Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC-SPG) publiée le 19/05/2011

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur le risque d'extinction de la gynécologie médicale.

Jusqu'en 1987, 130 gynécologues médicaux étaient formés chaque année. La réforme des études médicales aura pour conséquence la disparition de la filière et il faudra un grand mouvement populaire, mobilisant des millions de personnes, pour qu'en 2003 cette spécialité réapparaisse.

Dans les faits, il y a eu depuis cette date 20 nominations pour chacune des six premières années de la formation, 27 en 2009 et aux alentours de 25 en 2010 et 2011. Ce chiffre est très en dessous des 130 nominations d'avant 1987 qui couvraient peu ou prou les besoins sanitaires. Il est aussi très en dessous de la proposition des pouvoirs publics lors du lancement du diplôme de 2003 de créer 60 postes par an, ce qui était considéré comme nécessaire et raisonnable et le demeure, compte tenu des possibilités immédiates de stages.

Il est dès lors évident que continuer sur la lancée actuelle programmerait l'extinction de la gynécologie médicale.
Cette situation, en plus d'être préjudiciable à la santé des femmes, semble aussi absurde en considérant le fait que de nombreux gynécologues-obstétriciens, formés comme chirurgiens, s'installent en ville en lieu et place des gynécologues médicaux qui partent à la retraite. Ce qui indique que les besoins en la matière, comme en attestent les femmes, existent bel et bien…

Les pouvoirs publics, qui ont été responsables de la disparition en 1987 de la filière d'études de la gynécologie médicale, ne se doivent-ils pas de prendre des mesures urgentes : augmenter de manière significative le nombre de postes de formation dans cette spécialité, en vue d'inverser l'actuelle tendance à l'extinction de la gynécologie médicale, irremplaçable pour les femmes ? Il s'agit d'une question de santé publique.

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Réponse du Ministère chargé de l'apprentissage et de la formation professionnelle publiée le 06/07/2011

Réponse apportée en séance publique le 05/07/2011

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la ministre, je souhaitais interroger M. Bertrand sur le risque de disparition de la gynécologie médicale, contre lequel je me bats depuis longtemps. C'est un combat que j'ai même mené, à une certaine époque, avec le soutien de Mme Bachelot-Narquin.

Comme vous le savez sans doute, jusqu'en 1987, 130 gynécologues médicaux étaient formés chaque année. La réforme des études médicales a eu pour conséquence la disparition de la filière et il a fallu un grand mouvement populaire, mobilisant des millions de personnes, pour que cette spécialité réapparaisse en 2003.

Dans les faits, il y a eu 20 nominations par an de 2003 à 2009, 27 en 2009 et aux alentours de 25 en 2010 et 2011. Le total est à l'évidence très inférieur non seulement au nombre de nominations décidées auparavant, mais aussi à la proposition de créer 60 postes par an formulée par les pouvoirs publics lors du lancement du diplôme en 2003, proposition considérée comme raisonnable dans l'optique de maintenir les capacités d'accueil des femmes en gynécologie médicale.

Une telle situation est regrettable, surtout quand on sait combien la gynécologie médicale a permis à la France d'être en pointe en matière de prévention et de soins apportés aux femmes. Le problème est d'autant plus criant que, aujourd'hui, de nombreux gynécologues obstétriciens, formés comme chirurgiens, plutôt que de venir compenser les sous-effectifs constatés dans les hôpitaux et les cliniques, préfèrent s'installer en ville pour pratiquer la gynécologie médicale : c'est tout de même, vous l'avouerez, pour le moins paradoxal !

Je souhaite donc savoir si le Gouvernement a la volonté d'inverser la tendance à l'extinction de la gynécologie médicale. Bien entendu, il ne suffit pas d'affirmer des principes, il importe de créer suffisamment de postes !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nadine Morano, ministre auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Madame la sénatrice, M. Xavier Bertrand, qui assiste en ce moment à une réunion de la Commission nationale de la négociation collective, m'a priée de l'excuser auprès de vous et de répondre à sa place. Vous avez en effet appelé son attention sur la situation de la gynécologie médicale.

La place qu'occupe cette discipline dans l'offre de soins destinée aux femmes est parfaitement connue du Gouvernement, qui considère cette question comme prioritaire.

Plusieurs réponses concernant ce délicat problème ont été avancées.

Tout d'abord, un diplôme en gynécologie médicale a été créé en 2003 : c'était une première mesure destinée à assurer la pérennité de la spécialité.

Ensuite, la gynécologie médicale a bénéficié, au cours des dix dernières années, du doublement du numerus clausus du concours de médecine. Je rappelle que 7 400 étudiants de première année sont autorisés à poursuivre leurs études de médecine en 2011. Une telle évolution permet d'augmenter le nombre de spécialistes formés dans toutes les disciplines médicales, y compris, donc, en gynécologie médicale.

En application de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST, des prévisions quinquennales permettent de définir le nombre d'internes à former par spécialité et subdivision territoriale. De tels quotas sont actuellement établis en fonction des besoins de soins et à partir des propositions des agences régionales de santé et de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé. Il faut également tenir compte des capacités de formation.

Ainsi, le nombre de postes ouverts chaque année à l'issue des épreuves classantes nationales en gynécologie médicale a été augmenté, passant de 107 entre 2005 et 2009 à 122 entre 2010 et 2014. Les discussions en cours sur la répartition des postes d'interne par spécialité et subdivision territoriale pour la période 2011-2015 devraient permettre de porter au minimum ce nombre à 140.

Par ailleurs, l'article 46 de la loi HPST a instauré un contrat d'engagement de service public. Les étudiants qui en sont bénéficiaires se voient verser une allocation mensuelle de 1 200 euros jusqu'à la fin de leurs études. En contrepartie, ils s'engagent à exercer leurs fonctions, à compter de la fin de leur formation, dans des lieux d'exercice spécifiques. Ceux-ci sont proposés dans des zones où la continuité des soins fait défaut, pour une durée égale à celle qui correspond au versement de l'allocation. Ce dispositif a été conçu dans le but de renforcer l'offre de soins de premier recours sur le territoire. Il ouvre donc la possibilité d'accompagner très tôt les étudiants en médecine qui souhaitent s'orienter vers la gynécologie médicale.

Enfin, une part non négligeable des diplômés ou des praticiens en gynécologie obstétrique font le choix d'une activité en gynécologie médicale. De même, l'évolution du champ de compétences des sages-femmes ou des missions du médecin généraliste de premier recours doivent être prises en compte dans l'évaluation de la réponse aux besoins de soins en gynécologie médicale en France.

L'ensemble de ces mesures, madame Borvo Cohen-Seat, contribueront à assurer les meilleurs soins aux femmes, conformément aux souhaits du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la ministre, je vous remercie de vos propos, même si je considère que ma question appelait une réponse plus précise. Au demeurant, je ne suis pas surprise par ce que vous venez de dire, puisque M. Xavier Bertrand lui-même, voulant sans doute montrer qu'il se préoccupe activement du problème, a déclaré le 17 mai dernier : « La place qu'occupe cette discipline dans l'offre de soins apportée aux femmes est parfaitement reconnue et la diminution prévisible des spécialistes en gynécologie médicale peut effectivement paraître préoccupante. »

Néanmoins, la réalité est là, et je ne suis pas sûre de bien comprendre la logique du Gouvernement. Au fond, un certain nombre d'obstétriciens deviennent gynécologues médicaux et il n'est pas exclu que des sages-femmes suivent la même voie, alors même qu'il s'agit de spécialités différentes, qui correspondent à des exercices différents de la médecine ! Ce que les principaux intéressés réclament, c'est précisément qu'il y ait au moins 60 nouveaux gynécologues médicaux formés chaque année et aptes à exercer.

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