Question de Mme CAMPION Claire-Lise (Essonne - SOC-EELVr) publiée le 25/11/2011

Question posée en séance publique le 24/11/2011

Mme Claire-Lise Campion. Le 25 octobre dernier, les députés européens ont été confrontés à l'opposition du Conseil de l'Union européenne à l'adoption de la directive relative au congé de maternité minimal, lequel passerait de quatorze à vingt semaines, avec la garantie d'une indemnisation à 100 %.

Dans le contexte économique actuel, le Parlement européen est prêt à faire preuve de souplesse. La France, où la durée du congé de maternité minimal est de seize semaines, s'est déclarée ouverte à l'idée de la porter à dix-huit semaines. Cette position a été réaffirmée au Sénat le 1er juin dernier, lors du débat sur la proposition de loi relative à la modernisation du congé de maternité que j'avais déposée.

La première raison motivant le blocage du Conseil de l'Union européenne est le coût de la mesure ; la seconde est le risque d'éloignement de la femme du monde du travail.

Un tel progrès social représente effectivement un effort financier ; encore faut-il l'évaluer finement. Pour la France, un allongement à dix-huit semaines de la durée du congé de maternité avec le niveau d'indemnisation actuel ne coûterait que 250 millions d'euros, ce qui est acceptable. J'entends déjà le Gouvernement rétorquer que la gauche est dépensière et irresponsable (Eh oui ! sur les travées de l'UMP.), quand lui est économe et vertueux. Mais nous n'avons aucune leçon à recevoir. Nous avons démontré, au cours de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances, que l'on peut dépenser moins en étant plus justes et plus solidaires.

Quant au risque d'éloignement des femmes du monde du travail, de nombreuses entreprises, au travers des conventions collectives, offrent à leurs salariées parfois plusieurs semaines de congé de maternité supplémentaires. Croyez-vous vraiment que de telles mesures seraient prises si l'allongement du congé de maternité participait vraiment de l'éloignement des femmes du monde du travail ?

En allongeant le congé de maternité, nous améliorerons la sécurité et la santé des femmes qui travaillent, nous contribuerons à renforcer l'égalité entre les femmes. En France, 70 % d'entre elles prennent un congé pathologique de deux semaines, ce qui permet d'ailleurs au Gouvernement de dire que la durée du congé de maternité est déjà, en pratique, de dix-huit semaines dans notre pays. Mais cela n'est pas vrai pour toutes les femmes. La situation actuelle induit une inégalité de fait entre les femmes, et ce n'est pas acceptable.

Madame la secrétaire d'État, la France entend-elle être moteur dans l'avancement de l'Europe sociale, en levant le blocage du Conseil de l'Union européenne ? Si oui, il est impératif d'agir maintenant ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la famille publiée le 25/11/2011

Réponse apportée en séance publique le 24/11/2011

Mme Claude Greff, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chargée de la famille. Je voudrais tout d'abord saluer le fait que certains membres de cette assemblée arborent aujourd'hui le petit insigne blanc qui témoigne de leur engagement contre les violences faites aux femmes. C'est une cause que vous défendez vous aussi, madame la sénatrice, puisque vous avez été membre de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de la Haute Assemblée.

Je suis particulièrement engagée dans ce combat, aux côtés de Roselyne Bachelot-Narquin. Je souhaite d'ailleurs l'intensifier, s'agissant notamment des incidences des violences conjugales sur les enfants. Il est important de rappeler l'existence d'un numéro d'appel dédié, le 39-19, qui doit devenir aussi connu de tous nos concitoyens que ceux des pompiers ou des urgences médicales.

Madame la sénatrice, le congé de maternité est à l'évidence un temps essentiel pour bien accueillir un enfant. Notre politique familiale le permet et nous devons tous en être fiers. C'est aussi grâce à elle que notre taux de natalité s'élève à deux enfants par femme et que celui de l'activité professionnelle des femmes atteint 85 %.

Dois-je rappeler que, en 2010, plus de 820 000 enfants sont nés dans notre pays ? C'est le résultat d'une politique familiale ambitieuse. Les crédits alloués à celle-ci sont en effet passés de 4,7 % de la richesse nationale en 2006 à 5,1 % en 2010. Malheureusement, la crise économique qui touche notre pays ne nous permet pas de nouvelles dépenses au bénéfice de la branche famille, sauf à les financer à crédit !

Nous avons eu de nombreuses fois l'occasion d'exprimer la position du ministère sur le congé de maternité, plus particulièrement lors de la discussion de la proposition de loi relative à la modernisation du congé de maternité que vous avez déposée, madame la sénatrice. L'allongement de sa durée de seize à dix-huit semaines représenterait, pour la sécurité sociale, une charge supplémentaire de 170 millions d'euros dans le cadre du dispositif actuel. La dépense dépasserait 1,1 milliard d'euros si nous retenions la disposition votée par le Parlement européen.

Mme Gisèle Printz. Ce n'est pas vrai !

Mme Claude Greff, secrétaire d'État. Une telle dépense est évidemment inenvisageable dans l'état actuel de nos finances publiques. L'allongement de la durée du congé de maternité représenterait également une charge supplémentaire pour les employeurs. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)

En outre, un congé de maternité trop long pourrait constituer un frein à l'embauche des femmes, au développement de leur carrière...

Mme Cécile Cukierman. C'est faux !

Mme Claude Greff, secrétaire d'État. ... et à leur progression salariale. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

Mme Cécile Cukierman. Ce n'est pas la faute des femmes !

Mme Claude Greff, secrétaire d'État. En toute hypothèse, nous ne devons pas établir de lien direct entre votre proposition de loi et la négociation communautaire.

Mme Cécile Cukierman. Il faut responsabiliser les entreprises !

Mme Claude Greff, secrétaire d'État. En effet, la directive européenne vise à poser des règles minimales harmonisées pour promouvoir la santé maternelle et infantile. Je rappelle qu'en France le congé de maternité est de seize semaines, quand la directive européenne prévoit de fixer sa durée minimale à quatorze semaines. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UCR.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Très bien !

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