Question de Mme GÉNISSON Catherine (Pas-de-Calais - SOC) publiée le 19/10/2012

Question posée en séance publique le 18/10/2012

Concerne le thème : L'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes

Mme Catherine Génisson. Vous ne serez pas étonnée, madame la ministre, que je vous interroge à mon tour sur l'égalité professionnelle, tant il s'agit à mes yeux d'un sujet prioritaire, prégnant et grave.

Aujourd'hui encore, l'inégalité salariale est une réalité : l'écart de rémunération entre les hommes et les femmes est de 27 %, dont 9 % relèvent de la pure discrimination. Chacun sait à quel point l'embauche, la mobilité, la promotion, les conditions de travail et la formation sont des questions mal résolues, concernant notamment les femmes, dans le monde de l'entreprise. D'où la persistance du « plafond de verre », ou « plancher collant », comme le désignent nos amis canadiens.

Ce phénomène existe malheureusement aussi dans les trois fonctions publiques, où sévissent des inégalités non pas salariales, mais de revenus, dans la mesure où les femmes tendent à occuper des fonctions moins bien rémunérées. Et le constat est dramatiquement le même après plusieurs années : j'avais commis un rapport sur le sujet en 2000 et, depuis, les chiffres semblent n'avoir quasiment pas changé.

Plusieurs collègues l'ont dit avant moi, le sujet doit être traité non seulement dans le monde du travail, mais aussi en amont. J'adhère totalement aux propos tenus par Mme Laborde pour ce qui est de l'éducation nationale. Dans la mesure où les enseignants sont majoritairement des femmes, la question doit être traitée à tous les niveaux, de l'école maternelle jusqu'à l'enseignement supérieur.

L'articulation des temps de vie mérite également d'être étudiée. Nous avons beaucoup parlé des descendants. N'oublions pas les ascendants, car ce sont aussi les femmes qui s'occupent des aînés, parents ou beaux-parents, grands-parents…

Puisqu'il conviendra, à l'évidence, de réformer le congé parental, attachons-nous au fond : il ne pourra être partagé entre les hommes et les femmes que si nous arrivons, d'abord, à garantir l'égalité salariale. Dès lors que, dans un couple, la différence de revenus atteint 30 %, le choix est vite fait !

Je voudrais évoquer à mon tour l'ensemble des stéréotypes nourris par le monde de la publicité ou des jeux.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Catherine Génisson. Madame la ministre, je vous poserai donc simplement trois questions.

Premièrement, le sujet de la féminisation et de la représentativité des hommes et des femmes est-il traité dans le cadre des négociations sociales ?

Deuxièmement, des mesures, spécifiques ou plus globales, sont-elles prévues pour accompagner les entreprises qui font des efforts substantiels en vue de mettre en œuvre des plans d'égalité ?

Troisièmement, compte tenu du fait que l'inégalité professionnelle est un sujet particulièrement prégnant dans notre société, ne serait-il pas opportun d'envisager une loi-cadre ? L'objectif n'est pas tant de prévoir des mesures législatives sur chaque aspect de la question que de faire prendre conscience à notre pays qu'il s'agit encore et toujours d'une priorité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

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Réponse du Ministère des droits des femmes publiée le 19/10/2012

Réponse apportée en séance publique le 18/10/2012

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame la sénatrice, que puis-je vous apprendre, à vous qui connaissez parfaitement le sujet ?

Sans revenir sur le diagnostic, je m'attacherai à vous préciser les points d'accord que nous avons conclus avec les partenaires sociaux, au terme de la grande Conférence sociale, laquelle a servi à élaborer notre feuille de route.

Oui, dans la liste des faiblesses et des fragilités qui expliquent pourquoi, malgré la dizaine de lois votées en faveur de l'égalité professionnelle, l'écart de rémunération persiste aujourd'hui, il en est une qui peut être imputable aux organisations syndicales. Celles-ci ont en effet tellement de priorités à défendre que l'égalité professionnelle n'est pas forcément toujours en tête de leur « liste de courses ».

Concrètement, au sein des entreprises, les instances représentatives du personnel, les IRP, n'incluent pas forcément ce sujet dans leurs priorités et n'interpellent pas toujours l'inspection du travail pour un contrôle sur place, pourtant prévu dans le cadre du mécanisme légal actuel.

Cela pose la question de la hiérarchisation des priorités et, peut-être aussi, celle de la représentativité de ces IRP, car, là encore, l'équilibre entre les femmes et les hommes n'est pas toujours atteint. C'est un sujet dont discuteront aussi les partenaires sociaux au cours de la négociation que j'évoquais.

Vous avez raison, madame la sénatrice, il est important que les dirigeants d'entreprise puissent sentir peser au-dessus de leur tête la menace d'une sanction, si possible effective. Je profite de cette occasion pour dire une nouvelle fois que nous allons modifier le décret d'application de la loi, afin de rendre le dispositif de contrôle du respect des obligations incombant aux entreprises de plus de cinquante salariés beaucoup plus opérant qu'il ne l'est aujourd'hui : les sanctions doivent tomber lorsqu'il le faut.

Avoir un dispositif répressif, c'est important mais, dans le même temps, il faut accompagner les entreprises, en particulier les PME, car l'égalité professionnelle ne se réalise pas si simplement que cela.

Des expérimentations sont menées dans neuf régions. L'une des opérations menées consiste à réunir les quinze plus grandes entreprises les plus exemplaires en matière d'égalité professionnelle pour leur demander de faire un travail spécifique en direction de leurs PME fournisseuses et sous-traitantes : nous souhaitons qu'elles puissent mettre à la disposition de ces dernières à la fois l'expertise et les outils qu'elles-mêmes ont su adopter pour assurer l'égalité en leur sein, dans l'objectif de faire dupliquer leur démarche dans ces PME avec lesquelles elles ont un lien si étroit.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour la réplique.

Mme Catherine Génisson. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

Puisque nous imposons aux entreprises de produire des rapports de situation comparée dans le domaine de l'égalité professionnelle, nous pourrions demander que les conseils d'administration de l'éducation nationale produisent également des rapports de situation comparée sur l'orientation des filles et des garçons. Je ne demande pas que chaque filière compte autant de filles que de garçons, mais ces rapports permettraient peut-être d'avoir une connaissance précise de la manière dont sont orientés les unes et les autres au cours de leur cursus éducatif.

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