Question de M. BESSON Jean (Drôme - SOC-EELVr) publiée le 20/10/2011

M. Jean Besson attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la situation du Tribunal d'instance de Valence.

A la faveur de la réforme de la carte judiciaire, le ressort territorial de cette juridiction valentinoise s'est en effet étendu aux huit cantons dépendant du tribunal d'instance de Die sans qu'aucune étude d'impact préalable n'ait été réalisée. Ainsi, la population dépendant de cette juridiction, dite de proximité, est passée de 195 000 habitants à 231 000 habitants, ce qui occasionne immanquablement de grandes difficultés pour les justiciables eux-mêmes.

Aucun point d'accès au droit n'ayant été créé dans le Diois, les administrés domiciliés dans ce territoire qui souhaitent par exemple faire enregistrer leur convention de PACS ou souscrire une déclaration acquisitive de nationalité, doivent obligatoirement se présenter au greffe à Valence et parcourir environ 220 km aller-retour, soit 3h30 de trajet. Il en est de même pour les juges des tutelles qui sont obligés de se déplacer afin de procéder aux auditions des personnes à protéger qui ne sont pas en état de pouvoir se rendre dans le chef lieu du département. De surcroît, les conditions de travail au sein du tribunal d'instance de Valence se sont dégradées en raison de la baisse des dotations de fonctionnement et de la réduction des effectifs.

Cette situation alarmante illustre d'une manière symptomatique la paupérisation de notre justice. C'est pourquoi il souhaite connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre pour donner à celle-ci les moyens de fonctionner dans des conditions dignes de ce nom, en particulier à Valence.

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Réponse du Ministère chargé de l'outre-mer publiée le 23/11/2011

Réponse apportée en séance publique le 22/11/2011

M. Jean Besson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette question adressée à M. le garde des sceaux porte sur la réforme de la carte judiciaire dans la Drôme.

L'une des conséquences les plus emblématiques de cette réorganisation, menée sans concertation préalable, concerne le tribunal d'instance de Valence, dont le ressort territorial a été étendu aux huit cantons qui relèvent du tribunal d'instance de Die, moyennant quoi la population dépendant de cette juridiction dite de « proximité » est passée de 195 000 habitants à 231 000 habitants.

De fait, cela occasionne de grandes difficultés pour les justiciables. Aucun point d'accès au droit n'ayant été créé dans le Diois, les administrés domiciliés dans ce territoire sont dans l'obligation, pour se présenter au greffe à Valence, de parcourir environ 220 kilomètres aller-retour, soit trois heures trente de trajet. Il en est de même pour les juges des tutelles, qui sont obligés de se déplacer.

Par ailleurs, j'ai pu constater moi-même, sur place, que les conditions de travail se détériorent en raison de la baisse des dotations de fonctionnement et de la réduction des effectifs.

Ainsi, il n'est pas rare que les magistrats, bien qu'affectés au service du tribunal d'instance, soient sollicités pour participer aux activités du tribunal de grande instance. Il faut savoir aussi que la juridiction à Valence ne bénéficie plus, depuis plusieurs années, des crédits permettant d'assurer un entretien courant des locaux.

Madame la ministre, le malaise ne fait que croître au sein de l'institution judiciaire. Il prend sa source au cœur même des territoires ruraux, là où beaucoup de juridictions de proximité ont été soit sacrifiées, soit précarisées, cela pour des motifs de rentabilité pour le moins contestables. La Drôme, je peux en témoigner, ne fait malheureusement pas exception à cette règle.

C'est pourquoi je souhaite savoir précisément quelles mesures vous comptez prendre afin de donner à la justice les moyens de fonctionner dans des conditions dignes de ce nom, dans la Drôme et à Valence.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser M. le garde des sceaux, qui ne peut être présent au Sénat ce matin.

Vous avez interrogé M. Mercier sur la situation du tribunal d'instance de Valence, à la suite de la réforme de la carte judiciaire.

À l'occasion de cette réforme, la situation de chaque tribunal d'instance a été analysée sur de nombreux critères, y compris le volume d'activité annuel.

Le tribunal d'instance de Die et le greffe détaché de Crest connaissaient une très faible activité : 289 affaires civiles nouvelles par an en moyenne entre 2004 et 2006, pour un niveau moyen d'activité, sur le plan national, de 615 affaires par an et par magistrat. Cela ne permettait donc pas d'affecter dans cette juridiction un magistrat à temps plein.

Les préoccupations d'aménagement du territoire et l'accessibilité pour le justiciable sont également des éléments qui ont été pris en compte - la juridiction de rattachement, Valence, se situe à un peu plus d'une heure de route de la juridiction supprimée de Die -, ainsi que les dispositions de l'article 1235 du code de procédure civile relatives aux déplacements du juge des tutelles.

S'agissant des effectifs de magistrats de la juridiction valentinoise, la localisation des emplois est déterminée chaque année à l'issue des dialogues de gestion qui se déroulent entre les chefs de cours et la direction des services judiciaires.

En 2009, trois postes ont été localisés au tribunal d'instance de Valence après absorption du tribunal d'instance de Die. En 2010, un poste supplémentaire y a été localisé. Enfin, en 2010, un poste supplémentaire de vice-président a été localisé au tribunal de grande instance de Valence.

Cela se justifie, d'abord, par l'évolution de l'activité constatée dans chaque juridiction, ensuite, par le transfert d'activité des tutelles des mineurs et, enfin, par la nécessité d'accroître la participation des magistrats au service correctionnel du tribunal de grande instance.

En ce qui concerne les fonctionnaires, leur nombre au tribunal d'instance est fixé à quatorze. Toutefois, deux adjoints administratifs ont prévu de prendre leur retraite prochainement ; leurs deux postes sont d'ores et déjà publiés pour la prochaine commission administrative paritaire de mobilité, avec une prise de fonctions prévue le 1er mars 2012.

S'agissant, enfin, des conditions matérielles de travail au sein du palais de justice de Valence, je précise que des travaux d'un montant de un million d'euros ont été réalisés au sein du bâtiment pour l'installation de la climatisation, la rénovation complète de la salle des pas perdus et des salles d'audience.

Un projet de 1,5 million d'euros visant à permettre la réfection des façades du bâtiment et la mise en accessibilité du palais de justice va prochainement démarrer. Les études sont programmées pour la fin de cette année et les travaux devraient être entrepris au cours de l'année 2012.

M. le président. La parole est à M. Jean Besson.

M. Jean Besson. Madame la ministre, je vous remercie de ces réponses, dont certaines sont positives ; vous comprendrez néanmoins que, sur l'essentiel et sur le fond, je ne sois pas totalement convaincu.

Selon un classement effectué par la Commission européenne, la France, s'agissant du budget annuel alloué au système judiciaire rapporté au PIB par habitant, ne se situe plus qu'au 37e rang sur 43 pays ! Ce chiffre illustre malheureusement le manque de considération de l'État envers la justice et son personnel.

La situation budgétaire ayant dépassé le seuil critique, je souhaite que la justice se voie octroyer, après les élections de 2012, un budget permettant à la France de se retrouver à nouveau dans les premiers rangs européens qu'elle n'aurait jamais dû quitter.

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