Question de Mme GONTHIER-MAURIN Brigitte (Hauts-de-Seine - CRC-SPG) publiée le 15/07/2010

Mme Brigitte Gonthier-Maurin souhaite interpeller M. le ministre de l'éducation nationale sur les conditions très préoccupantes dans les collèges et lycées des Hauts-de-Seine s'agissant de l'année scolaire 2010-2011 et sur la nécessité de prendre des mesures budgétaires d'urgence pour redresser la situation. Après la suppression de près de 63 000 postes d'enseignants depuis 2003, elle souhaite l'alerter sur la situation de pénurie aiguë d'enseignants titulaires et l'interroger sur la programmation rapide de mesures nécessaires pour sortir de cette situation.

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Réponse du Ministère de l'outre-mer publiée le 15/09/2010

Réponse apportée en séance publique le 14/09/2010

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je souhaite tirer aujourd'hui la sonnette d'alarme quant aux conditions très préoccupantes de la rentrée dans les collèges et lycées des Hauts-de-Seine.

Depuis l'année scolaire 2009-2010, la situation s'est beaucoup dégradée.

En raison de suppressions massives de postes d'enseignants, qui ont entraîné une pénurie aiguë de personnel, le rectorat de l'Académie de Versailles connaît de réelles difficultés à assurer le remplacement des enseignants en cas d'absence de courte durée, mais également de longue durée.

Face au manque d'enseignants remplaçants titulaires, lié d'une part à un recrutement insuffisant au regard des besoins et d'autre part à leur sédentarisation à l'année faute d'enseignants titulaires, il est question de recruter massivement des professeurs vacataires ou contractuels. Or, cette solution n'est pas acceptable, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, cela revient à placer devant les élèves des personnes non formées, et ce sans accompagnement. Ensuite, ces types de contrats sont extrêmement précaires, faisant de ces enseignants remplaçants des personnels payés au rabais, corvéables à merci et bien sûr sans statut. Il s'agit de vacataires que les rectorats, face aux besoins abyssaux, ont même du mal à trouver.

Au final, cette situation est très préjudiciable aux élèves, qui n'ont parfois pas de professeurs pendant des semaines, voire des mois. La cause est à rechercher dans une politique budgétaire centrée sur l'application de la RGPP et du principe d'un recrutement pour deux départs en retraite, au mépris des besoins réels des établissements.

Alors que la situation est demeurée très instable tout au long de l'année passée, la réforme de la formation des enseignants dite de masterisation, mise en place dans le seul but de supprimer près de 16 000 postes d'enseignants, va sans aucun doute aggraver la situation pour cette année.

Dans l'académie de Versailles, après la suppression de 578 postes en 2008, de 249 en 2009, ce sont 127 postes de titulaires et 385 postes de stagiaires qui sont supprimés en 2010 ! Madame la ministre, la situation est grave. Le Gouvernement doit prendre la mesure de la pénurie de personnels. Les syndicats d'enseignants, d'étudiants et les associations de parents d'élèves ne cessent d'alerter le ministère de l'éducation nationale, sans succès, sur la catastrophe qui menace le service public de l'éducation.

Quelles mesures d'urgence le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour sortir notre pays de cette pénurie d'enseignants titulaires ? Va-t-il revenir sur la suppression de la formation des enseignants débutants ? Je suis loin de partager l'optimisme affiché sur ce sujet. Le plafond d'emplois d'enseignants pour 2011 va-t-il être augmenté à la hauteur des besoins et va-t-on recruter dès à présent suffisamment de lauréats pour le concours 2010 ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, dont vous attirez l'attention sur les non- renouvellements de postes d'enseignants dans le département des Hauts-de-Seine, m'a chargée de vous répondre sur ce sujet fondamental que constitue la maîtrise de la dépense et des effectifs publics.

Vous le savez, notre pays consacre un effort considérable à son éducation. Le budget de l'éducation nationale est le premier budget de l'État. En 2010, il est encore en augmentation de 1,6 % par rapport à 2009, pour s'élever à 59,6 milliards d'euros.

Or, depuis 1990, le nombre d'élèves a baissé de 700 000, tandis que le nombre des enseignants s'est accru de plus de 50 000.

La responsabilité du ministre de l'éducation nationale est de contribuer à l'effort de maîtrise des dépenses publiques. Cette responsabilité, Luc Chatel la partage avec tous les responsables locaux de l'éducation nationale, qui sont en charge de la mise en œuvre des politiques éducatives sur le terrain. Les efforts prévus pour les prochaines années font dès à présent l'objet d'échanges.

Le rôle du ministre de l'éducation nationale est d'assurer à ces jeunes les meilleures conditions d'apprentissage, afin de leur permettre de construire leur parcours de réussite. Cet objectif est au cœur des réformes conduites par Luc Chatel. Tant la réforme du recrutement des enseignants, que le recentrage sur les savoirs fondamentaux dans l'enseignement primaire mais aussi la rénovation et la revalorisation de la voie professionnelle, qui ouvriront des perspectives nouvelles aux lycéens de cette voie d'excellence, ou encore la réforme du lycée d'enseignement général et technologique, qui entre en vigueur cette année, participent de cette volonté.

Toutes ces réformes modifient les missions des enseignants. C'est pourquoi, afin de mieux accompagner ces derniers, Luc Chatel a mis en œuvre un nouveau pacte de carrière, qui combine mesures de revalorisation, nouvelles possibilités de formation et plan santé au travail.

Concernant plus particulièrement l'académie de Versailles, les échanges fréquents que Luc Chatel a eus avec le recteur, M. Alain Boissinot, ne confirment pas votre inquiétude. Au niveau de l'académie, moins de 1 % des postes restent à pourvoir, principalement dans les disciplines professionnelles. La situation, comparable à celle de l'année passée, sera résolue dans les prochains jours. Elle est même plus favorable dans les Hauts-de-Seine que dans les autres départements de l'académie.

Enfin, je vous signale que, par rapport aux autres académies métropolitaines, la part des enseignants contractuels dans le potentiel enseignant de l'académie de Versailles s'inscrit dans la moyenne, soit moins de 3 %.

Cet effort de maîtrise des effectifs publics se concilie donc parfaitement avec une grande qualité d'enseignement.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la ministre, je ne partage pas votre optimisme...

Je souhaite en cet instant vous citer un rapport de l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, rendu au mois de juillet à M. Chatel. Aux termes de ce document, gardé secret au moment de son dépôt mais dont la presse a révélé les aspects les plus dramatiques, « les restrictions budgétaires pour 2010 vont créer des tensions et préparent assez peu l'avenir. » Tout au long des quarante-cinq pages de synthèse, les choix ministériels sont très clairement mis en cause.

Accueillir 25 000 élèves supplémentaires dans le second degré alors que de 3 000 à 4 000 emplois sont supprimés ne relève pas de l'efficience, contrairement à ce que vous affirmez, madame la ministre. En effet, les coupes budgétaires drastiques ont pour conséquence l'augmentation des effectifs par classe ainsi que la suppression de postes d'enseignants remplaçants titulaires, comme chacun peut le constater.

Je ne reviendrai pas sur la guerre des chiffres relative aux contractuels. Je me réfère simplement à ceux que comporte le rapport précité, auquel je vous renvoie.

Je veux maintenant souligner un point très important, à savoir la dégradation sans précédent des conditions de travail et de budget des services administratifs qui, selon le rapport, sont « sollicités au-delà du raisonnable ». En réalité, la politique conduite ne vise qu'à désorganiser, à déréguler et à libérer le système éducatif. Elle ne pourra, selon moi, que créer de nouvelles inégalités.

Le Gouvernement, par la politique qu'il mène, développe les disparités et porte directement atteinte à la globalité du système. Il hypothèque ainsi gravement l'avenir et en porte l'entière responsabilité. Comme je l'ai indiqué, parlementaires, membres de syndicats ou d'associations de parents d'élèves essaient de l'alerter et réclament en vain des solutions pérennes.

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