Question de M. MÉZARD Jacques (Cantal - RDSE) publiée le 28/04/2010

Question posée en séance publique le 27/04/2010

Concerne le thème : Le logement

M. Jacques Mézard. Monsieur le secrétaire d'État, votre ministère paraît avoir privilégié une politique de découpage du territoire entre zones de marché « tendu » et de marché « détendu », avec la volonté de privilégier les efforts en faveur des premières, selon des critères qui nous semblent discutables. Ce type de schéma est toujours en partie arbitraire, d'autant que de fortes disparités existent souvent au sein d'un même département.

On risque ainsi de tourner le dos à une politique d'aménagement du territoire qui justifierait l'adoption d'une politique dynamique du logement dans des départements où la démographie décline, mais où l'espace est important, le taux de chômage plus faible que la moyenne, et la sécurité exemplaire.

Avez-vous l'intention de cantonner les zones « détendues » dans le logement des ménages très précaires, souvent insolvables, en fragilisant les organismes d'habitat social auxquels vous demandez de vendre le patrimoine à l'occupant ?

A contrario, dans les zones « tendues », vous favorisez les particuliers utilisant le dispositif Scellier pour investir dans l'immobilier locatif, aboutissant ainsi à une discrimination territoriale. Je puis vous dire, en tant que président d'une agglomération d'environ 57 000 habitants, que nous supportons mal de voir des citoyens aisés aller investir sur d'autres territoires relevant du dispositif Scellier. Allez-vous remédier à ce déséquilibre ?

Enfin, le doublement du prêt à taux zéro doit, à partir du 1er juillet 2010, s'appliquer uniquement aux projets labellisés BBC, destinés aux bâtiments à basse consommation. Prévoyez-vous de reporter d'au moins un an cette réforme, laissant ainsi aux professionnels le temps de s'adapter pour être en mesure de se conformer aux exigences BBC à moindre coût, ce qui permettrait le maintien de l'activité ?


Réponse du Secrétariat d'État au logement et à l'urbanisme publiée le 28/04/2010

Réponse apportée en séance publique le 27/04/2010

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, notre pays connaît une réalité, l'existence simultanée de zones exposées à des tensions plus ou moins fortes en matière de logement.

Très concrètement, cela signifie que, dans certaines communes – comme la mienne, Châlons-en-Champagne dans la Marne –, le délai d'obtention d'un logement social s'établit à sept mois, alors qu'il faut attendre huit ans à Paris !

Dans certains territoires de notre pays, la demande de logements est effectivement très forte alors qu'ailleurs la situation est moins tendue. Or, le problème actuel tient au fait que notre production de logements se situe quasiment à l'inverse de cette réalité.

Permettez-moi de citer un exemple très concret : l'Auvergne. Dans cette région, nous aurons produit en 2008 un logement pour 156 habitants ; en Île-de-France, la même année, nous aurons produit un logement pour 299 habitants. Autrement dit, on construit deux fois plus de logements en Auvergne qu'en Île-de-France, alors que, chacun le sait bien, la crise du logement n'a pas la même acuité dans chacune de ces régions.

Pour autant, il ne s'agit évidemment pas de cesser de construire en Auvergne. Mais nous avons besoin de rééquilibrer la production, afin de produire plus dans les zones où la demande de logements est plus forte et moins dans celles où la demande est moindre. Nous ne souhaitons évidemment pas cantonner les territoires les plus « détendus », souvent les plus ruraux, au seul logement social ; au contraire, nous voulons que l'accession à la propriété puisse également s'organiser sur ces territoires. Nous souhaitons continuer à produire du logement social sur ces territoires, mais moins qu'aujourd'hui, pour en produire davantage là où la situation est plus tendue.

Permettez-moi de mentionner un dernier exemple chiffré : nous finançons aujourd'hui 120 000 logements sociaux – un record sur les trente dernières années ! –, mais nous avons produit 75 % de ces logements dans des zones moyennement ou faiblement « tendues ». Nous souhaitons donc réorienter la production pour l'augmenter dans les zones où la nécessité en est avérée.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour la réplique.

M. Jacques Mézard. Monsieur le secrétaire d'État, je ne suis pas tout à fait convaincu par votre argumentation. Vous allez faire plus dans les zones « tendues » : c'est parfait ! Mais cela ne signifie pas pour autant qu'il faut faire moins dans les zones « détendues ». Or c'est ce que vous nous proposez. Et cette politique aboutira à un déséquilibre tout à fait évident, qui aggravera l'inégalité entre nos territoires.

S'agissant du dispositif Scellier, je redis très simplement que la solution retenue, consistant à exclure de son bénéfice un certain nombre de zones agglomérées, conduit les personnes qui en ont les moyens à aller investir ailleurs. C'est doublement pénalisant pour nos territoires !

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