Question de M. DALLIER Philippe (Seine-Saint-Denis - UMP) publiée le 13/07/2012

Question posée en séance publique le 12/07/2012

M. Philippe Dallier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.

Monsieur le ministre, les Français ont vécu dix longs mois de campagne électorale qui auraient dû les éclairer, si ce n'est que le candidat Hollande s'est comporté comme un impressionniste, dont la toile se serait intitulée Les riches paieront. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Louis Carrère. Moi, je n'ai rien contre les impressionnistes !

M. Didier Guillaume. C'est mieux que les illusionnistes !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Occupez-vous de l'UMP !

M. Christian Bourquin. Acceptez le verdict des urnes !

M. Philippe Dallier. Touche après touche, depuis la fameuse tranche à 75 %, tout fut dit pour laisser croire qu'il serait possible de sortir de la crise sans efforts, si ce n'est pour les plus fortunés.

Diminuer le nombre de fonctionnaires ? Pas nécessaire !

Faire des économies ? C'est de la rigueur !

Améliorer la compétitivité de nos entreprises ? Que nenni !

Même le Front de gauche applaudissait : c'est tout dire ! Depuis, il s'est calmé !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Occupez-vous de vos affaires !

M. Philippe Dallier. Ainsi fut la campagne présidentielle : un véritable trompe-l'œil !

Et pour durer jusqu'aux législatives, notre nouveau Premier ministre demanda à la Cour des comptes un audit, osant affirmer : « Je ne connais pas la situation réelle du pays. »

La Cour, je le rappelle, certifie les comptes de la nation depuis 2006. Elle vient de rendre son verdict. Que dit-elle ? Eh bien, ce que tout le monde savait, reconnaissant de facto les efforts et le courage du gouvernement précédent, qui a dû affronter une crise mondiale sans équivalent.

La Cour affirme, pour 2012, qu'il n'y a pas plus qu'à l'ordinaire de dérapage des dépenses, mais qu'il faut compenser des recettes plus faibles que prévu, d'environ 7 milliards d'euros.

La Cour trace des pistes : augmenter les recettes et diminuer nos dépenses, à parts égales, tout en renforçant la compétitivité de nos entreprises.

Voilà, chers collègues de la majorité : maintenant, vous savez ! Vous pouvez donc, comme Mme Lienemann, considérer que « le Gouvernement n'est pas à la botte de la Cour des comptes » – chacun appréciera ! – ou bien vous rendre à l'évidence.

Qu'allez-vous faire ? L'examen du prochain collectif budgétaire nous éclaire : 90 % de ces 7 milliards d'euros viendront d'impôts supplémentaires, 10 % seulement d'économies. Et vous supprimez la TVA sociale, qui permettait de taxer les importations…

M. Didier Guillaume. De taxer les Français !

M. Philippe Dallier. … tout en abaissant le coût du travail en France. C'est une erreur dramatique !

Qui paiera la note ? Les riches ?

Alors, sont riches les 9 millions de salariés ou fonctionnaires qui perçoivent des heures supplémentaires et auxquels vous allez retirer, en moyenne, 500 euros par an.

Alors, sont riches les 5 à 6 millions de salariés qui bénéficient de la participation ou de l'intéressement, que vous allez surtaxer de 12 % !

M. Christian Bourquin. Les riches, ce sont les bénéficiaires du bouclier fiscal !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La question !

M. Philippe Dallier. En 2013, il vous faudra trouver environ 25 milliards d'euros pour tenir les engagements de la France et vous préparez les esprits, sous couvert de dialogue social, à une augmentation de la CSG de 2 % à 4 %.

Monsieur le ministre, ma question est simple. (Ah ! sur les travées du groupe CRC.) Quand direz-vous aux Français ce que vous entendez faire…

M. Didier Guillaume. L'inverse de vous !

M. Philippe Dallier. … pour améliorer la compétitivité de nos entreprises et assurer le financement de notre protection sociale ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UCR.)

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 13/07/2012

Réponse apportée en séance publique le 12/07/2012

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le sénateur, je me demandais où vous alliez atterrir...

M. Ronan Kerdraon. Nous aussi !

M. Pierre Moscovici, ministre. ... après ce réquisitoire, que j'ai trouvé, en vérité, assez surréaliste.

Nous arrivons aux responsabilités après une campagne qui, contrairement à ce que vous avez dit, a été marquée par la lucidité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. - Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Mme Natacha Bouchart et M. Joël Guerriau. C'est faux !

M. Pierre Moscovici, ministre. Nous n'avons jamais sous-estimé la situation du pays et nous avons bâti le projet présidentiel sur des hypothèses prudentes, réalistes, crédibles, sérieuses.

M. Christian Cointat. C'est vous qui le dites, pas la Cour des comptes !

M. Pierre Moscovici, ministre. C'est cela que nous défendons, et c'est ce qu'a défendu le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale.

La Cour des comptes, que vous appelez à la rescousse, est allée très exactement dans ce sens. Je ne veux pas trop insister sur les responsabilités qui sont les vôtres : elles sont écrasantes. Mais je veux tout de même dire ce qu'est la situation du pays aujourd'hui, attestée par les chiffres européens et nationaux.

C'est à un triple déficit que nous sommes confrontés.

Il y a, d'abord, un déficit de croissance, d'emploi et, oui, de compétitivité. Vous avez le culot d'en parler (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE), alors que vous laissez un déficit du commerce extérieur de 70 milliards d'euros et que l'emploi industriel a reculé au cours du dernier quinquennat, avec 450 000 postes supprimés.

M. Jean-Louis Carrère. C'est l'histoire du pompier pyromane !

Mme Natacha Bouchart. Quelles sont vos actions, monsieur le ministre ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Il y a, ensuite, un déficit de crédibilité budgétaire. Car nous trouvons 600 milliards d'euros de dette publique supplémentaire et des déficits encore supérieurs à 5,2 % du PIB en 2011.

Il y a, enfin, un déficit de confiance. À force de zigzaguer, d'être dans la confusion des objectifs, de revenir sur les politiques, d'aller dans un sens, puis dans l'autre, votre politique a été illisible et tous les acteurs, y compris en Europe, ont perdu confiance dans la France. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

La politique que conduisent le Premier ministre et le Gouvernement est une politique de redressement dans la justice.

M. Jean-Claude Gaudin. Ah !

M. Pierre Moscovici, ministre. Nous irons vers le redressement des comptes publics, tout d'abord.

Mme Natacha Bouchart. Comment ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Nous aurons, ici comme à l'Assemblée nationale, un débat sur les orientations budgétaires, sur un projet de loi de finances rectificative, pour corriger vos erreurs, puis sur un projet de loi de finances, pour aller vers les 3 % de déficit. Voilà ce que nous ferons !

Vous m'interrogez, enfin, sur la compétitivité. Croyez que nous aurons, nous, une politique globale, ambitieuse,...

M. Philippe Dallier. Mais on ne sait toujours pas laquelle !

M. Joël Guerriau. Oui, laquelle ?

M. Pierre Moscovici, ministre. ... qui mettra l'accent sur tout ce qui renforce l'innovation, la recherche, l'industrie. Voilà notre politique : c'est le contraire de la vôtre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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