Question de Mme GARRIAUD-MAYLAM Joëlle (Français établis hors de France - UMP) publiée le 25/08/2011

Mme Joëlle Garriaud-Maylam interroge M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur l'opportunité de la visite officielle en France du Président du Rwanda, Paul Kagamé, annoncée pour les 12 et 13 septembre prochains.
Elle rappelle que ce chef d'État accuse les forces françaises envoyées au Rwanda en 1994, sous mandat de l'ONU, d'avoir été complices du génocide perpétré dans cette région. Ces accusations mensongères portent atteinte à l'honneur des militaires français qui, au péril de leur vie, ont tout fait pour rétablir la paix et la sécurité dans un Rwanda en proie au chaos et à la folie sanguinaire. Elles sont d'autant plus inacceptables qu'elles proviennent d'un homme que le rapport Mapping de l'ONU accuse de crimes de guerre.
Dans ce contexte, une visite en France du président Kagamé, si elle n'était pas précédée du retrait de ces accusations et de la présentation d'excuses, constituerait une insulte aux militaires français, à la France et à la communauté internationale qui a demandé l'intervention de 1994 au Rwanda.
Reconnaissant que l'intérêt de la France et du Rwanda passe par un apaisement de leurs relations, elle souligne que celui-ci ne doit pas être réalisé au mépris de la vérité et de l'honneur des soldats français. Elle demande que la venue du président Kagamé en France soit conditionnée à la présentation d'excuses publiques.

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Réponse du Ministère des affaires étrangères et européennes publiée le 27/10/2011

Le rétablissement des relations diplomatiques avec le Rwanda ne doit pas se faire au prix de l'acceptation, même implicite, de certaines accusations particulièrement graves portées contre la France pour son rôle au Rwanda en 1994. L'accueil du Président Kagamé n'est en aucune manière une acceptation de la part des autorités françaises, même implicite, des accusations figurant dans le rapport Mucyo. Ce n'était d'ailleurs pas davantage la signification de la visite que le Président de la République avait effectuée à Kigali en février 2010. Le caractère inacceptable de ces accusations avait été officiellement relevé par le ministère des affaires étrangères et européennes dès la publication de ce rapport, en août 2008. La position du Président de la République et du Gouvernement n'a pas varié. Cette position se fonde, notamment, sur les travaux menés en 1998 par la mission d'information parlementaire de l'Assemblée nationale. Elle ne met nullement en cause l'intégrité et l'honneur des personnalités visées par le rapport Muyco, ni des militaires français qui ont servi au Rwanda. La France a su porter un regard lucide et responsable sur les insuffisances des mécanismes internationaux de sécurité collective et sur sa propre action face à la tragédie du génocide de 1994. Cette démarche a d'ailleurs conduit notre pays à soutenir activement la mise en œuvre, dans le cadre des Nations unies, de la responsabilité de protéger, en Côte d'Ivoire ou encore en Libye. La reprise des relations diplomatiques et de la coopération entre la France et le Rwanda n'implique pas que tous les sujets d'incompréhension ou de désaccord - et certains sont lourds - aient préalablement disparu de nos deux pays. Elle vise au contraire à rétablir progressivement une relation constructive, sans acrimonie ni complaisance. L'absence de relations entre nos deux États était une anomalie en Afrique et un handicap pour l'action de la France, compte tenu de l'intensité de nos liens avec l'ensemble du continent africain. La reprise de ces relations correspondait en outre à une attente profonde des peuples français et rwandais. La visite à Paris du Président du Rwanda marque une nouvelle étape de cette démarche délicate et progressive. La France et le Rwanda, sans oublier le passé, doivent aujourd'hui se tourner vers l'avenir, en relançant leur coopération économique, technique et culturelle et en reprenant progressivement leur dialogue politique. C'est le sens que le Président de la République a voulu donner à la visite du Président Kagamé.

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