Question de Mme ARCHIMBAUD Aline (Seine-Saint-Denis - ECOLO) publiée le 08/03/2012

Mme Aline Archimbaud attire l'attention de M. le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique sur la situation de dénuement dans laquelle se trouvent les municipalités qui souhaitent établir un dialogue constructif avec les opérateurs de téléphonie mobile suite aux décisions du Conseil d'État du 26 octobre 2011.

En effet, les communes ayant rédigé une charte d'implantation des antennes de téléphonie mobile la voient devenir caduque. C'est le cas de très nombreuses villes de France comme Paris, Nantes, Toulouse, Bayonne, Montreuil, etc.

Pourtant le code général des collectivités territoriales dans son article L. 2212-2, définissant le pouvoir de police générale du maire, lui confère le devoir « d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ». Il doit ainsi s'assurer qu'aucune installation sur le territoire de sa commune n'est susceptible de porter atteinte à la santé de sa population. Si une construction suscite un risque non démenti scientifiquement, le maire est légitime à interdire la construction en question, conformément au principe de précaution tel qu'il figure dans l'article 5 de la Charte de l'environnement de 2004 citée dans le préambule de la Constitution depuis le 1er mars 2005.

Le Centre international pour la recherche sur le cancer, relevant de l'Organisation mondiale de la santé, a classifié en mai 2011 les radiofréquences électromagnétiques comme potentiellement cancérigènes pour l'être humain. Associées à l'usage d'un téléphone portable, elles accroîtraient le risque de tumeur gliale 2. La réaffirmation du principe de précaution s'avère donc légitime.

Dans le communiqué de presse n° 238 du 27 octobre 2011, M. le ministre indique que « Cette décision ne réduit en aucun cas le rôle du maire. Le maire reste un acteur incontournable du déploiement des réseaux mobiles, dans le cadre d'un partenariat avec les opérateurs. »

Elle lui demande donc de bien vouloir lui préciser quelles mesures il entend prendre pour que le rôle du maire ne soit en effet pas réduit, le Conseil d'État lui ayant interdit d'assurer la salubrité publique dont il est pourtant le garant, et de lui indiquer comment, « lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement », un maire peut alors veiller « à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. »

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Réponse du Ministère chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique publiée le 17/05/2012

Concernant les pouvoirs de police des maires en matière d'implantation d'antennes relais, le Conseil d'État a, en effet, rappelé dans trois décisions récentes que « le législateur a confié aux seules autorités qu'il a désignées, c'est-à-dire au ministre chargé des communications électroniques, à l'ARCEP et à l'ANFR, le soin de déterminer, de manière complète, les modalités d'implantation des stations radioélectriques sur l'ensemble du territoire ainsi que les mesures de protection du public contre les effets des ondes qu'elles émettent ». Le respect de ces règles de compétence ne s'oppose toutefois pas à ce que les communes et les opérateurs concluent des chartes pour l'implantation des antennes relais. De telles chartes sont mises en œuvre à l'heure actuelle. La loi de programmation du 3 août 2009 relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement prévoit d'ailleurs, à son article 42, « la mise en place de chartes locales ou de nouvelles procédures de concertation communales ou intercommunales ». Il convient de rappeler que la réglementation française fixe des valeurs limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques, qui sont conformes à celles préconisées par la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants et reprises dans la recommandation 1999/519/CE du Conseil du 12 juillet 1999, relative à la limitation de l'exposition du public aux champs électromagnétiques (de 0 Hz à 300 GHz). Au vu des travaux scientifiques intervenus depuis l'édiction de la réglementation, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a conclu, dans son avis du 14 octobre 2009, qu' « aucun effet non thermique ne permet de fonder de nouvelles valeurs limites réglementaires ». La récente classification des champs électromagnétiques de radiofréquences comme « peut-être cancérogènes pour l'homme » par le Centre international de recherche sur le cancer, qui pose l'hypothèse d'un risque lié à l'utilisation intensive à long terme des téléphones portables, ne remet pas en cause les conclusions de l'ANSES, qui appelait déjà à la vigilance concernant une utilisation soutenue des téléphones mobiles, en particulier pour les jeunes enfants, et préconisait un certain nombre de comportements de nature à réduire le risque (dispositifs mains libres.... ). L'ANSES a également souligné que dès lors « qu'une exposition environnementale peut être réduite, cette réduction doit être envisagée, en particulier par la mise en œuvre des meilleures technologies disponibles à des coûts économiquement acceptables ». Ce souci est pris en compte dans la réglementation, qui prévoit la fourniture par les personnes qui exploitent un réseau de télécommunications, à la demande des autorités, d'un dossier qui précise « les actions engagées pour assurer qu'au sein des établissements scolaires, crèches ou établissements de soins qui sont situés dans un rayon de cent mètres de l'équipement ou de l'installation, l'exposition du public au champ électromagnétique émis par l'équipement ou l'installation est aussi faible que possible tout en préservant la qualité du service rendu ». Cependant, le Gouvernement, conscient de l'inquiétude que peuvent susciter les champs électromagnétiques, en raison de l'important développement des technologies qui en génèrent, ainsi que des interrogations de la communauté scientifique, a organisé en 2009 une table ronde « Radiofréquences, santé, environnement » qui a débouché sur plusieurs groupes de travail et un Comité opérationnel (COMOP). À la suite des conclusions du rapport d'étape du COMOP, les travaux initiés dans le cadre de la table ronde se poursuivent dans le cadre d'un comité technique. Ces travaux, qui associent l'ensemble des parties prenantes, visent à réduire l'exposition de la population aux ondes électromagnétiques émises par les antennes-relais, dès lors que cette réduction peut être effectuée sans dégradation préjudiciable à la couverture ou à la qualité de service et à des coûts économiquement acceptables. Ces travaux, qui ont d'ores et déjà ouvert des pistes pour améliorer la situation lorsque des niveaux d'émission atypiques sont observés, reposent sur des modélisations et des expérimentations en cours et dont il convient d'attendre l'achèvement pour tirer des conclusions.

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