Question de M. BOUTANT Michel (Charente - SOC) publiée le 21/04/2011

M. Michel Boutant attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la situation des médecins étrangers exerçant dans des établissements hospitaliers français.

Beaucoup de postes de médecins hospitaliers sont pourvus par des médecins étrangers, dont un grand nombre sont originaires du bassin méditerranéen. L'exemple de l'hôpital de Saint-Junien, en Haute-Vienne, est significatif. Il accueille beaucoup de patients charentais, l'établissement se trouvant à proximité immédiate de leur département.

Les conditions de résidence sur le territoire français remettent en cause chaque année le maintien de ces médecins à leur poste. Cet obstacle une fois franchi, il reste celui de la reconnaissance du diplôme obtenu la plupart du temps à l'étranger, validé par le concours des épreuves de la procédure d'autorisation d'exercice (PAE), qui leur permettrait d'obtenir un contrat de travail en tant qu'assistant attaché.

Or, si ces médecins ne sont pas originaires de l'Union européenne, s'ils ne relèvent pas des listes B (apatrides et/ou réfugiés politiques) ou C (praticiens ayant exercé une activité rémunérée en France dans un hôpital public avant le 10 juin 2004 et justifiant de fonctions rémunérées pendant une période continue de deux mois entre le 22 décembre 2004 et le 22 décembre 2006), ils ne peuvent pas exercer en tant qu'assistant attaché mais seulement comme faisant fonction d'interne, ce qui altère le fonctionnement d'un service hospitalier. Il serait pertinent, notamment, de remplacer « juin 2004 » par « juin 2007 ». Cela permettrait à des médecins qui exercent depuis au moins quatre ans en France de passer l'examen. Quatre ans, c'est la durée de l'internat pour une spécialité médicale ; en cinq semestres (sur huit), l'interne peut valider sa spécialité.

Les chefs de service, les directeurs d'établissement mais aussi bien sûr les patients s'inquiètent de la précarité de la situation de ces médecins et nous sommes toujours à la lisière de la fermeture d'un service ou au moins de dysfonctionnements graves. Les services qu'ils rendent sont tout à fait remarquables, et il est dramatique de devoir se passer de leurs compétences en raison de l'inadaptation de la loi.

Aussi, il lui saurait gré de lui faire savoir si les conditions liées aux dates et aux durées d'exercice des praticiens relevant de la liste C sont modifiées, si par ailleurs il n'est pas possible de simplifier les procédures pour permettre à ces mêmes praticiens de concourir aux épreuves de la PAE (notamment les critères de durée minimum d'exercice de leur métier) et enfin si l'ancienneté dans l'hôpital où ils exercent, la reconnaissance de leurs compétences par le chef de service ou tout autre hiérarchie professionnelle ne leur permettraient pas d'assurer les fonctions d'assistant attaché, qui leur donneraient accès à un salaire digne du travail qu'ils assurent.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la santé publiée le 22/06/2011

Réponse apportée en séance publique le 21/06/2011

M. Michel Boutant. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la situation des médecins étrangers exerçant dans des établissements hospitaliers français.

Beaucoup de postes de médecin hospitalier sont pourvus par des médecins étrangers, dont un grand nombre sont originaires des pays de la rive sud du bassin méditerranéen.

L'exemple de l'hôpital de Saint-Junien, en Haute-Vienne, qui accueille beaucoup de patients venant de mon département, la Charente, est significatif à cet égard.

Les conditions de résidence sur le territoire français ont pour conséquence de remettre en cause chaque année le maintien à leur poste de ces médecins. Une fois ce premier obstacle franchi, il reste celui de la reconnaissance du diplôme, obtenu la plupart du temps à l'étranger et validé par le concours de la procédure d'autorisation d'exercice, la PAE – il s'agit bien d'un concours, puisqu'il faut être classé parmi les meilleurs, de très bonnes notes ne suffisant pas –, qui permet d'obtenir un contrat de travail en tant qu'assistant attaché.

Or, si ces médecins ne sont pas originaires d'un pays de l'Union européenne et s'ils ne relèvent pas des listes B – celle des apatrides et/ou réfugiés politiques – ou C – regroupant les praticiens ayant exercé une activité rémunérée dans un hôpital public français avant le 10 juin 2004 et justifiant de fonctions rémunérées pendant une période continue de deux mois entre le 22 décembre 2004 et le 22 décembre 2006 –, ils ne peuvent pas exercer en tant qu'assistant attaché, mais seulement comme faisant fonction d'interne, ce qui porte atteinte au fonctionnement des services hospitaliers employeurs.

Il serait pertinent, notamment, de remplacer « juin 2004 » par « juin 2007 » s'agissant de la liste C : cela permettrait à des médecins exerçant en France depuis au moins quatre ans de passer l'examen. Quatre ans, c'est la durée de l'internat pour une spécialité médicale, l'interne pouvant valider sa spécialité en cinq semestres.

Les chefs de service, les directeurs d'établissement ainsi que, bien sûr, les patients s'inquiètent de la précarité de la situation de ces médecins. Alors que l'on est toujours sous la menace de la fermeture d'un service ou, du moins, de dysfonctionnements graves, il est dramatique de devoir se passer, en raison de l'inadaptation de la loi, des compétences de ces médecins étrangers, qui rendent des services tout à fait remarquables.

Aussi vous saurais-je gré de nous préciser si les conditions de dates et de durées d'exercice pour les praticiens relevant de la liste C sont susceptibles ou non d'être modifiées. Par ailleurs, ne serait-il pas possible de simplifier les procédures pour leur permettre de concourir aux épreuves de la PAE, notamment en assouplissant les critères de durée minimale d'exercice du métier ? Enfin, l'ancienneté dans l'hôpital où ils exercent et la reconnaissance de leurs compétences par leur hiérarchie professionnelle ne pourraient-elles pas leur permettre d'assurer les fonctions d'assistant attaché, ce qui leur donnerait accès à un salaire digne du travail qu'ils assurent ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé. Vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, la loi du 27 juillet 1999 a posé le principe d'une interdiction de tout nouveau recrutement par les établissements publics de santé de médecins titulaires de diplômes délivrés par un État extérieur à l'Union européenne. La loi du 21 décembre 2006 prévoit toutefois une exception à ce principe d'interdiction pour les médecins ayant exercé des fonctions rémunérées avant le 10 juin 2004 et justifiant d'une durée minimale continue d'activité de deux mois entre le 22 décembre 2004 et le 22 décembre 2006.

L'objectif de cette dérogation était de permettre aux praticiens recrutés depuis plusieurs années et ayant rendu de nombreux services dans les établissements de santé d'exercer sous un statut ne relevant pas du plein exercice, en attendant qu'ils réussissent les épreuves de vérification des connaissances et qu'ils obtiennent l'autorisation d'exercice en France.

Cette exception mise à part, depuis 1999, seuls les recrutements en qualité de faisant fonction d'interne sont autorisés dans le cadre d'une spécialisation. Le statut de faisant fonction d'interne et celui d'associé ne s'adressent donc pas aux mêmes médecins : les praticiens associés ont vocation à obtenir l'autorisation de plein exercice de la médecine en France, alors que les faisant fonction d'interne sont des étudiants en formation qui effectuent un stage dans le cadre de la préparation d'un diplôme de spécialité.

Vous demandez par ailleurs que l'on facilite l'accès aux épreuves de la PAE pour les praticiens encore en exercice.

Je rappellerai tout d'abord que la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a porté de deux à trois le nombre de possibilités, pour les candidats à l'autorisation d'exercice, de se présenter aux épreuves de vérification des connaissances. Cette évolution constitue donc, pour ces personnes, un premier facteur d'accroissement de leurs chances d'obtenir l'autorisation d'exercice.

Grâce à des procédures transitoires applicables jusqu'au 31 décembre 2011, ces candidats ont la possibilité de présenter un examen au lieu d'un concours, et ainsi d'être reçus s'ils obtiennent une note d'au moins 10 sur 20 pour l'ensemble des épreuves. Cette procédure est donc moins sélective que le concours. La date limite de dépôt des dossiers était fixée au 31 décembre dernier pour les épreuves de 2011.

J'ai tenu à ce que la situation particulière et l'expérience acquise par les praticiens recrutés depuis plusieurs années et ayant rendu de nombreux services dans les établissements de santé soient mieux prises en compte dans les procédures. Il m'a paru ainsi important de revoir le processus d'évaluation afin de privilégier les compétences pratiques acquises par les candidats.

J'ai en outre demandé à mes services de prévoir une augmentation du nombre de postes ouverts au concours de 2012, afin de compenser la fin de la procédure transitoire et de permettre aux médecins concernés de trouver une solution pour la reconnaissance de leur exercice professionnel.

Sachez, monsieur le sénateur, que la question que vous soulevez est à mes yeux essentielle et que j'ai à cœur d'y apporter de nouvelles réponses dans les semaines et mois à venir.

M. le président. La parole est à M. Michel Boutant.

M. Michel Boutant. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, qui me laisse néanmoins un peu sur ma faim.

Vous affirmez que certains de ces médecins peuvent se replier sur le statut de faisant fonction d'interne. Or ce n'est pas une solution tout à fait satisfaisante, notamment parce que les intéressés ne pourront assurer les gardes. Il s'agit, j'y insiste, de médecins dont l'expérience et les qualités professionnelles sont reconnues, qui devraient pouvoir bénéficier d'une validation des acquis de l'expérience, dans la mesure où nul ne remet leur travail en cause.

Le fait que ces praticiens soient moins bien rémunérés que leurs collègues ayant obtenu leur diplôme dans un pays de l'Union européenne constitue une véritable injustice. En outre, si l'on se prive de leurs services, certains hôpitaux vont manquer de médecins, puisque les praticiens à diplôme français ne sont pas intéressés par les postes qu'ils occupent. Le recours à ces médecins d'origine étrangère permet donc de combler un vide, la seule autre solution étant de faire appel à des intérimaires, pour des coûts tout à fait prohibitifs. On marche sur la tête, y compris au regard des comptes de l'assurance maladie, et l'on ne répond pas aux inquiétudes des malades, des familles, des médecins ou des directeurs d'établissement.

M. Daniel Reiner. Très bien !

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