Question de Mme ASSASSI Éliane (Seine-Saint-Denis - CRC-SPG) publiée le 31/03/2011

Mme Éliane Assassi attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le manque criant de conseillers d'insertion et de probation (CIP), particulièrement dans le département de la Seine-Saint-Denis.

En effet, dans ce département, six professionnels titulaires et quatre stagiaires assurent la prise en charge des 996 personnes détenues à ce jour à la maison d'arrêt de Villepinte. S'agissant des mesures dites de milieu ouvert, 40 travailleurs sociaux titulaires et quatre stagiaires veillent à l'exécution de 8 030 mesures de justice parmi lesquelles 750 sont encore en attente de prise en charge. À cela viennent s'ajouter les 4 000 mesures du service de l'application des peines et les 600 mesures du parquet du tribunal de grande instance de Bobigny qui seront prochainement transmises pour suivi au SPIP 93. Les professionnels de la justice dénoncent depuis de nombreuses années le manque de moyens pour exercer leurs missions. Ils n'arrivent plus en effet à faire face à l'augmentation des mesures de justice prononcées, à la diversification de leurs interventions, aux situations sociales de plus en plus dégradées. De même, il leur est difficile de s'impliquer dans la mise en place des dispositifs permettant de favoriser des aménagements de peine.

Rappelant que les actions du SPIP participent toutes à la prévention de la récidive, tant auprès des personnes détenues qu'auprès des justiciables soumis à des mesures alternatives à l'incarcération, elle lui demande, par conséquent, quelles mesures concrètes il envisage de prendre afin de remédier à l'insuffisance du nombre de CIP dans ce département et de leur permettre ainsi d'exercer pleinement leurs missions de service public de la justice.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la jeunesse et de la vie associative publiée le 25/05/2011

Réponse apportée en séance publique le 24/05/2011

Mme Éliane Assassi. Madame la secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur le manque criant de conseillers d'insertion et de probation, ou CIP, particulièrement dans le département de la Seine-Saint-Denis. En 2006, j'avais déjà interpellé sur ce sujet le garde des sceaux de l'époque. Celui-ci m'avait alors assuré que tout serait mis en œuvre pour répondre à mes inquiétudes et à celles des personnels concernés.

Cinq ans plus tard, force est de constater qu'il n'en est rien et que les moyens manquent toujours. En effet, dans le département dont je suis l'élue, six professionnels titulaires et quatre stagiaires assurent la prise en charge des 996 personnes détenues à ce jour à la maison d'arrêt de Villepinte.

S'agissant des mesures dites « de milieu ouvert », quarante travailleurs sociaux titulaires et quatre stagiaires veillent à l'exécution de 8 030 mesures de justice, parmi lesquelles 750 sont encore en attente de prise en charge. Viennent s'y ajouter les 4 000 mesures du service de l'application des peines et les 600 mesures du parquet du tribunal de grande instance de Bobigny, qui seront prochainement transmises pour suivi au service pénitentiaire d'insertion et de probation de la Seine-Saint-Denis, le SPIP 93.

Les professionnels de la justice dénoncent depuis de nombreuses années le manque de moyens dont ils souffrent dans l'exercice de leurs missions.

Ils n'arrivent plus à faire face à l'augmentation des mesures de justice prononcées, à la diversification de leurs interventions et à des situations sociales qui ne cessent de se dégrader.

De même, il leur est de plus en plus difficile de s'impliquer dans la mise en place de dispositifs permettant de favoriser des aménagements de peine.

À plusieurs reprises, l'ensemble des professionnels de la justice, des magistrats jusqu'aux CIP, ont manifesté leur colère face à la crise que connaît l'institution judiciaire.

Tous dénoncent les carences du budget de la justice, qui se situe au 37e rang européen, les augmentations de crédits dont vous vous vantez, madame la secrétaire d'État, ne servant qu'à financer la construction de nouvelles places de prison.

Je crois pourtant utile de rappeler que les actions du SPIP participent toutes à la prévention de la récidive, auprès tant des personnes détenues que des justiciables soumis à des mesures alternatives à l'incarcération.

À cet égard, plutôt que de mettre en cause les CIP, comme ce fut le cas dans l'affaire de Pornic, mieux vaudrait prendre toutes mesures urgentes afin de remédier au sous-effectif très important qui prévaut dans les SPIP. Alors que, après la loi pénitentiaire, une étude préconisait mille embauches de CIP pour ramener le ratio de 80 à 60 dossiers par agent, seuls 48 postes ont été ouverts au concours 2011, ce qui, au regard des départs à la retraite, revient à une création d'emploi nulle.

Je vous demande donc, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir m'indiquer les mesures concrètes que le ministère de la justice envisage de prendre afin de remédier à l'insuffisance du nombre de CIP, notamment dans le département dont je suis l'élue – mais il me semble que cette situation existe ailleurs, hélas – et de leur permettre d'exercer pleinement leur mission de service public de la justice.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de mon collègue Michel Mercier, qui rencontre ce matin les procureurs généraux et les procureurs de la République.

Les moyens humains dévolus au service pénitentiaire d'insertion et de probation de la Seine-Saint-Denis constituent l'une des préoccupations essentielles de la Chancellerie ainsi que de l'administration pénitentiaire. Il s'agit, en effet, de concilier des conditions satisfaisantes de travail pour ces personnels avec un fonctionnement efficace du service public pénitentiaire.

Les effectifs des services d'insertion et de probation ont nettement progressé ces dernières années, passant entre 1997 et 2010 de 1 175 à 3 198, ce qui revient pratiquement à une multiplication par trois.

Parallèlement, dans le cadre de la réforme de l'organisation et du fonctionnement des SPIP, il est envisagé de recentrer ces conseillers sur leur cœur de métier en confiant à d'autres professionnels – assistants de service social, psychologues, notamment – des actes qui relevaient jusque-là de leur champ de compétence.

De même, des personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire ont été nommés dans les SPIP afin d'assurer les enquêtes et le suivi matériel de la surveillance électronique. Ces affectations se poursuivront.

Il faut le souligner également, la titularisation en 2011 de 245 agents de la 14e promotion des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation, les CPIP, actuellement en formation, ainsi que l'arrivée dans les services de 203 stagiaires de la 15epromotion, dès le 3 octobre 2011, permettront d'accroître les moyens humains disponibles.

Le recours à la réserve civile pénitentiaire, prévue par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, servira également à renforcer les effectifs de ces services, en faisant appel à des personnels expérimentés. Le budget consacré en 2011 à la réserve judiciaire et pénitentiaire a triplé par rapport à 2010.

La Chancellerie étudie, par ailleurs, les conditions dans lesquelles des agents contractuels pourront venir renforcer les effectifs des SPIP, notamment celui de la Seine-Saint-Denis, pour tenir compte des peines en attente d'exécution, qui, comme vous l'avez souligné, madame la sénatrice, sont nombreuses dans le ressort de la juridiction.

Plus précisément, les effectifs du SPIP de la Seine-Saint-Denis sont, en équivalent temps plein, de 55,8 conseillers d'insertion et de probation, dont 8 stagiaires.

Au 1er février 2011, ce service avait en charge 7 350 mesures, soit un ratio de 145 mesures par personnel d'insertion et de probation titulaire.

Enfin, la situation des effectifs du SPIP de la Seine-Saint-Denis fera l'objet d'un examen attentif lors des prochaines commissions administratives paritaires de mobilité.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. J'ai bien noté que la Chancellerie se préoccupait de la situation particulière de la maison d'arrêt de Villepinte, qui fera, je l'espère, l'objet d'un examen approfondi dans un avenir proche.

Cela dit, votre réponse ressemble peu ou prou à celle qui m'avait déjà été faite en 2006.

Je me suis rendue très récemment à la maison d'arrêt de Villepinte, où j'ai pris le temps de discuter avec les personnels. Force est de constater qu'ils ne ressentent pas sur le terrain les effets de vos annonces. Je leur rendrai compte, néanmoins, des éléments de réponse que vous avez bien voulu porter à ma connaissance.

Madame la secrétaire d'État, j'insiste et j'attire à nouveau votre attention sur cette situation particulièrement difficile à vivre pour les personnels, qui doivent pouvoir effectuer leurs missions de service public dans les meilleures conditions possible.

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