Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 03/03/2011

M. Roland Courteau attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les projets de décret fixant les conditions de départ en retraite dans le cadre du dispositif pénibilité.
Il lui indique que les projets de décret qui sont maintenant connus sont très restrictifs et viennent réduire encore plus le nombre de bénéficiaires, dans la mesure où ils prévoient une durée d'exposition à un facteur de risque, pour les personnes ayant un taux entre 10 et 20 %, extrêmement élevé. En fixant cette durée à 17 ans, le Gouvernement exclut du dispositif les personnes qui vont travailler moins longtemps dans de telles conditions, mais dont l'espérance de vie, en raison de la pénibilité de leur travail, sera pour autant réduite.
Par ailleurs, pour les taux inférieurs à 10 %, on ne pourra pas additionner plusieurs taux inférieurs à 10 % puisque ce taux devra être obtenu au titre de la même maladie.
Il lui fait également remarquer qu'on ne peut que regretter que les commissions pluridisciplinaires chargées de l'examen des conditions d'octroi ne laissent aucune place aux associations de victimes, alors même qu'elles connaissent parfaitement la réalité de la pénibilité au travail.
Par ailleurs, le projet de décret ne prévoit aucune modalité de recours contre la décision soit du médecin conseil relative à la reconnaissance de l'identité des lésions, soit de la commission pluridisciplinaire. Il sera donc impossible aux personnes concernées de faire valoir leurs droits.
Ainsi, et comme le fait remarquer la fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH), si l'on retire les personnes sans reconnaissance d'un taux d'incapacité à 60 ans (par exemple pour les cancers d'origine professionnelle) et les personnes qui ont été exposées à des facteurs de risque mais pour une durée inférieure à 17 ans, on se demande bien qui va pouvoir bénéficier de ce dispositif et quelle est la fiabilité du nombre de 30 000 bénéficiaires avancés par le Gouvernement.
Il lui demande de bien vouloir lui indiquer s'il entend, au vu de ces remarques, modifier la rédaction des projets de décret.

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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi et de la santé publiée le 15/12/2011

Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux projets de décret fixant les conditions de départ en retraite dans le cadre du dispositif pénibilité. La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a ouvert un droit à retraite à taux plein dès l'âge de soixante ans au profit des assurés justifiant d'une incapacité permanente consécutive à une maladie professionnelle ou à un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre des maladies professionnelles. Les décrets n° 2011-352, n° 2011-353 et n° 2011-354 du 30 mars 2011 (parus au Journal officiel du 31 mars 2011) ont apporté au code de la sécurité sociale et au code rural les modifications nécessaires. Il convient tout d'abord de rappeler que le texte initialement déposé au Parlement ne concernait que les seuls assurés justifiant d'un taux d'incapacité permanente au moins égal à 20 %. Lors de la discussion au Parlement, le Gouvernement a souhaité élargir ce droit aux assurés dont le taux d'incapacité est inférieur à 20 % mais au moins égal à 10 %. Cette avancée est destinée à permettre à davantage de personnes de bénéficier d'une retraite à raison de la pénibilité. Ce taux d'incapacité au moins égal à 10 % doit avoir été obtenu au titre d'une même maladie professionnelle ou d'un même accident du travail. En effet, l'article L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale dispose, en son III, que le taux d'incapacité permanente de l'assuré doit être au moins égal à un taux fixé par décret. Le cumul de taux inférieurs à 10 % serait donc contraire aux termes de la loi. Par ailleurs, en cas de taux d'incapacité au moins égal à 10 % mais inférieur à 20 %, le bénéfice de la retraite pour pénibilité est subordonné à l'avis d'une commission pluridisciplinaire chargée d'une part de vérifier que l'assuré a été exposé, pendant un nombre d'années déterminé par décret, à des facteurs de risques professionnels, d'autre part d'apprécier l'effectivité du lien entre l'incapacité permanente et l'exposition aux facteurs de risques professionnels. Ces conditions ont été expressément prévues par la loi du 9 novembre 2010. La durée d'exposition requise a été fixée à dix-sept ans par le décret du 30 mars 2011 précité. Cette durée a été retenue par analogie avec celle qui sera à l'avenir nécessaire pour bénéficier d'une retraite de la fonction publique au titre des catégories dites actives : il s'agit d'une durée significative pour juger de la pénibilité d'une carrière. Encore convient-il de préciser que la circulaire DSS/SD2/2011/151 du 18 avril 2011 (disponible sur le site http://www.sécurité-sociale.fr/ et sur le site http://www.circulaires.gouv.fr/) a apporté des aménagements pour les salariés victimes d'une maladie professionnelle. Pour ces derniers, il a été considéré que la condition d'exposition à des facteurs de risques professionnels peut être présumée remplie, l'instruction en la matière ayant été faite au moment de la reconnaissance de la maladie professionnelle, au travers des tableaux de maladies professionnelles ou via les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles. Ainsi, seul sera vérifié le fait que l'assuré justifie de dix-sept années d'activité professionnelle ayant donné lieu à cotisations à sa charge, tous régimes confondus (c'est-à-dire y compris ceux n'ouvrant pas droit à retraite pour pénibilité). Cette solution est cohérente avec le fait que présumer remplie une condition d'exposition de dix-sept ans suppose que l'assuré a au moins travaillé dix-sept années. S'agissant de la composition de la commission pluridisciplinaire, cette commission comprend, outre le directeur de la caisse de retraite et le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), le médecin-conseil régional, l'ingénieur chef du service de prévention de la caisse de retraite, et le praticien hospitalier-professeur des universités ou le praticien hospitalier membre du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. L'avis du médecin du travail peut être sollicité. La composition de cette commission laisse donc une large place à des personnes particulièrement qualifiées en matière de pathologies professionnelles. L'assuré peut être entendu par la commission et se faire assister par une personne de son choix. Enfin, le rejet de la demande de retraite pour pénibilité, y compris lorsqu'il résulte d'un avis négatif du médecin-conseil ou de la commission pluridisciplinaire, peut faire l'objet d'un recours devant la commission de recours amiable, avant saisine éventuelle du tribunal des affaires de sécurité sociale.

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