Question de M. DOMINATI Philippe (Paris - UMP) publiée le 30/03/2011

Question posée en séance publique le 29/03/2011

Concerne le thème : Grand Paris

M. Philippe Dominati. Monsieur le ministre, le présent débat démontre que l'impulsion donnée par le Président de la République quelques mois après son élection suscite l'intérêt. Elle est en effet nécessaire pour une vision non seulement quotidienne mais également économique et internationale de la région d'Île-de-France. Ce débat porte bien au-delà des limites de cette région.

Pour autant, le mécanisme employé pour l'organisation des transports, dont la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris constitue la première étape, obéit à une logique quelque peu conservatrice.

Monsieur le ministre, vous avez répondu tout à l'heure à M. Vera, qu'il n'y avait pas de vision libérale ; je vous en donne acte. En effet, la région d'Île-de-France est la seule région de notre pays, voire du monde, à conserver un monopole public pour les transports collectifs, contrairement à toutes les villes-monde que nous voulons concurrencer au travers du projet du Grand Paris.

Or tout cela a évidement un coût – 32 milliards d'euros –, qui pèsera sur les Franciliens, les entreprises et l'emploi par la création d'impôts nouveaux et la modification d'impôts existants, notamment le versement transports.

Je suppose que le Gouvernement a choisi une telle option pour des raisons de paix sociale et de rapidité dans l'exécution du projet.

Le coût est tout de même particulièrement élevé. D'ailleurs, si les trois sociétés de transports d'État créées jusqu'à présent – la SNCF, la RATP, Réseau ferré de France – ne fonctionnent pas, pourquoi en créer une quatrième ?

Deux questions peuvent être posées.

Premièrement, mon collègue M. Béteille l'a évoqué voilà quelques instants, si le projet fonctionne, il faut renforcer l'axe central et, dans ce cas, l'étude envisagée ne suffit pas.

Deuxièmement, il existe une incohérence technique : pourquoi y a-t-il rupture de charge entre le centre de l'agglomération et l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle ? Surtout, que se passera-t-il si, comme d'habitude, l'État ne respecte pas le budget de départ ? Qui paiera le surcoût ?

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Réponse du Ministère de la ville publiée le 30/03/2011

Réponse apportée en séance publique le 29/03/2011

M. Maurice Leroy, ministre. Monsieur le sénateur, vous resituez bien l'enjeu du Grand Paris. Je veux vous rassurer. Si j'ai bien compris – parlons clairement et franchement, si vous le voulez bien –, votre inquiétude concerne la Société du Grand Paris, puisque vous avez fait référence à la SNCF. Par pudeur, ce que je comprends – et je vous en remercie –, vous ne l'avez pas évoquée directement, mais je préfère que l'on aborde sans détour le sujet.

Issue de la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, la Société du Grand Paris est, par définition, un établissement public biodégradable – voilà qui devrait faire plaisir à Mme Voynet –, puisque sa mission consiste à réaliser le métro automatique en rocade d'une longueur de 150 kilomètres et à « porter » l'emprunt. L'exploitation sera ensuite assurée par le Syndicat des transports d'Île-de-France, d'où le questionnement légitime de Mme Catherine Tasca voilà quelques instants sur ce qu'il adviendra lors de la remise de cette exploitation.

Il est normal que nous ayons ces discussions et que celles-ci soient serrées. Je n'oublie pas que je suis élu moi-même ; si j'étais à la place des élus siégeant dans les instances dirigeantes du STIF, je me poserais les mêmes questions s'agissant des conditions de remise de l'exploitation.

Pour ce qui concerne le financement, monsieur le sénateur, c'est le Parlement, et donc vous-même, qui en a la maîtrise. Pour ma part, je fais confiance tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale pour veiller à éviter tout dérapage. Interrogez donc à ce sujet M. Jean-Pierre Fourcade, qui a été le rapporteur du texte et qui veille toujours attentivement à ces travaux : nous avons réellement tous les moyens de réaliser ce projet sans dérapage.

Votre question est intéressante. J'entends bien votre mise en garde contre les éventuels dérapages en termes de financement.

Vous savez que je suis quelqu'un de franc, qui aime parler clairement ; c'est ainsi. Comme disait Talleyrand, si toute vérité n'est pas bonne à dire, elle est toujours bonne à entendre. Permettez-moi donc cette remarque : il est curieux que, en dehors de l'hémicycle, quel que soit le lieu de mes déplacements sur le terrain, les élus me demandent des gares supplémentaires. Il faut aussi savoir ce que l'on veut !

Que je tienne bon et que je sois ferme sur ce point devrait plutôt vous rassurer ; il s'agit justement d'éviter ce type de dérapages ! Je rappelle pour mémoire que la construction d'une gare coûte au minimum 80 millions d'euros. Or il faut tenir le même discours au sein de la Haute Assemblée et sur le terrain : on ne peut pas mettre en garde contre la dérive des finances publiques en tant que parlementaire et réclamer absolument sa gare en qualité d'élu local. C'est aussi votre rôle de m'apporter votre soutien dans la mission que m'ont confiée le Président de la République et le Premier ministre pour le maintien du Grand Paris.

Encore une fois, ce projet est également magnifique pour le rayonnement international de Paris. L'ensemble des capitales en parlent. Je ne sais pas si nous le mesurons nous-mêmes et si nous en avons toujours bien conscience. Il convient aussi de saluer les architectes français qui ont conçu ce projet et dont la renommée à l'étranger est éclatante.

J'espère vous avoir complètement rassuré, monsieur le sénateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, pour la réplique.

M. Philippe Dominati. Monsieur le ministre, vous m'avez partiellement rassuré.

Si votre mission peut paraître absolument nécessaire et que vous l'accomplissez avec beaucoup d'habileté, une évolution institutionnelle est indispensable à moyen terme pour les sociétés de transport : aucune des villes-monde dont vous parlez ne s'appuie sur le mécanisme retenu pour le projet parce qu'il est trop onéreux. Nous avons en effet le même souci de l'efficacité de la dépense publique.

En outre se pose le problème du périmètre. Ma collègue Mme Morin-Desailly de Seine-Maritime s'est exprimée à ce sujet. La taxe spéciale d'équipement concernera-t-elle également ce département, par exemple ? Pour le moment, elle ne vise que les Franciliens.

Voilà une question que je poserai très prochainement lors du débat budgétaire : nous devons savoir quelle est la vision exacte du Grand Paris. Votre réponse peut me satisfaire pour ce qui est de la nécessité du court terme, mais en réalité l'évolution semble inévitable, parce qu'elle sera contemporaine.

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