Question de M. BOCKEL Jean-Marie (Haut-Rhin - RDSE) publiée le 08/04/2011

Question posée en séance publique le 07/04/2011

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel. (M. Yvon Collin applaudit.)

M. Jean-Marie Bockel. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

La catastrophe nucléaire du Japon nous interpelle tous, et aujourd'hui le temps est venu de tirer les conséquences de cette tragédie pour notre pays.

Cette exigence à la fois de bilan et d'information de nos concitoyens est d'autant plus impérieuse que la France, vous le savez, possède un des parcs nucléaires parmi les plus denses au monde : 58 unités de production d'électricité réparties sur 19 sites permettant de produire près de 80 % de la production totale d'électricité. (M. Jean-Louis Carrère s'exclame.)

Ce retour d'expérience du Japon impose de nouvelles exigences en matière de sûreté de nos infrastructures et d'information de nos concitoyens.

Dans un cadre de dispositifs de sécurité déjà renforcé, les autorités en charge de ce dossier ont-elles travaillé sur des scenarii de cumul de risques, comme un risque terroriste couplé aux risques naturels ?

Certes, les centrales nucléaires françaises sont conçues pour résister à des contraintes sévères. Aujourd'hui, le besoin existe de s'assurer de leur résistance dans des situations encore bien plus dégradées, afin d'y apporter des modifications si nécessaire. C'est d'ailleurs – je le reconnais – ce qu'a fait le Gouvernement au lendemain de la catastrophe japonaise en mettant en place des dispositifs de surveillance renforcée, ainsi que des tests de résistance approfondis sur l'ensemble du territoire.

M. Jean-Louis Carrère. Tout va bien, alors ! Pas de question !

M. Jean-Marie Bockel. C'est aussi un des premiers objectifs du groupe d'étude sur la sécurité nucléaire – auquel plusieurs d'entre nous appartiennent – sous l'autorité de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Le département dont je suis l'élu, le Haut-Rhin, possède une des plus anciennes centrales nucléaires sur le site de Fessenheim. Mise en service dès 1977, celle-ci comporte deux réacteurs installés dans une zone sismique située à proximité d'un important bassin démographique, de surcroît transfrontalier.

Depuis plus de trente ans, elle fait l'objet d'une étroite surveillance et de contrôles réguliers, je peux en témoigner.

M. Jean-Louis Carrère. L'UMP parle à l'UMP !

M. Jean-Marie Bockel. Cependant, la question se pose aujourd'hui de savoir si cela est suffisant.

Par-delà le travail qui est engagé – beaucoup d'entre nous ont assisté à l'audition de M. Lacoste, président de l'Autorité de sûreté nucléaire –, nos concitoyens et nous-mêmes nous posons de vraies questions. D'ailleurs, pour la qualité, la rationalité et la sérénité du débat que nous tiendrons nécessairement sur le devenir du nucléaire en France et sur les enjeux énergétiques à venir, il importe, madame la ministre, que nos concitoyens aient une information afin de mieux comprendre l'action des pouvoirs publics. Comment comptez-vous les éclairer davantage au regard de la tragédie japonaise ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées l'UMP. – M. Joseph Kergueris applaudit également.)

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Réponse du Ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement publiée le 08/04/2011

Réponse apportée en séance publique le 07/04/2011

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur Bockel, le déplacement du Président de la République au Japon la semaine dernière a été le moment d'exprimer un message de compassion, de solidarité, d'admiration aussi pour leur dignité, aux Japonais dans la tragédie qu'ils traversent.

Cette tragédie nous amène aussi, forcément, à nous interroger sur la sûreté de nos centrales nucléaires et à nous demander si ce qui s'est passé au Japon pourrait se produire en France. Je voudrais dire très clairement trois choses à ce propos.

D'abord, nous n'attendons pas la survenue d'accidents pour nous préoccuper de la sûreté de nos centrales nucléaires.

Chaque centrale est dimensionnée et construite pour faire face à divers risques, notamment naturels.

Ainsi, la centrale de Fessenheim, que vous citez, a été conçue pour résister à un séisme de 6,7 sur l'échelle de Richter, soit un séisme de magnitude cinq fois supérieure à celle du plus grand séisme connu dans la région, celui de Bâle en 1356, évalué à 6,2 sur l'échelle de Richter, qui a été pris pour référence.

Ensuite, le niveau de sûreté pris en considération à l'origine pour la conception des réacteurs peut être perpétuellement amélioré. En ce sens, chaque accident est l'occasion d'un retour d'expérience.

C'est pourquoi le Premier ministre a demandé un audit de sûreté, centrale par centrale, de l'ensemble de notre parc nucléaire ; cet audit, dont l'Autorité de sûreté nucléaire prépare actuellement le cadre de référence et qui sera prêt d'ici à une quinzaine de jours, sera le moment de tirer toutes les conclusions, tous les enseignements de la catastrophe de Fukushima, y compris, par exemple, en cas de cumul d'accidents, nouvelle configuration qui aurait pu apparaître.

Enfin, la centrale de Fessenheim, qui est en effet la plus ancienne centrale en service aujourd'hui en France puisqu'elle fonctionne depuis 1977, bénéficie en ce moment d'une visite décennale pour déterminer si sa durée de vie sera prolongée.

La décision devait être rendue en avril, mais il serait paradoxal qu'une telle décision soit arrêtée alors que l'on prépare un audit portant sur l'ensemble des centrales et que Fessenheim, la plus ancienne, doit logiquement prétendre à être la première auditée.

Aussi, je vous le précise sous la responsabilité du Premier ministre, aucune décision de cette nature ne sera prise avant l'audit.

Pour le reste, le Président de la République l'a dit, toute centrale qui ne passerait pas les tests de résistance sera fermée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – MM. Yves Pozzo di Borgo et Joseph Kergueris applaudissent également.)

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