Question de M. BOYER Jean (Haute-Loire - UC) publiée le 07/10/2010

M. Jean Boyer attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur l'avenir et le développement durable de l'énergie photovoltaïque en France.

En effet, le soutien financier à la production de l'électricité à partir de sources renouvelables a été multiplié par cinq en 2009 : 500 millions d'euros contre 100 millions d'euros en 2008. Dans le cadre des énergies renouvelables, dont la directive électricité renouvelable de 2001 fixe l'objectif à 21 % dans la consommation brute de l'Union, le photovoltaïque connaît depuis de nombreux mois un engouement que l'on peut qualifier d'exceptionnel. La puissance cumulée du parc photovoltaïque installée en France était de 81 mégawatts fin 2008 et sera d'environ 850 mégawatts fin 2010, soit une multiplication par dix en deux ans. Cette initiative qui va dans le sens de l'objectif européen d'atteindre un niveau de développement important est aujourd'hui victime de son succès. Des conditions restrictives ont été mises en place à compter de l'arrêté du 13 janvier 2010, puis d'une nouvelle application règlementaire au 29 septembre dernier, ne sont pas sans poser un certain nombre de problèmes aux porteurs de projets. Les prix initiaux n'étaient-ils pas trop incitatifs en comparaison aux tarifs actuels ? Il est vrai qu'au cours de l'année 2009 la société Électricité de France enregistrait chaque mois environ 5 000 demandes de contrat d'achat, les demandes avoisinent aujourd'hui 3 000 par jour.

Il souhaiterait connaître la nature des conditions d'accès au photovoltaïque, avec l'adaptation des nouveaux tarifs principalement sur des bâtiments à vocation multiple : industrielle, agricole…. Il s'interroge sur l'avenir de l'énergie photovoltaïque en France ainsi que sur la nature des équipements souhaités ou souhaitables. De nombreux projets sont en cours, mais pas totalement finalisés, engagés par des particuliers ou des collectivités. Enfin, il espère que dans le cadre de la refonte des ressources des collectivités locales, il soit possible d'envisager que celles-ci puissent bénéficier d'un tarif préférentiel spécifique, non prévu à ce jour. Il le remercie de sa réponse rapide au moment où il y a de nombreux changements.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du logement publiée le 15/12/2010

Réponse apportée en séance publique le 14/12/2010

M. Jean Boyer. Le photovoltaïque a indiscutablement suscité l'envie d'entreprendre en lançant des projets porteurs, de nature à atteindre des objectifs à la fois environnementaux et économiques, venant en complément d'une activité professionnelle. En particulier, les bâtiments agricoles ou artisanaux sont propres à être équipés pour la production d'une énergie électrique d'origine naturelle.

Le succès a, semble-t-il, dépassé toutes les prévisions, toutes les données, toutes les perspectives et même toutes les espérances ! Mais les tarifs de rachat initialement pratiqués n'étaient-ils pas trop incitatifs ?

À la fin de l'année 2008, la puissance cumulée du parc photovoltaïque installé en France était de 81 mégawatts ; aujourd'hui, elle est d'environ 850 mégawatts, soit un décuplement en deux ans !

Mais ne regardons pas derrière nous ; regardons autour de nous et, surtout, devant nous.

Très sincèrement, la situation est grave : les porteurs de projets sont désorientés, découragés. Ils sont nombreux à risquer une faillite ou un dépôt de bilan. Pour les agriculteurs, les espoirs de diversification constructive s'effondrent.

Monsieur le secrétaire d'État, on ne doit pas changer les règles en cours de route. Certes, un communiqué de presse du mardi 7 décembre dernier donne à entendre qu'il y aura une concertation sur un nouveau cadre de régulation. Ne veut-on pas plutôt ensoleiller et éblouir les porteurs de projets ? Ces derniers sont complètement désarmés, car ils savent que la décision vient d'en haut. Voilà des semaines, voire des mois, qu'ils ont adressé des dossiers à ERDF, mais la plupart d'entre eux n'ont obtenu aucune réponse. Le blocage n'est pas dû à une grève nationale prolongée de La Poste ! L'amertume qui teinte mes propos reflète celle de la France rurale.

Certains ont déjà réalisé des investissements, selon des projections fondées sur des tarifs assurant la faisabilité des projets ; aujourd'hui, ils attendent, ils ne savent plus rien. Il ne faut pas changer les règles en cours de route ! Au football, il existe des erreurs d'arbitrage, souvent dues à la rapidité de la prise de décision, mais pour notre part nous avons, jusqu'à la réunion du 20 décembre, le temps de la réflexion. Je souhaite que celle-ci soit vraiment constructive.

Nous demandons instamment que les dossiers ayant été déposés entre le 12 janvier et le 7 décembre puissent être pris en compte.

Monsieur le secrétaire d'État, avant que le décret prévu voie le jour, je me permets très simplement de vous prier d'entendre le message de cette France active, de cette France qui veut travailler, de ces artisans, de ces agriculteurs qui espéraient un complément financier indispensable, sans oublier les projets communaux. Je vous demande avec insistance que les dossiers ayant été déposés depuis le 12 janvier ne soient pas bloqués par le moratoire.

Les porteurs de projets n'ont pas à payer les conséquences de mauvaises prévisions. Ils n'ont pas à devenir des victimes, alors qu'ils ont simplement mis en œuvre un dispositif selon les modalités prévues au moment où ils ont lancé leurs projets.

Monsieur le secrétaire d'État, que pouvez-vous me dire sur ce sujet d'une importance primordiale, concernant de nombreuses personnes actives qui ne veulent pas devenir des personnes assistées ? Un responsable n'a pas le droit de désespérer, mais si leurs dossiers ne sont pas pris en compte, beaucoup de porteurs de projets tomberont dans l'assistanat.

Monsieur le secrétaire d'État, j'espère que votre réponse sera à la hauteur de la gravité de mon propos.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Monsieur le sénateur, vous soulevez une question essentielle qui agite le monde agricole depuis maintenant un an, puisque de premières décisions ont été prises au mois de décembre 2009.

Le principal soutien apporté par les pouvoirs publics au développement de la filière de production d'énergie d'origine photovoltaïque, c'est le tarif de rachat, qui est acquitté par l'ensemble des consommateurs via leurs factures d'électricité. En d'autres termes, une explosion des demandes de raccordement au réseau au titre du tarif de rachat aurait pour conséquence une explosion des tarifs de l'électricité, dont il faudrait alors expliquer les causes aux consommateurs.

Le tarif de rachat a permis un démarrage très soudain et brutal de la filière. Au mois de novembre de l'année dernière, environ 5 000 dossiers par mois étaient déposés ; aujourd'hui, nous en sommes à 3 000 dossiers par jour !

Par ailleurs, la baisse des coûts d'installation a entraîné une forte hausse de la rentabilité et, par voie de conséquence, du nombre de dossiers déposés.

Face à cette situation, nous avons donc dû adopter un ensemble de mesures. Ainsi, la structure tarifaire a été révisée à la fin de 2009, nous avons décidé une baisse homogène de 12 % des tarifs d'achat et la réflexion sur le sujet va se poursuivre dans les semaines à venir.

En effet, si l'énergie photovoltaïque est une énergie d'avenir, qui recouvre des enjeux industriels considérables, c'est également une énergie chère. Nous devons donc trouver un équilibre entre le nécessaire développement de la filière et le maintien de tarifs d'électricité acceptables pour tous les consommateurs, notamment les plus modestes d'entre eux.

Il faut en outre soutenir la filière sur le plan industriel, pour faire en sorte qu'elle produise français, ce qui n'est pas le cas actuellement. Nous mettons en place des éléments à cette fin.

Telles sont les réponses que je souhaitais vous apporter sur la question essentielle du développement de la filière photovoltaïque, monsieur le sénateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Monsieur le secrétaire d'État, j'ai d'emblée cru lire sur votre visage que vous ne pourriez pas m'apporter ce que je souhaitais…

Vous avez semblé établir une distinction entre le souhaitable et le possible. Je le dis sans esprit polémique, mais tout ce que vous nous avez indiqué, nous le savions dès le départ ! Nul n'ignorait que le consommateur financerait le tarif de rachat ! Personne ne me démentira, et surtout pas vous, monsieur le secrétaire d'État, car je connais votre classe. Mais un agriculteur issu de la France rurale n'a pas votre éloquence pour exprimer le malaise que suscite ce changement de règles en cours de route. Il est grave de remettre aujourd'hui en cause des tarifs que les porteurs de projets pensaient acquis quand ils se sont lancés !

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