Question de M. TESTON Michel (Ardèche - SOC) publiée le 10/02/2011

M. Michel Teston appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement sur les permis exclusifs de recherche de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux accordés dans le sud de la France.

En effet, les permis dits « de Montélimar », « de Nant » et de « Villeneuve de Berg » vont permettre à Total pour le premier et à GDF-Suez pour les deux autres d'effectuer, en collaboration avec des entreprises américaines spécialisées, des recherches en vue d'exploiter des gaz de schiste par la technique de fracturation hydraulique.

Les risques environnementaux et en matière de santé publique liés à cette technique d'extraction, tels qu'ils ressortent des exploitations réalisées aux États-Unis et au Canada, suscitent une grande hostilité et une mobilisation importante des populations concernées.

Interrogée par des parlementaires ou par des citoyens, elle a précisé à plusieurs reprises qu'il ne s'agissait, pour l'heure, que de permis d'exploration et non de permis d'exploitation, ces derniers ne pouvant être accordés qu'après la tenue d'une enquête publique. Cette précision visait à les rassurer, en laissant entendre que, dans la phase d'exploration, les entreprises n'auraient pas recours à la technique de fracturation hydraulique.

Or, cela ne paraît pas exact. En effet, comme l'indiquent clairement les documents remis par GDF-Suez aux maires des communes sur lesquelles des forages d'exploration doivent être effectués, les couches schisteuses doivent subir une fracturation hydraulique afin de réaliser un test de production du gisement.

Aussi, au regard des risques environnementaux qui excèdent de beaucoup les nuisances engendrées par de simples forages de carottage, il demande qu'en application du principe de précaution, elle suspende les arrêtés accordant ces permis exclusifs de recherche afin d'en faire étudier préalablement les conséquences environnementales. En outre, comme d'autres parlementaires, il demande la saisine de la Commission nationale du débat public sur ces projets.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du logement publiée le 09/03/2011

Réponse apportée en séance publique le 08/03/2011

M. Michel Teston. J'appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement sur les permis exclusifs de recherche de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux accordés dans le sud de la France.

En effet, les permis dits de Montélimar, de Nant et de Villeneuve de Berg vont permettre à Total pour le premier et à GDF-Suez pour les deux autres d'effectuer, en collaboration avec des entreprises américaines spécialisées, des recherches en vue d'exploiter des gaz de schiste par la technique de fracturation hydraulique.

Les risques pour l'environnement et pour la santé publique liés à cette technique d'extraction, constatés sur des exploitations aux États-Unis et au Canada, suscitent une grande hostilité et une mobilisation importante des populations concernées.

Ainsi, au moins 15 000 personnes se sont rassemblées récemment à Villeneuve de Berg, en Ardèche, pour manifester leur totale opposition au projet d'exploitation industrielle du gaz de schiste.

Interrogée par des parlementaires ou par des citoyens, Mme la ministre a précisé à plusieurs reprises qu'il ne s'agissait, pour l'heure, que de permis d' « exploration » et non de permis d'exploitation, ces derniers ne pouvant être accordés qu'après la tenue d'une enquête publique. Cette précision visait à rassurer, en laissant entendre que, dans la phase d'exploration, les entreprises n'auraient pas recours à la technique de fracturation hydraulique.

Or cette information ne paraît pas exacte. En effet, comme l'indiquent clairement les documents remis par GDF-Suez aux maires des communes sur lesquelles des forages d'exploration doivent être effectués, les strates de schiste doivent subir une fracturation hydraulique afin de réaliser un test de production du gisement.

Aussi, au regard des risques pour l'environnement et pour la santé découlant de cette technique, risques qui excèdent de beaucoup les nuisances engendrées par de simples « carottages », je demande, en application du principe de précaution, que Mme la ministre ne se contente pas de suspendre provisoirement ces permis exclusifs de recherche, c'est-à-dire seulement jusqu'à la fin du mois de juin 2011, date à laquelle devraient être tirées les conclusions du rapport final de la mission interministérielle mise en place récemment pour « éclairer le Gouvernement sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux des hydrocarbures de roche-mère (gaz et huiles de schiste) ».

Monsieur le secrétaire d'État, cette décision est très insuffisante. En réalité, c'est l'arrêt total du processus que le Gouvernement doit décider.

Enfin, compte tenu des impacts significatifs sur l'environnement et l'aménagement du territoire de ces projets d'exploration, d'abord, et d'exploitation, ensuite, la saisine de la Commission nationale du débat public me paraît nécessaire.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu attirer l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, sur le sujet des gaz de roche-mère, dits « gaz de schiste ».

Actuellement, trois permis de recherche d'hydrocarbures ont été accordés par arrêtés datés du 1er mars 2010 sur une surface d'un peu plus de 9 000 kilomètres carrés. Concernant les départements de l'Ardèche, de la Drôme, du Vaucluse, du Gard, de l'Hérault, de l'Aveyron et de la Lozère ils ont pour seul objectif d'acquérir une meilleure connaissance géologique du sous-sol et d'évaluer l'existence, ou non, d'un gisement et de son potentiel éventuel en tenant compte de la nécessité de respecter l'environnement.

Ces arrêtés ont tous fait l'objet d'une information publique à la suite d'un processus administratif qui inclut une publication au Journal officiel de la République française ainsi qu'au Journal officiel de l'Union européenne. En Europe, et notamment en France, l'évaluation de ce type de ressources n'en est qu'à ses débuts, sans certitude de succès.

Toutefois, compte tenu des préoccupations environnementales importantes que suscite ce sujet complexe, en accord avec le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, une mission d'inspection a été confiée au Conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies et au Conseil général de l'environnement et du développement durable afin d' « éclairer le Gouvernement sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux des hydrocarbures de roche-mère ». Cette mission examinera également la situation des huiles de schiste pour lesquels des travaux d'exploration sont prévus dans l'Aisne, la Marne et en Seine-et-Marne.

Un rapport d'étape nous sera remis le 15 avril 2011 et un rapport final le 31 mai 2011. Ces rapports seront rendus publics et les conclusions en seront tirées avant la fin du mois de juin 2011.

Nathalie Kosciusko-Morizet et Éric Besson ont rencontré les industriels détenteurs de permis de recherche de gaz ou d'huiles de roche-mère. Ils ont pris connaissance de l'avancement des travaux d'exploration planifiés par les industriels et ont examiné la compatibilité de leurs calendriers avec les travaux de la mission.

En ce qui concerne les gaz de schiste, il n'y aura aucun forage et aucune opération technique de terrain avant la remise du rapport final.

Enfin, monsieur le sénateur, vous avez évoqué le principe de précaution, lequel repose sur la connaissance du risque. Supprimer toute recherche rendrait impossible cette connaissance. Le principe de précaution ne me semble donc pas en question ici.

M. le président. La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Monsieur le secrétaire d'État, votre réponse appelle de ma part trois remarques.

La première concerne l'absence de transparence du Gouvernement sur cette question. Vous avez évoqué la large information publique. Je voudrais simplement indiquer que les permis de recherche ont été accordés au printemps 2010 dans le plus grand secret.

En outre – et vous ne l'avez pas relevé –, une ordonnance du 20 janvier 2011 a permis au Gouvernement de modifier l'article L. 122-3 du code minier relatif au permis exclusif de recherche. Désormais, l'instruction de la demande de permis ne nécessite pas une enquête publique préalable.

Ma deuxième remarque est relative aux mesures décidées par le Gouvernement, c'est-à-dire la suspension provisoire des permis de recherche pendant les travaux de la mission interministérielle à laquelle vous avez fait allusion. Ces mesures ne sont pas à la hauteur des enjeux. Les risques pour l'environnement et pour la santé que fait courir la technique dite de fracturation hydraulique des strates de schiste ne vont pas de disparaître comme par enchantement en quelques semaines.

Dans l'attente de la mise au point de techniques inoffensives pour la santé et respectueuses de l'environnement, il me paraît absolument indispensable de tout arrêter.

Ma troisième et dernière remarque a trait à la question de la saisine de la Commission nationale du débat public, à laquelle M. le secrétaire d'État n'a pas répondu.

Cette saisine me paraît absolument nécessaire. Je rappelle en effet que « la Commission nationale du débat public est chargée de veiller au respect de la participation du public au processus d'élaboration des projets d'aménagement ou d'équipement d'intérêt national […], dès lors qu'ils présentent de forts enjeux socio-économiques ou ont des impacts significatifs sur l'environnement ou l'aménagement du territoire ».

La recherche et l'exploitation des gaz de schiste relèvent donc bien de la compétence de cette commission. Par conséquent, celle-ci doit être saisie de ce dossier par le Gouvernement.

Mme Nicole Bricq. Très bien !

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