poursuivre les simulations l'an prochain. Car, je le répète, chaque commune, chaque collectivité, chaque département, chaque région fera l'objet d'une simulation au cours de cette année 2010.

La réforme des collectivités territoriales est donc parfaitement cohérente.

La première étape, c'est le volet institutionnel de la réforme et la création du conseiller territorial, avec les quatre projets de loi adoptés en conseil des ministres le 21 octobre dernier.

La seconde étape, ce sera la clarification des compétences, qui interviendra dans les douze prochains mois. Il s'agit là d'un délai maximal, et nous pourrons essayer de le raccourcir, notamment pour lister les compétences des départements et des régions.

M. Christian Cointat. Très bien !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. En 2010, nous mènerons donc de front trois exercices qui porteront respectivement sur les institutions, sur les compétences et sur les éventuels ajustements à apporter à la réforme de la taxe professionnelle. (Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour la réplique.

M. Didier Guillaume. Monsieur le secrétaire d'État, nous sommes pour l'évolution des collectivités locales : vous les étouffez ! Nous sommes pour la décentralisation : vous recentralisez ! Nous sommes pour la réforme de la fiscalité : vous transférez l'impôt économique sur les ménages ! Tels sont les projets de loi que vous présentez aujourd'hui à la France !

Tout le monde le dit, sur toutes les travées de la Haute Assemblée : vous avez mis la charrue avant les bœufs, monsieur le secrétaire d'État ! Il est temps d'y remédier et de s'atteler à définir d'abord les compétences, ensuite les financements. C'est ainsi que nous pourrons travailler ensemble !

Cette semaine, la démocratie locale est à Paris. Hier, plus de 2 000 conseillers généraux réunis en congrès ont adopté une motion à l'unanimité. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Adrien Gouteyron. Des fonctionnaires !

M. Didier Guillaume. Aujourd'hui, les maires de France vont accueillir le Premier ministre de belle façon.

Non, nous ne sommes pas pour les féodalités : nous sommes pour la solidarité, c'est toute la différence !

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Didier Guillaume. Monsieur le secrétaire d'État, ne soyez pas borné, n'ayez pas peur des élus : écoutez-les et, surtout, cessez de les mépriser ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

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