Question de M. CARVOUNAS Luc (Val-de-Marne - SOC) publiée le 02/08/2012

M. Luc Carvounas attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la prolifération des armes de guerre sur le territoire français.

Sur une année, le nombre de Kalachnikov saisies lors d'opérations de police a augmenté de 113 %. Les collectionneurs d'armes et les criminels du grand banditisme ne sont désormais plus les seuls à utiliser ce type d'armes. En effet, de plus en plus de délinquants de moindre ampleur ont accès à ces armes de guerre venues des Balkans ou d'Afrique du Nord.

D'ailleurs, de récents drames ont été commis à l'aide de ces armes, comme lors d'une fusillade devant un établissement de nuit à Lille ou encore lors de règlements de comptes à Marseille.

Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer quelle action compte mener le Gouvernement afin de stopper le phénomène préoccupant de la prolifération des armes de guerre dans les quartiers dits sensibles.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 30/08/2012

L'usage d'armes à feu lors de vols à main armée ou de règlements de comptes met en danger l'ensemble de la population et plus encore les forces de l'ordre, régulièrement visées par des tirs. Cette situation affecte particulièrement des territoires urbains déjà fragilisés sur le plan économique et social. La lutte contre le trafic d'armes et contre l'usage illicite d'armes légales constitue une des priorités de la politique de sécurité qu'entend mener le ministre de l'intérieur. En présentant récemment aux préfets ses principales orientations, le ministre leur a ainsi demandé de faire de la lutte contre le trafic d'armes un axe majeur de leur travail. Cette situation exige la mobilisation et la coordination de l'ensemble des forces de police et de gendarmerie, pour appréhender dans leur globalité les flux de circulation des armes, identifier les réseaux organisés d'importation et de diffusion. Cette action est coordonnée au plan national par l'office central de lutte contre le crime organisé, rattaché à la direction centrale de la police judiciaire et doté d'un groupe d'enquête spécialisé dans la lutte contre les trafics d'armes. La section centrale « armes, explosifs et matières sensibles » de la direction centrale de la police judiciaire centralise quant à elle les informations et assure des missions de conseil aux enquêteurs et d'expertise juridique. Elle anime également un bureau de liaison sur les trafics d'armes, regroupant les services concernés (police, gendarmerie, services de renseignements, contrôle général des armées, etc.) pour améliorer le recueil du renseignement et l'échange d'informations. Les stratégies sont également adaptées aux réalités locales. C'est ainsi par exemple qu'au sein de la direction interrégionale de la police judiciaire de Marseille, la brigade de répression du banditisme est dotée d'un « groupe armes ». En 2011, le recensement national des armes saisies par les services de police et de gendarmerie s'élève à 3 910 armes, soit une hausse de 44 % par rapport à 2010. Cette augmentation, qui ne représente pas une hausse proportionnelle de la délinquance par armes à feu, tient à un suivi plus efficace du phénomène, grâce à une systématisation des échanges et à une meilleure centralisation des données depuis la réorganisation de l'office central de police judiciaire compétent. Le nombre de saisies est d'ailleurs d'un niveau comparable à celui constaté en 2004. Si le nombre de saisies d'armes automatiques, dites « de guerre », augmente (164 saisies effectuées en 2011, contre 90 en 2010), ces armes représentent seulement 4 % du total des saisies, soit un pourcentage relativement stable d'une année sur l'autre. Malgré la forte médiatisation de certaines affaires, notamment autour de l'usage de l'AK 47, cet armement reste difficile à acquérir et peu répandu. La prolifération des armes dites « de guerre » sur le territoire national reste donc contenue. Pour autant cette situation, et au-delà l'usage d'armes par de très jeunes gens, est préoccupante et inacceptable. Sur le plan juridique, la loi du 6 mars 2012 relative à l'établissement d'un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif, permet des avancées pour aggraver les sanctions contre les trafiquants et renforcer le régime des saisies administratives. Les travaux réglementaires de mise en application de la loi font l'objet de la plus grande attention. Le ministre de l'intérieur a également demandé aux préfets de veiller particulièrement à la mise en œuvre des mesures d'inscription au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes. La lutte contre ce phénomène exige aussi la coordination des forces de police à l'échelle européenne, notamment dans le cadre d'Europol et d'Interpol. En effet, les flux d'armes, notamment d'armes automatiques, proviennent largement de la contrebande internationale, notamment des Balkans. Par ailleurs, les disparités juridiques entre les États membres de l'UE facilitent la circulation des armes. Le ministère de l'intérieur participera activement aux travaux menés dans les enceintes européennes et internationales et notamment aux travaux d'Europol prévus cet automne. D'autres initiatives prises par le ministre de l'intérieur vont permettre d'amplifier la lutte contre ce phénomène. Il en est ainsi, en particulier, de la mise en œuvre, dès septembre, des zones de sécurité prioritaires (ZSP). Ce nouveau mode d'action va permettre, dans des territoires précisément ciblés, frappés par des phénomène de délinquance structurellement enracinés, un engagement renforcé et concret des forces de l'ordre pour lutter en profondeur contre les formes les plus ancrées de délinquance. Dans ce cadre, un certain nombre d'objectifs, extrêmement précis, seront fixés. Le trafic d'armes pourra, bien entendu, en fonction des problématiques locales, être l'un de ces objectifs.

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