Question de M. LEROY Philippe (Moselle - UMP) publiée le 24/11/2011

M. Philippe Leroy appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la représentation des intérêts économiques des collectivités locales à l'étranger. Selon les territoires, la région, le département ou une grande ville prennent des initiatives en matière économique alors que l'État privilégie ses relations avec les seules régions. Cette situation risque de pénaliser les autres collectivités qui œuvrent et s'investissent dans ce secteur économique. Aussi, il s'interroge sur l'attitude à avoir lorsque la région ainsi considérée ne s'intéresse pas à ce dossier.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce extérieur publiée le 18/01/2012

Réponse apportée en séance publique le 17/01/2012

M. Philippe Leroy. La France s'enorgueillit à juste titre de compter l'un des réseaux de représentation extérieure les plus fournis et de la plus haute qualité, qu'il s'agisse de nos ambassades et des services directement placés sous leur autorité ou des organismes spécialisés comme l'AFII, l'Agence française pour les investissements internationaux, Atout France ou l'Institut français, qui assure la promotion de notre culture, de nos artistes et de notre langue.

Nombreux sont les parlementaires qui, président ou membre d'exécutifs territoriaux, ont pu apprécier ce réseau. Pour leur part, nos représentants, ambassadeurs ou consuls, apprécient de pouvoir enrichir leur action et leur bilan de la contribution et de l'activité des collectivités, dans quelque domaine que ce soit.

Le bilan de cette action commune est sans aucun doute très positif pour l'État, pour les collectivités et leurs territoires et, au final, pour la France.

Un domaine pose néanmoins problème, c'est celui de l'économie, dans lequel j'inclus naturellement le tourisme.

En France, nos services économiques, centraux et décentralisés, ainsi que les organismes tels que l'AFII ou Atout France, font en effet une lecture réductrice et systématiquement orientée de lois pourtant souples, et réservent aux conseils régionaux la légitimité, voire l'exclusivité de la compétence économique extérieure. Naturellement, cela pénalise la capacité d'action des autres collectivités.

Par exemple, l'AFII réserve les informations collectées dans le monde entier au réseau des conseils régionaux, lesquels, pour une grande majorité d'entre eux, ne s'intéressent pas du tout à l'action économique extérieure. A contrario, un certain nombre de collectivités situées sur le territoire de ces régions ne reçoivent aucune information, bien qu'elles soient engagées dans l'action économique extérieure

Monsieur le secrétaire d'État, je ne vous demande pas de corriger un texte réglementaire, puisqu'il n'en existe pas. J'en appelle à vous pour faire prévaloir un principe de réalité sur un principe de spécialité sans fondement à ce jour.

Ainsi, lorsqu'un département, une métropole ou une intercommunalité puissante fait preuve de volonté et dispose des moyens de mener une action économique extérieure, laquelle se manifeste au travers d'une collaboration avec les services de l'État à l'étranger, il faut que cet engagement soit reconnu, d'autant plus s'il y a carence au niveau régional.

Une solution serait que, au niveau central et au niveau décentralisé, les moyens humains et financiers de l'État soient a priori équitablement disponibles, quelle que soit la collectivité qui s'engage. La demande fera la différence.

Monsieur le secrétaire d'État, je vous serais reconnaissant de bien vouloir m'indiquer les suites pratiques et concrètes que vous entendez donner aux propositions qui sont formulées dans cette question.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur. Monsieur le sénateur, votre question fait directement écho au travail que je tente de mener en région dans le but de mettre en place des dispositifs aussi efficaces que possible en complément du travail qui est mené par l'appareil diplomatique et consulaire de l'État.

La charte nationale de l'exportation, que j'ai signée le 12 juillet 2011, vise à construire entre tous les signataires - État, Association des régions de France, Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, Union des chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger, UBIFRANCE, Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France, Coface et OSEO - une chaîne de valeur fondée sur les compétences et le cœur d'activité des différents acteurs, dans le but, précisément, d'organiser la force de vente de la France à l'extérieur.

Nous en avons grand besoin, car le déficit commercial de la France atteint malheureusement des sommets. Les causes sont à rechercher dans nos problèmes de compétitivité, dans la désindustrialisation de notre pays - nous travaillons sur cette question -, mais aussi, pour une large part, dans les compétitions stériles auxquelles se livrent les différents acteurs à l'export.

J'ai donc cherché à rassembler l'ensemble de ces acteurs en favorisant leur complémentarité et en œuvrant en faveur d'une utilisation optimale des ressources de chacun.

La charte nationale de l'exportation vise ainsi à une meilleure articulation des prestations offertes par les différents signataires afin de placer l'entreprise au cœur du dispositif d'appui à l'internationalisation des PME et des entreprises de taille intermédiaire, les ETI. L'objectif est d'identifier celles d'entre elles qui peuvent exporter, de les aider à se développer et de les accompagner à l'export.

L'export, c'est l'emploi et les nouveaux emplois se trouvent dans les nouveaux marchés. Tandis que les grands groupes ont plutôt tendance à délocaliser, l'avenir de l'export en France repose sur le tissu des PME.

En Allemagne, on compte 400 000 PME exportatrices, contre moins de 100 000 en France. Tout le travail que je mène vise à réduire cet écart.

Parmi les signataires de ce texte figure en effet l'ARF, au nom des régions. En effet, la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales dispose que les régions coordonnent, sur leur territoire, les actions de développement économique des collectivités territoriales, notamment la gestion des aides au profit du développement à l'international des PME et des ETI.

Les régions définissent les priorités de la politique régionale en matière de soutien à l'exportation dont elles pilotent la mise en œuvre, en lien avec la politique nationale déterminée par le Gouvernement.

L'international devrait donc compter parmi les priorités des régions, comme en témoignent les schémas régionaux de développement économique, qui prennent de plus en plus en compte cet axe de développement économique.

À partir de là, j'ai essayé, avec l'ensemble des présidents de région, de décliner cette charte au niveau local et d'installer progressivement dans chaque région une véritable maison de l'export, à l'image de celle qui existe à Lille. Cette semaine, d'ailleurs, je me rendrai en Picardie pour en inaugurer une nouvelle.

Notre objectif est de faire en sorte qu'il existe un lieu dans lequel les PME puissent trouver toutes les informations sur l'ensemble des dispositifs mis à leur disposition soit par l'État - UBIFRANCE, OSEO, le fonds stratégique d'investissement -, soit par les collectivités.

Certaines régions mènent elles-mêmes un certain nombre d'actions à l'étranger. C'est pourquoi j'ai invité les présidents de région, afin d'éviter les doublons, à mettre en réseau l'ensemble de ces moyens, car, au bout du compte, c'est toujours le contribuable qui paie.

À ce jour, sept régions ont signé une convention régionale de l'export mettant en place un guichet unique pour nos entreprises : Auvergne, Rhône-Alpes, Lorraine, Alsace, Bourgogne, Aquitaine et Nord-Pas-de-Calais. Les négociations devraient prochainement aboutir dans un certain nombre d'autres régions - Picardie, Champagne-Ardenne, Poitou-Charentes, Guyane, Centre, Réunion, Haute-Normandie.

Dans l'intérêt de nos concitoyens et de l'emploi, je souhaite que cette période de campagne électorale ne fasse pas obstacle à la conclusion de ces accords nécessaires entre les présidents de région et le Gouvernement.

Par ailleurs, j'ai récemment nommé un commissaire général à l'internationalisation des PME et ETI en la personne de Jean-Claude Volot, jusqu'alors médiateur inter-entreprises industrielles et de la sous-traitance, qui s'assurera auprès de moi non seulement de la signature de ces chartes, mais également de leur mise en œuvre effective sur notre territoire.

Monsieur le sénateur, voilà les actions que nous menons au service de notre appareil productif, de notre politique industrielle. Cette chaîne de valeur s'étend de la demande mondiale de produits français jusqu'à l'offre française en régions. Nous voulons offrir à nos PME et à nos ETI les moyens de réussir à l'export.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Leroy.

M. Philippe Leroy. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, qui demeure très partielle. Pourtant, l'action que vous menez à la tête de votre secrétariat d'État pour favoriser nos exportations est celle qui réussit le mieux.

Plus largement, ce que je remets en cause, à partir de l'exemple de l'AFII, c'est notre politique de promotion de notre territoire, des investissements étrangers dans notre pays et de la destination France en tant que grande destination touristique.

Je regrette que l'ensemble de ces actions ne soient pas portées par un secrétariat d'État efficace et dynamique. L'État, à travers différents services, se contente de conduire quelques actions en ordre dispersé, en ne considérant comme partenaires que les régions, bien que celles-ci, en vertu des lois de décentralisation, n'aient aucun monopole en matière d'action économique.

Ainsi, lorsqu'une région ne s'intéresse pas à ces questions des investissements étrangers en France ou lorsqu'elle manifeste une certaine carence dans l'exercice de cette compétence - cela arrive fréquemment -, pour autant, les organismes publics placés sous le contrôle de l'État ignorent les collectivités de rang inférieur qui seraient prêtes à s'investir. Il y a là un vrai dysfonctionnement.

Monsieur le secrétaire d'État, encore une fois, je vous remercie de tout ce que vous faites, mais ma question reste entière. Il me faudra interroger les services sur lesquels vous n'avez pas compétence.

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