Question de Mme GILLOT Dominique (Val-d'Oise - SOC) publiée le 14/06/2012

Mme Dominique Gillot attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la situation de l'enseignement supérieur et de la recherche en architecture. Définie d'intérêt public par la loi, l'architecture, par son approche interdisciplinaire, apporte des réponses à de nombreux enjeux de société : organisation spatiale du territoire, qualité des espaces de vie et des constructions. Elle est partie prenante du secteur des bâtiments et travaux publics, essentiel à l'économie du pays ; à l'intersection des sciences, des techniques et des arts, l'architecture est facteur d'innovation.

Malgré un rôle économique, social, environnemental et culturel majeur, et des résultats remarquables (85 % des jeunes architectes sont insérés dans la vie active, un an après leur diplôme), les écoles nationales supérieures d'architecture (ENSA) sont dans une situation difficile.

Leurs moyens financiers sont insuffisants : l'État n'y consacre que 7 000 euros par étudiant, soit deux fois moins que pour les écoles comparables dans les domaines techniques et culturels. Les dirigeants des ENSA jugent le statut de leurs établissements peu adapté à leurs missions et estiment que l'encadrement pédagogique, administratif, scientifique et technique souffre de graves lacunes. Ces écoles bénéficiaient en moyenne, en 2007, d'un ATOS (personnels administratifs, techniques, ouvriers et de service) pour 25 étudiants.

Ce sous-financement est un frein puissant à la mise en œuvre du système LMD (licence-master-doctorat), qui implique des charges supplémentaires, non compensées.

De cette situation découle un trop faible nombre de diplômés par rapport à nos voisins européens (45 architectes pour 100 000 habitants contre 87 en moyenne en Europe) et une incapacité à renouveler la profession, sachant que 40 % des architectes vont partir à la retraite dans les dix prochaines années, alors que les nouveaux enjeux de construction de la ville justifient un apport de compétences.

Les directeurs des ENSA réclament, notamment, la mise à niveau des moyens de fonctionnement des écoles, la mise en place d'outils permettant de favoriser l'innovation. Ils souhaitent un soutien appuyé à la recherche en architecture et urbanisme, qui suppose des évolutions structurelles majeures : création d'un statut d'enseignant-chercheur, allocation de contrats doctoraux…

Au regard de ce constat et des messages d'alerte lancés par le collège des directeurs des ENSA, elle lui demande ce qu'elle compte faire pour conforter les écoles nationales supérieures d'architecture dans leurs missions et ainsi construire une politique publique forte en matière d'architecture.

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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 04/10/2012

Les 20 Écoles nationales supérieures d'architecture (ENSA) placées sous la tutelle du ministère de la culture et de la communication ont été gratifiées d'excellentes évaluations par l'Agence d'évaluation pour la recherche et l'enseignement supérieur (AERES). Cette campagne a concerné 22 établissements (20 ENSA, l'École spéciale d'architecture de Paris et l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Strasbourg). Entrées dans le schéma global du LMD (licence, master, doctorat) peu de temps après les universités, en 2005, les écoles d'architecture ont montré une très grande capacité à mener une réforme en profondeur, qui se traduit aujourd'hui dans les évaluations très positives de leurs deux cursus principaux : le DEEA (diplôme d'études en architecture) et le DEA (diplôme d'État d'architecte). En ce qui concerne le doctorat et l'adossement du master à la recherche, les écoles renforcent actuellement, au sein des personnels permanents, la présence d'enseignants-chercheurs titulaires d'une habilitation à diriger les recherches. Les notes finales retenues pour ces deux cursus par l'AERES (4A+ soit 9 %, 36 A soit 84 % et 3B soit 7 %) traduisent l'excellence et la grande homogénéité des cursus. Les 22 écoles d'architectures comptent environ 20 000 étudiants, dont 18 792 dans les ENSA. Le budget alloué par l'État aux ENSA est de 41,5 M€ en fonctionnement et de 2,5 M€ en investissement courant. L'investissement lourd dédié aux grands projets immobiliers se situe annuellement entre 8 et 10 M€, auquel il faut rajouter 1,3 M€ pour les aides à la mobilité des étudiants. L'encadrement des étudiants est assuré par 1 600 emplois en équivalents temps plein (ETP) rémunérés sur le budget de l'État (dont 990 enseignants) et 992 ETP rémunérés par les écoles (dont 668 enseignants). Le passage au LMD en 2005 a cependant généré des besoins nouveaux d'organisation et de soutien. Les écoles doivent en effet répondre, tout en conservant des exigences d'excellence académique, à la semestrialisation, au développement de leurs laboratoires de recherche, à la mise en place de formations HMONP (habilitation à la maîtrise d'œuvre en nom propre) ou encore à l'adhésion à des PRES (pôles de recherche et d'enseignement supérieur). La mise en application de la loi du 12 mars 2012 sur le statut des agents non-titulaires pourrait aussi alourdir sensiblement la masse salariale des écoles. Consciente à la fois des réussites de ces écoles, dont les diplômés s'insèrent rapidement dans leur domaine de formation, mais aussi des tensions sur le budget comme sur le personnel qu'elles connaissent, la ministre de la culture et de la communication porte de fortes demandes pour ce réseau dans le cadre des négociations budgétaires. Elle a annoncé, lors de la biennale de l'architecture à Venise le 28 août 2012, que les moyens réservés aux écoles étaient préservés dans un contexte budgétaire complexe où les autres établissements publics ont vu leurs dotations baisser. La ministre a également indiqué que des postes seraient créés dans le cadre du projet de loi de finances 2013, afin d'engager un processus de renforcement du réseau des Écoles nationales supérieures d'architecture. Enfin la ministre a annoncé le lancement d'une vaste concertation associant l'ensemble des secteurs des écoles - enseignants, personnels administratifs, étudiants-, les représentants de la profession d'architectes, les maîtres d'ouvrage publics et privés, des collectivités territoriales, la société civile.

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