Question de M. BOYER Jean (Haute-Loire - UCR) publiée le 06/10/2011

M. Jean Boyer attire l'attention de M. le ministre chargé des collectivités territoriales sur les perspectives de fusion des communautés de communes en zone de montagne.

Élu d'un département qui compte 250 communes sur 260, classées en zone de montagne avec une altitude moyenne d'habitats parmi les plus élevés de France, la question posée porte sur l'article 35, alinéa III, de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. Cet article mérite d'être appliqué, notamment dans les secteurs qui le concernent mais en étant précisé. Il semblerait que sa lecture « dispense » les regroupements des communautés de communes situées en zone de montagne. Cette analyse est somme toute une vision de bon sens tant les contraintes topographiques et climatiques imposent un regard extérieur et objectif spécifique. Ce critère relatif aux établissements publics de coopération intercommunale comportant des zones de montagne est apprécié au regard de la loi montagne n° 85-30 du 9 janvier 1985, et fait l'objet d'un classement ministériel. En l'espèce, cette obligation de fusion n'est pas applicable à ces collectivités. Il souhaiterait connaître concrètement la réalité de l'application de cette mesure dans les territoires ruraux inscrits au cœur des zones de montagne. En effet, il semble bien inutile de générer des perspectives si celles-ci ne sont pas applicables légalement. Il lui demande de bien vouloir lui apporter les précisions nécessaires à ce sujet. En effet, une fusion de communauté ne peut intervenir en zone de montagne que si cette orientation est pertinente au regard de la cohérence spatiale, l'accroissement de la solidarité financière et l'atteinte du seuil de 5 000 habitants.

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Réponse du Ministère chargé de l'outre-mer publiée le 26/10/2011

Réponse apportée en séance publique le 25/10/2011

M. Jean Boyer. Madame la ministre, j'ai souhaité attirer votre attention ce matin sur les perspectives de fusion des communautés de communes, spécialement dans les zones de montagne.

Élu d'un département dont 250 communes - sur un total de 260 - sont classées en zone de montagne, avec une altitude moyenne d'habitat parmi les plus élevées de France, je m'interroge sur l'application du III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, créé par l'article 35 de la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités territoriales. En effet, avec de grands espaces et des responsabilités que je qualifierai de « diluées », ne va-t-on pas aggraver la désertification de ces territoires ? Le III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales ne mérite-t-il pas d'être pris en compte dans les secteurs concernés ? À sa lecture, il semblerait en effet que les communautés de communes de moins de 5 000 habitants situées en zone de montagne soient « dispensées » de regroupement.

Cette analyse relève somme toute d'une vision de bon sens, tant les contraintes topographiques et climatiques imposent un regard extérieur et objectif spécifique. Pour dispenser les établissements publics de coopération intercommunale de l'application du seuil de 5 000 habitants, le critère de « zone de montagne » est apprécié - vous le savez, madame la ministre - au regard de la loi du 9 janvier 1985, dite « loi montagne », qui prévoit que ces zones sont délimitées par arrêté interministériel.

Je souhaiterais connaître concrètement la réalité de l'application de cette mesure dans les territoires ruraux inscrits au cœur des zones de montagne. Est-il utile de susciter des interrogations, si ces critères de regroupement ne sont pas applicables légalement ?

Merci, madame la ministre, de bien vouloir m'indiquer les précisions nécessaires à ce sujet. Je suis également convaincu que, si le message des élus concernés doit-être pris en compte, il ne manquera pas de rencontrer l'écoute objective du préfet.

Puis-je également me permettre, madame la ministre, de vous demander d'élargir votre réponse à l'ensemble des perspectives de décisions relatives aux projets de regroupement d'intercommunalités en cours ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur Jean Boyer, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Philippe Richert.

La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales prescrit l'élaboration, dans chaque département, d'un schéma départemental de coopération intercommunale, ou SDCI, dont l'un des principaux objectifs est d'aboutir à la mise en place d'EPCI à fiscalité propre sur des périmètres pertinents et en capacité d'exercer les missions qui leur sont confiées.

À cet égard, la loi prévoit, au titre des orientations à prendre en compte lors de l'élaboration du SDCI, la constitution d'EPCI à fiscalité propre regroupant au moins 5 000 habitants.

Les débats parlementaires ont mis en évidence le fait que l'observation systématique du seuil démographique de 5 000 habitants, compte tenu de la topographie des zones de montagne, risquerait de conduire à la création d'EPCI sur des territoires trop vastes, comprenant par exemple des vallées ne pouvant pas communiquer entre elles.

Pour ces motifs, le législateur, prenant en compte ces réalités des zones de montagne, a prévu, au III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales créé par l'article 35 de la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités territoriales, que « ce seuil de population n'est pas applicable aux établissements publics dont le territoire comprend des zones de montagne délimitées conformément à l'article 3 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ».

Il convient toutefois de relever que cette dérogation ne concerne que le seuil démographique minimal des EPCI à fiscalité propre. Les communes de montagne qui n'appartiendraient à aucun EPCI à fiscalité propre ou qui seraient en situation d'enclave ou de discontinuité territoriale au sein d'un EPCI existant verront en revanche leur situation modifiée.

Les autres orientations et objectifs fixés par la loi, et notamment la « rationalisation des périmètres », l'« amélioration de la cohérence spatiale » et « l'accroissement de la solidarité financière », sont par ailleurs applicables aux zones de montagne. Le schéma a pour objet de les mettre en œuvre ; à cette fin, il « peut proposer la création, la transformation, la fusion d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, ainsi que la modification de leurs périmètres », que les communes concernées soient situées, ou non, en zone de montagne.

Les regroupements d'EPCI à fiscalité propre situés en zone de montagne sont donc légalement possibles. Comme l'a rappelé récemment le Premier ministre, M. François Fillon, les projets de schéma doivent être élaborés en suivant un processus de « co-construction » entre les préfets et les élus, de façon à leur permettre de recueillir l'accord le plus large possible. Par conséquent, ce n'est que si la concertation entre les préfets et les élus fait apparaître la pertinence de telles fusions que celles-ci pourront être mises en œuvre.

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Monsieur le président, madame la ministre, on peut apprécier l'objectivité du législateur, mais considérer aussi qu'elle n'est pas allée assez loin. En effet, la diminution du nombre d'élus de proximité réduira les initiatives locales.

Or ce constat ne date pas d'aujourd'hui. Depuis des années, on ne prend pas assez en compte l'espace à gérer, en se référant trop exclusivement à des critères démographiques. Les communes rurales qui comptent moins de dix habitants par kilomètre carré doivent gérer un espace où la présence d'élus de proximité est nécessaire !

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