Question de M. CARLE Jean-Claude (Haute-Savoie - UMP) publiée le 25/02/2010

M. Jean-Claude Carle attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les conséquences, notamment pour les petites et moyennes entreprises, des nouvelles procédures de recours dont disposent les candidats malheureux à un marché public.
Depuis l'intervention de la directive "recours", les candidats à un marché public disposent de quatre types de recours pour contester la régularité de la procédure de passation d'un marché public ou bien sa validité. Ce faisant et pour sécuriser les procédures, une commune doit dorénavant publier sur des supports différents, trois avis :
- un avis d'appel public à la concurrence;
- un avis d'intention de conclure;
- un avis d'attribution du marché.
Ces publicités, d'une part, et l'indication des délais et voies de recours d'autre part, non seulement allongent les délais de passation des marchés, renchérissent le coût des procédures, mais n'éclairent en rien les candidats évincés. En pratique en effet, une lettre informant un candidat non retenu contient maintenant presque autant de lignes (quasi incompréhensibles au demeurant) sur les procédures de recours que sur les motifs qui ont conduit la collectivité à choisir un prestataire.
Il lui demande donc si, à son avis, ces nouvelles contraintes qui paraissent complètement disproportionnées s'agissant des marchés de fournitures et de services de faible montant participent à l'objectif général qui est celui d'inciter les toutes petites PME à participer à la commande publique et s'il n'est pas possible de substituer à ces quatre recours un recours en référé et un recours en contestation de validité du contrat. Il est conscient que le droit de la commande publique est avant tout un droit européen, mais il lui demande de se faire le relais de ces préoccupations auprès des instances européennes, considérant que les acteurs de la commande publique doivent rencontrer les mêmes difficultés quel que soit le pays dont ils relèvent. Il lui demande également d'une manière plus pratique sur quels supports doivent être détaillés les délais et voies de recours offerts aux candidats évincés.

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Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 23/09/2010

La directive n° 2007/66/CE du 11 décembre 2007, relative à l'amélioration de l'efficacité des procédures de recours en matière de passation des marchés publics, a pour objectif de lutter contre les manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence, mais aussi de renforcer les droits des concurrents évincés. Elle a été transposée en droit interne par l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 et le décret n° 2009-1456 du 27 novembre 2009. Ces textes précisent, en fonction des procédures d'attribution utilisées, les obligations qui pèsent sur le pouvoir adjudicateur en matière de publicité et d'information des candidats évincés, ainsi que leurs conséquences sur les voies de recours dont disposent ces derniers. Pour les marchés de faible montant passés en dehors des procédures communautaires, des modalités facultatives d'achèvement de la procédure sont proposées au pouvoir adjudicateur, l'absence de leur mise en oeuvre n'ayant aucune incidence sur la régularité juridique du marché. En matière de référé contractuel, le délai de saisine du juge est de 6 mois à compter du lendemain du jour de la conclusion du contrat. Afin de protéger les droits des concurrents évincés tout en préservant la sécurité juridique du contrat, les textes nationaux permettent au pouvoir adjudicateur de ramener ce délai à 31 jours en cas de publication d'un avis d'attribution au Journal officiel de l'Union européenne (JOUE). Il est également possible de fermer totalement cette voie de recours à condition de publier un avis d'intention de conclure dans le JOUE et de respecter un délai de 11 (transmission électronique) ou 16 jours avant de signer le marché. L'absence de publication d'un avis d'attribution au JOUE ou d'un avis d'intention de conclure n'a donc aucune incidence sur la régularité juridique du marché. Pour les marchés passés selon une procédure formalisée, le pouvoir adjudicateur a l'obligation de notifier aux candidats non retenus la décision d'attribution du marché. Cette notification doit comporter les mentions précisées par l'article 80 du code des marchés publics, et notamment le délai que le pouvoir adjudicateur doit respecter entre la date de cette notification et la signature du marché. La publication de l'avis d'attribution prévu à l'article 85 du code des marchés publics fera courir le délai de 31 jours pendant lequel les candidats évincés pourront exercer un référé contractuel. En revanche, aucun texte ni aucun principe général du droit n'impose d'indiquer dans la notification de la décision d'attribution les délais et voies de recours ouverts contre la procédure ou le contrat lui-même, lesquels figurent obligatoirement dans l'avis de publicité. Si l'article R. 421-5 du code de justice administrative dispose que « les délais de recours contre une décision ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision », l'absence d'une telle information est sans incidence sur la légalité de la décision. Dans le cadre de la passation d'un marché, l'intérêt de mentionner cette voie de recours dans la notification aux candidats évincés est limité. En effet, il ressort de l'arrêt du Conseil d'État du 16 juillet 2007, Société Tropic Travaux signalisation, que les candidats évincés ne sont plus recevables à demander l'annulation pour excès de pouvoir des actes détachables à compter de la conclusion du contrat. Dès lors, l'indication du recours pour excès de pouvoir dans la notification aux candidats évincés ne présente un intérêt que lorsque le pouvoir adjudicateur peut penser que le marché ne sera pas signé dans les deux mois qui suivent cette notification. Cela peut être le cas, par exemple, lorsque l'accord d'une autorité de tutelle sur le choix du titulaire est requis avant la signature du contrat. La multiplication des procédures de recours n'est pas de la plus grande clarté pour les petites entreprises. La jurisprudence administrative pourrait évoluer dans un proche avenir pour en tenir compte, comme elle a commencé à le faire. Par une décision du 28 décembre 2009, commune de Béziers (req. n° 304802), le Conseil d'État a considéré que seule une irrégularité tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité autorisait le juge à écarter l'application du contrat. En tout état de cause, le Gouvernement français se fera le relais auprès des instances européennes dans le cadre de la procédure d'évaluation des directives, du souci de simplification des procédures de recours en matière de passation des marchés publics.

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