Question de M. SIGNÉ René-Pierre (Nièvre - SOC) publiée le 18/02/2011

Question posée en séance publique le 17/02/2011

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. René-Pierre Signé. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Monsieur le ministre, les militants du planning familial s'inquiètent de la menace qui pèse pour les femmes sur l'accès à l'avortement dans de bonnes conditions. Elle apparaît comme une remise en cause non avouée d'un droit acquis de haute lutte.

Aujourd'hui, les délais augmentent de façon considérable : les femmes doivent attendre plus de trois semaines pour accéder à ces services et sont renvoyées d'hôpital en hôpital en raison des restructurations liées à la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi « Bachelot », qui a réduit le nombre de services, mais aussi le nombre de médecins pratiquant cet acte.

En outre, le désengagement du secteur privé a fait passer la part du secteur public de 64 % à 70 %, concentrant ainsi les actes et allongeant le temps d'attente. Mises de ce fait hors délais, ces femmes, du moins celles qui le peuvent, sont contraintes d'aller avorter à l'étranger.

La revendication porte sur l'application totale de la loi « Aubry » de 2001, qui dépénalise l'interruption volontaire de grossesse, l'IVG, repousse le délai légal d'avortement de dix à douze semaines, et autorise, en outre, les mineures à se faire avorter sans autorisation parentale.

La protestation, qui prend aujourd'hui beaucoup d'ampleur, est liée à une régression indiscutable causée, d'abord, par la restructuration des hôpitaux et, ensuite, par le peu de mobilisation du personnel médical pour un acte souvent mal accepté, mal perçu et mal rémunéré.

Or l'IVG est un acte médical à part entière, même si de nombreux médecins refusent de l'appliquer après sept semaines de grossesse pour des raisons d'éthique ou parce qu'une fois passé ce délai, l'IVG médicamenteuse – pourtant, mal encadrée et douloureuse –, devient plus chirurgicale. Ces médecins se distancient ainsi de leur responsabilité, mais ce faisant ils enfreignent la loi. Or l'IVG est un acte gynécologique ordinaire.

Par ailleurs, la faiblesse du forfait payé par la sécurité sociale rend son accès difficile pour certaines femmes. Le forfait hospitalier devait être augmenté de 50 %, comme Mme Bachelot s'y était engagée. Il est à espérer que cette promesse a été tenue, mais je n'en suis pas certain.

Ma question repose sur trois points essentiels : quid de l'accueil élargi, y compris aux mineures sans autorisation parentale, dans des services plus nombreux ? Qu'en est-il de l'acceptation d'un délai d'intervention de douze semaines ? À quand la mise en œuvre de l'augmentation promise du forfait hospitalier versé par la sécurité sociale ?

On est en droit d'attendre une réponse claire et précise à une question aussi simple ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)


Réponse du Ministère du travail, de l'emploi et de la santé publiée le 18/02/2011

Réponse apportée en séance publique le 17/02/2011

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Monsieur le sénateur, vous avez oublié l'IVG médicamenteuse ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Plusieurs sénateurs socialistes. Il en a parlé !

Mme Nicole Bricq. Il faut écouter !

M. Xavier Bertrand, ministre. Si nous constatons aujourd'hui un recul du nombre d'interventions chirurgicales, c'est aussi grâce à l'IVG médicamenteuse, qui a trouvé toute sa place.

M. René-Pierre Signé. Elle est dangereuse et douloureuse !

M. Xavier Bertrand, ministre. Sur un tel sujet, il faut faire preuve de clarté. Or vous avez expliqué l'évolution de la situation de façon partielle ! (Protestations sur les mêmes travées.)

Mme Odette Terrade. Il a très bien expliqué !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne comprends pas pourquoi vous êtes gênés par mes arguments ; je ne les ai pas encore développés !

Vous avez tenté d'expliquer la situation en invoquant la restructuration induite par la loi « Bachelot ». Vous savez pertinemment que ce n'est pas la raison du recul des interventions chirurgicales ! Dans notre pays, 5 % des établissements pratiquent 23 % des IVG. Au vu de la bonne tenue de votre exposé, monsieur Signé, je suis certain que vous le savez.

Les fermetures de services étaient justifiées par des motifs liés à la sécurité des patients. En effet, lorsque le nombre des actes médicaux effectués au sein d'un service est inférieur à un certain seuil, cela signifie que le nombre de praticiens y est faible. Or moins les médecins sont nombreux dans un service, et moins les conditions de sécurité sont bonnes pour les patients.

Les raisons de ces fermetures ne répondent pas à un objectif de rentabilité. Au contraire, la proximité en matière sanitaire permettrait à la sécurité sociale de réaliser des économies. Or la fermeture d'un service justifiée par la faiblesse de son effectif de praticiens oblige certains patients à parcourir cinquante ou quatre-vingts kilomètres pour se faire opérer.

M. Guy Fischer. Cela va se généraliser !

M. Xavier Bertrand, ministre. Il faut bien alors payer les transports sanitaires. C'est bien la preuve que nous n'avons pas raisonné en termes d'économies à réaliser, mais de sécurité des actes !

Monsieur le sénateur, Nora Berra et moi-même veillons attentivement, comme Roselyne Bachelot-Narquin l'a fait avant nous, à ce que ce droit – il s'agit bien d'un droit – soit garanti pour toutes les femmes sur l'ensemble du territoire français.

S'agissant des forfaits, la tarification à l'activité doit prendre en compte la juste rémunération de l'acte. J'aurai à cœur de veiller, à l'occasion de la campagne tarifaire, à ce que les missions d'intérêt général et à l'aide à la contractualisation, les MIGAC, soient bel et bien garanties. L'hôpital ne peut marcher que sur deux jambes : la tarification à l'activité et les MIGAC. Cela n'a pas toujours été le cas par le passé.

Il ne sert à rien de faire croire que le droit régresse et que nous procédons à des restructurations pour réaliser des économies. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Nous restructurons uniquement pour des raisons de sécurité : c'est notre seule ligne directrice. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

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