Question de Mme DUPONT Bernadette (Yvelines - UMP-A) publiée le 26/11/2009

Mme Bernadette Dupont attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur une anomalie concernant la primo vaccination obligatoire diphtérie, tétanos, poliomyélite (DT Polio).
Depuis le 12 juin 2008, l'AFSSAPS a suspendu le DT Polio® de Sanofi Pasteur MSD, recommandé chez le nourrisson, en raison d'une augmentation importante de réactions allergiques imputables à ce vaccin.
Les parents se trouvent alors devant une situation impossible puisque la loi rend obligatoire ce vaccin, introuvable en officine, et sans solutions de remplacement pour les enfants de moins de 6 ans.
Les vaccins proposés sont des vaccins multidoses comprenant des valences non obligatoires et il est donc bien compréhensible que les parents les refusent.
Grâce à une autorisation exceptionnelle, les enfants à partir de 6 ans peuvent revoir le REVAXIS, qui est en fait un vaccin de rappel pour adulte. En toute logique de nombreux médecins refusent de l'utiliser pour des enfants.
La France est l'un des derniers pays d'Europe à maintenir cette vaccination obligatoire contre trois maladies inexistantes dans notre pays et, qui plus est, par un vaccin supprimé du marché pour être à l'origine d'effets secondaires dommageables.
Dans un contexte d'harmonisation des législations entre les pays européens, ne pourrait-on aligner la position française sur celle de ses voisins ?
Par ailleurs, ne pourrait-on instaurer une clause de conscience comme défini dans le code de la santé publique dans son article L. 1111-4 qui stipule : « Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment » ?
Elle souhaite savoir ce qui préside au maintien de cette vaccination par un vaccin non approprié et, enfin, connaître son avis sur la possibilité d'un libre choix laissé aux parents lorsque les vaccins proposés comprennent des valences non requises.


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Réponse du Ministère de la santé et des sports publiée le 11/03/2010

Le principe de l'obligation vaccinale concerne des maladies infectieuses qui peuvent être mortelles ou avoir des conséquences particulièrement graves. À ce titre, l'obligation vaccinale est donc un outil important de sécurité sanitaire et de protection de la santé des individus et de la collectivité. Des vaccinations ont été rendues obligatoires, il y a plus de trente ans, à une époque où l'incidence de ces maladies était encore importante en France. Le niveau sanitaire général de la population justifiait ces obligations avec pour corollaire leur prise en charge par l'État (organisation, gratuité, réparation des dommages vaccinaux). Depuis cette époque, certaines obligations vaccinales ont été supprimées, grâce au succès de la vaccination elle-même et à l'amélioration des conditions de vie et des possibilités thérapeutiques (variole, typhoïde en population générale et récemment le BCG). En dehors du cas particulier des personnels des établissements de soins et de prévention (particulièrement exposés aux agents infectieux et pour lesquels la vaccination contre l'hépatite B a été rendue obligatoire en 1991), les vaccins apparus depuis 1970 n'ont pas été rendus obligatoires en population générale mais recommandés (coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, Haemophilus influenzae, hépatite B, grippe, pneumocoques, papillomavirus humains) pour tout ou partie de la population. La suppression totale des obligations vaccinales au profit de la liberté individuelle est une question récurrente. Celle-ci est généralement portée par des ligues antivaccinales dont les arguments sont scientifiquement contestables et qui s'opposent de façon systématique au principe même de la vaccination. Pour être d'adoption tardive (1946), le principe de protection de la santé n'en est pas moins un principe constitutionnel. À ce titre, ce principe peut venir en conflit avec d'autres principes comme le droit de propriété et la liberté individuelle. En matière de santé publique, il est admis que la protection de la santé de l'homme (en tant que collectivité d'individus) prime sur ces autres principes. Dans le cas de la vaccination, le bénéfice collectif apparaît parfois plus important que le bénéfice individuel. Dans ces conditions, autant il apparaît justifié de prendre en compte des contre-indications individuelles, autant l'introduction d'une liberté de choix paraît risquée dans l'intérêt général. La lente et insuffisante progression des taux de couverture vaccinale pour certaines maladies (rougeole, rubéole, oreillons, coqueluche) montre que les messages de sensibilisation et de responsabilisation sur les risques individuels (gravité) et collectifs (risques d'épidémies) liés à ces maladies, de même que ceux sur les bénéfices de la vaccination, restent dans l'ensemble mal pris en compte. Dans le cas de la rougeole, c'est l'importance du nombre d'enfants et d'adolescents non vaccinés qui permet l'éclosion d'épidémies comme cela est constaté depuis le second semestre 2008 en France. Par ailleurs, la multiplication des échanges internationaux et la recrudescence de certaines maladies dans des pays proches de la France rendent indispensables un haut niveau d'immunité collective. Dès que le taux de couverture vaccinale baisse, des cas et des décès surviennent pour des maladies que l'on croyait disparues (ainsi la diphtérie en Russie). Il apparaît qu'en France un haut niveau d'immunité collective n'a pu être atteint que pour des vaccinations obligatoires. C'est justement ce haut niveau d'immunité collective qui permet à l'État de garantir au public un haut niveau de protection sanitaire par rapport aux risques infectieux. Cependant, une adéquation est nécessaire entre les risques et les bénéfices, entre les données épidémiologiques et les obligations vaccinales. Ainsi, en France, pour la tuberculose, le nombre de cas a diminué progressivement depuis les années 70 ; mais il reste élevé dans certaines régions et pour certains groupes de population. Ce contexte a fait évoluer la politique de lutte contre cette maladie avec la mise en oeuvre d'un programme national de lutte contre la tuberculose 2007-2009. La vaccination par le BCG reste un élément important dans la lutte contre la tuberculose, d'autant plus efficace qu'elle est effectuée plus tôt dans la vie. Si la balance entre les bénéfices et les risques est jugée peu favorable au BCG pour les enfants à faible risque d'exposition au bacille tuberculeux, en revanche il reste une priorité de santé publique pour les enfants à risque élevé de tuberculose. Ces différentes considérations ont conduit à la suspension de l'obligation de vaccination par le BCG chez l'enfant et l'adolescent au profit d'une recommandation forte de vaccination des enfants les plus exposés à la tuberculose. D'autre part, en ce qui concerne le vaccin trivalent contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (DTP), le fabricant, en accord avec l'AFSSAPS, a décidé en juin 2008 d'en suspendre la distribution dans l'attente de résultats d'investigations complémentaires sur l'augmentation de survenue de réactions allergiques postvaccinales. Ce vaccin trivalent est prescrit en primo-vaccination seulement pour les nourrissons dont les parents ne souhaitent pas réaliser les autres vaccinations recommandées à cet âge et en rappel pour les enfants âgés de six ans. En remplacement du DTP, le laboratoire met à la disposition des médecins traitants pour les nourrissons deux vaccins (un vaccin divalent contre diphtérie et tétanos et un vaccin monovalent contre la poliomyélite) injectés simultanément en deux sites séparés et, pour les enfants âgés de six ans, un vaccin trivalent contenant une dose réduite d'anatoxine diphtérique. Dans son avis du 14 mai 2004 relatif à l'utilisation du vaccin dTP (vaccin diphtérique à dose réduite, tétanique, poliomyélitique) en situation de pénurie de DTP (vaccin diphtérique, tétanique, poliomyélitique), le Conseil supérieur d'hygiène publique de France avait recommandé ce remplacement. Cette recommandation est notée dans le calendrier vaccinal publié chaque année par le ministère chargé de la santé.

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