Question de Mme ARCHIMBAUD Aline (Seine-Saint-Denis - ECOLO) publiée le 19/10/2012

Question posée en séance publique le 18/10/2012

Concerne le thème : L'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes

Mme Aline Archimbaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous le savons, l'écart moyen de salaires entre les femmes et les hommes stagne depuis le milieu des années 1990. À niveau égal de compétence, de diplôme et de responsabilité, il se maintient au pourcentage très élevé, et inadmissible, de 27 %, en moyenne. On sait également que les femmes représentent 83 % des emplois à temps partiel et occupent 60 % des postes en contrat à durée déterminée.

Dans la lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes, la question du traitement de la parentalité dans le contexte professionnel est centrale. En effet, si seulement 6 % des hommes vivent un changement dans leur situation professionnelle lors de l'arrivée d'un enfant, c'est le cas pour près de 40 % des femmes ! Par conséquent, il faudrait inciter les hommes à investir la sphère privée, afin que les femmes puissent davantage s'impliquer dans la sphère publique et professionnelle.

Les ajustements entre travail et vie familiale incombent majoritairement aux femmes et cela influe sur leur parcours professionnel. Ainsi, la discontinuité des carrières des femmes s'explique notamment par le fait qu'elles assument 80 % des tâches domestiques, ce qui représente, sur une année, dix-neuf semaines de travail en plus !

Pour aider leurs salariés à mieux articuler vie professionnelle et vie familiale, plusieurs types de mesures sont essentiellement mis en œuvre par les entreprises : prestations en nature, avantages financiers, parfois, et quelques mesures d'assouplissement des horaires.

Madame la ministre, comment comptez-vous encourager les entreprises à mieux prendre en charge la parentalité ? Que pensez-vous, en particulier, de la proposition contenue dans un rapport de l'inspection générale des affaires sociales et consistant à réformer le congé de maternité, actuellement de seize semaines, pour le découper en un congé de maternité de douze semaines pour la mère, suivi, pour l'accueil de l'enfant, d'un congé de quatre semaines à la fois pour le père et pour la mère, non fractionnable et non transférable entre les deux parents ?

Cela permettrait au père de s'impliquer davantage dans la vie domestique et familiale, et cela instaurerait un véritable partage de la responsabilité parentale.

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Réponse du Ministère des droits des femmes publiée le 19/10/2012

Réponse apportée en séance publique le 18/10/2012

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame Archimbaud, je vous remercie de cette question, qui me permet de compléter mon propos de tout à l'heure puisque j'ai précédemment souligné cette spécificité française qui est liée à l'inégale répartition des tâches à la maison.

Depuis que je suis en charge du ministère des droits des femmes, je parle souvent, notamment avec les plus jeunes générations, de ces inégalités persistantes entre les hommes et les femmes, et j'entends souvent cette réponse qui m'amuse beaucoup : « Tu sais, dans mon couple, nous qui sommes trentenaires, nous avons des habitudes très différentes de celles de nos aînés, et il y a une forme d'égalité dans la répartition des tâches. »

Eh bien, j'invite toutes celles et tous ceux qui croient encore à cela à prendre connaissance des études réalisées sur le sujet. Elles démontrent que, comme vous l'avez vous-même souligné, madame Archimbaud, s'il existe une certaine égalité dans la répartition des tâches au début de la formation du couple, la situation change à l'arrivée des enfants, notamment du troisième, et l'on retrouve alors les 80 % des tâches effectuées par les femmes !

Un autre chiffre est intéressant pour illustrer mon propos, c'est celui du taux d'activité des femmes qui ont deux enfants en bas âge, dont un de moins de trois ans : il est de 67 % contre 97 % pour les hommes. C'est tout de même très révélateur !

Au moment de la Conférence sociale, nous avons essayé, avec les partenaires sociaux, de nous mettre d'accord sur ces questions de congés familiaux. Nous sommes parvenus à nous accorder sur trois principes que je vais vous exposer en réponse à vos questions.

Premièrement, il est absolument essentiel de maintenir et de sanctuariser le congé maternité, congé spécifique pour la mère de seize semaines, dont huit obligatoires, comme cela est prévu dans le droit actuel. (Mme Brigitte Gonthier-Maurin et Mme Laurence Cohen applaudissent.)

J'en profite pour dire que nous prenons un certain nombre d'initiatives pour relancer la négociation sur la directive européenne relative au congé de maternité qui, vous le savez, est bloquée au niveau communautaire.

À leur retour de congé de maternité, les femmes pourraient aussi être davantage protégées. Dans le droit actuel, elles ne peuvent pas se faire licencier durant les quatre semaines qui suivent leur retour. Sans doute pourrions-nous étendre un peu ce délai, qui me semble trop court.

Deuxième principe important : il faut inciter les hommes à prendre leur congé de paternité plus qu'ils ne le font aujourd'hui. Tous les moyens seront bons. Faut-il aller jusqu'à l'obligation ? C'est une question que nous nous posons sérieusement. En tout cas, il faut les inciter.

Le troisième principe sur lequel nous nous sommes arrêtés concerne le congé parental de longue durée, qui peut aller jusqu'à trois ans. Il soulève des difficultés parce qu'il constitue à certains égards une trappe à inactivité pour les femmes, qui se retrouvent éloignées trop durablement du marché du travail et ont, de ce fait, du mal à y revenir.

Alors, comment faire pour mieux accompagner ces femmes pendant leur congé parental ? Par le biais de formations, notamment ; c'est ce que nous expérimentons dans certaines régions. Comment faire, surtout, pour que les hommes prennent une partie de ce congé parental ? Nous avons demandé aux partenaires d'y réfléchir.

M. le président. Je vous prie de conclure, madame la ministre.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je terminerai donc ma réponse à l'occasion d'une prochaine question ! (Sourires.)

Tous ces sujets sont évidemment en discussion. Ils sont aussi étroitement liés au nombre de places que nous pourrons créer pour l'accueil collectif des jeunes enfants. Cela passe par les crèches,...

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Très bien !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. ... les crèches d'entreprise ou interentreprises et les assistantes maternelles. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. Alain Richard. Cela passe aussi par la stabilité du financement !

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour la réplique.

Mme Aline Archimbaud. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Compte tenu de la situation que nous connaissons et que vous avez à nouveau décrite, ainsi que des importantes inégalités qui persistent, il faut, selon moi, encourager les dispositifs donnant la même chance aux femmes et aux hommes, car c'est bien une chance de progresser dans sa vie professionnelle tout en ayant une vie familiale équilibrée et la possibilité d'élever ses enfants de manière partagée.

Tel est le sens des propositions qui sont faites, sans toucher aux seize semaines de congé maternité. Il est simplement proposé d'ajouter quinze jours aux onze jours de congé pour les pères, afin que les deux parents aient un mois. Cela permettrait à la fois de faire évoluer les mentalités et d'améliorer la qualité de vie dans les entreprises. Nous aurions toutes et tous à y gagner, tant sur le plan culturel que sur un plan que je qualifierai de structurel.

M. le président. Je me permets d'inviter tout le monde à respecter son temps de parole aussi scrupuleusement que possible, faute de quoi nos collègues qui doivent intervenir en dernier ne pourront pas bénéficier du temps de retransmission par la télévision.

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