Question de Mme BLONDIN Maryvonne (Finistère - SOC) publiée le 16/09/2010

Mme Maryvonne Blondin interroge M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur les disparités de traitement existant entre les salariés pacsés et mariés.

Par une délibération du 11 février 2008, la Haute autorité de lutte contre les discriminations (Halde) jugeait discriminatoire le refus d'accorder les mêmes droits aux salariés pacsés qu'aux salariés mariés.

Ces droits font référence aux congés pour événements familiaux qu'il s'agisse des congés de paternité, des congés rémunérés à l'occasion de la célébration de l'union, ou encore des congés en cas de décès des ascendants et descendants au premier degré du conjoint.

La Halde recommandait déjà, en février 2008, une révision de l'article L. 226-1 du code du travail, afin d'étendre le bénéfice de l'ensemble de ces congés aux salariés unis par un Pacs dans les six mois suivant la notification de sa délibération.

Pourtant, à ce jour, le Gouvernement ne semble pas avoir donné suite à cette recommandation.

Elle souhaite donc connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour faire cesser ces disparités.

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Réponse du Ministère chargé de l'apprentissage et de la formation professionnelle publiée le 19/01/2011

Réponse apportée en séance publique le 18/01/2011

Mme Maryvonne Blondin. Madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais interroger aujourd'hui M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, par l'intermédiaire de Mme la ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle, sur les disparités de traitement existant entre salariés pacsés et salariés mariés.

À plusieurs reprises – en 2008 puis en 2009 –, la HALDE, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, a jugé discriminatoire le refus d'accorder aux salariés pacsés les mêmes droits aux congés pour événements familiaux qu'aux salariés mariés.

Selon l'article L. 3142-1 du code du travail, un salarié bénéficie notamment d'une autorisation de quatre jours d'absence pour son mariage et d'un jour d'absence pour le décès d'un parent de son conjoint. Cette autorisation n'est pas prévue lors de la conclusion d'un PACS, ou pacte civil de solidarité.

La HALDE, comme la Cour européenne des droits de l'homme, retient une acception large de la notion de famille et considère qu'il s'agit là d'une discrimination au sens de l'article L. 1132-1 du code du travail, qui interdit toute discrimination, directe ou indirecte, fondée sur la situation de famille.

La Haute autorité estime aussi que cette différence de traitement peut être considérée comme discriminatoire en raison de l'orientation sexuelle.

En outre, certaines entreprises, par leurs conventions collectives, ont décidé d'aller au-delà de ces obligations légales, ce qui, dans la pratique, crée de nouvelles disparités de traitement.

Les fonctionnaires bénéficient quant à eux d'un régime privilégié, puisqu'une autorisation exceptionnelle de cinq jours leur est accordée en cas de conclusion d'un PACS.

Des disparités de traitement existent donc entre couples mariés et couples pacsés à l'intérieur du secteur privé, mais aussi entre secteur privé et secteur public. Or une telle situation touche de plus en plus de personnes : je vous rappelle qu'en France 175 000 PACS ont été conclus, dont 2 647 dans le Finistère pour 3 394 mariages, et 9 339 PACS en Bretagne pour 12 113 mariages. Le PACS gagne donc évidemment en notoriété.

Par conséquent, madame la ministre, entendez-vous supprimer ces inégalités et étendre aux salariés unis par un PACS le bénéfice de l'ensemble des congés pour événements familiaux réservés aux seuls salariés mariés ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nadine Morano, ministre auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Madame la sénatrice, la loi du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité a instauré un nouveau statut pour les couples qui diffère à la fois de celui des conjoints mariés et de celui des concubins.

En créant ce nouveau statut, le législateur a accordé aux partenaires du PACS certains droits ouverts jusqu'alors aux seuls couples mariés. Ainsi, s'agissant des congés pour événements familiaux prévus à l'article L. 3142-1 du code du travail, la disposition octroyant deux jours de congés rémunérés en cas de décès du conjoint a été étendue aux partenaires du PACS.

Néanmoins, ce nouveau statut n'a pas été conçu pour être identique à celui du mariage, notamment s'agissant de ses conséquences sur la filiation. Il vise seulement la relation de couple, et non les liens au sein de la famille dans son ensemble.

C'est la raison pour laquelle la position du Gouvernement diffère de l'avis de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, exprimé par deux fois, en 2008 et en 2009. Les deux situations ne sont pas comparables en droit et les régimes juridiques peuvent donc différer sans qu'il y ait discrimination.

Je tiens toutefois à rappeler que, dans les faits, les dispositions légales ne représentent bien sûr qu'un minimum et que de nombreux accords de branche ou d'entreprise prévoient aujourd'hui des dispositions plus favorables, dont certaines intègrent des droits supplémentaires par rapport à la loi pour les couples pacsés. De ce fait, une modification législative n'aboutirait pas à créer systématiquement une équivalence des droits entre mariés et pacsés dans toutes les entreprises.

En conséquence, le Gouvernement estime nécessaire de laisser une autonomie suffisante aux partenaires sociaux pour négocier l'octroi de jours de congés rémunérés. Selon un recensement effectué en 2010, près de cinquante conventions collectives nationales ou accords de branche prévoient d'accorder des jours d'absence rémunérés pour signature d'un PACS.

Enfin, s'agissant du congé de paternité, également évoqué dans votre question, la Cour de cassation a rappelé dans un arrêt du 11 mars 2010 qu'il est réservé au père, quel que soit d'ailleurs le lien juridique qui unit ou non ce dernier à la mère. En effet, l'objectif de cette loi est, je vous le rappelle, d'impliquer plus fortement les pères dans l'exercice des responsabilités familiales.

Il n'existe donc pas aujourd'hui de disparités injustifiées qu'il conviendrait de corriger.

M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin.

Mme Maryvonne Blondin. J'entends bien les réponses de Mme la ministre et je n'en suis pas étonnée.

Néanmoins, en l'état actuel du droit, le seul cadre juridique d'union ouvert aux couples homosexuels est bien celui du PACS. Coïncidence, c'est aujourd'hui que le Conseil constitutionnel examine la question du mariage entre homosexuels.

Faire du mariage une condition préalable au bénéfice des congés rémunérés pour événements familiaux ne peut qu'engendrer une discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Les couples hétérosexuels gardent en effet la possibilité de contracter un mariage.

Malgré les propos que vient de tenir Mme la ministre, je constate qu'il y aura, là encore, une discrimination.

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