Question de M. RIES Roland (Bas-Rhin - SOC) publiée le 26/10/2012

Question posée en séance publique le 25/10/2012

M. Roland Ries. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite interpeller le Gouvernement sur un sujet qui, au-delà de Strasbourg, concerne aussi, globalement, la France. (Ah ! sur les travées de l'UMP.) Je veux parler de la présence du Parlement européen dans la ville dont je suis le maire.

Vous le savez, cette présence est depuis longtemps contestée par un certain nombre de députés européens et par des lobbies de toutes sortes qui souhaitent, comme ils disent, un siège unique, one seat, du Parlement à Bruxelles. Cette bataille a pris, depuis quelques jours, un tour nouveau avec une offensive d'une grande violence contre Strasbourg et donc, indirectement, contre la France.

M. François Rebsamen. C'est inacceptable !

M. Roland Ries. Ce positionnement est en contradiction totale avec l'esprit et la lettre des traités fondateurs de l'Union européenne, qui, non seulement fixent le siège du Parlement européen à Strasbourg, mais, de plus, mettent en avant le nécessaire polycentrisme européen et la répartition des sièges des institutions européennes dans plusieurs villes à travers l'Europe et pas seulement à Strasbourg, à Luxembourg et à Bruxelles. (M. le ministre de l'intérieur sort de l'hémicycle.)

Mme Isabelle Debré et M. Pierre Charon. Monsieur Valls, restez !

M. Roland Ries. Des votes importants ont encore eu lieu avant-hier, le 23 octobre 2012, sur la question du siège. Ils font suite à la série de votes auxquels nous assistons depuis le vote de l'amendement Fox, lequel prévoit l'organisation dans la même semaine de deux sessions parlementaires de deux jours chacune pour contourner les traités qui stipulent que douze sessions annuelles du Parlement européen doivent se tenir à Strasbourg.

C'est évidemment inacceptable et cette ruse – je devrais dire cette manipulation ! – ne peut que jeter le discrédit sur les travaux du Parlement européen tout entier.

Je vous demande donc, d'abord, monsieur le ministre, de réaffirmer solennellement l'attachement de la France à la présence du Parlement européen sur son territoire, à Strasbourg. Je vous demande, ensuite, de réaffirmer que ce point n'est pas négociable, sauf à rouvrir la négociation sur l'ensemble des sièges de nos institutions européennes – c'est-à-dire, en réalité, rouvrir la boîte de Pandore, ce que personne ne veut. Je vous demande, enfin, de redire que, si siège unique il doit y avoir, ce siège ne peut être qu'à Strasbourg, conformément à l'esprit et à la lettre des traités.

M. Jean-Pierre Raffarin. Il a raison !

M. Roland Ries. Je vous remercie, monsieur le ministre, de nous aider à faire face à ces nouvelles offensives dans lesquelles la mauvaise foi se conjugue à une agressivité grandissante et proprement inacceptable.

M. Jean-Pierre Raffarin. Exact !

M. Roland Ries. J'ajoute que c'est aussi une certaine conception de la construction européenne qui se profile à l'arrière-plan de ce débat. À l'Europe économique et normative telle qu'elle se construit à Bruxelles, à l'Europe judiciaire et financière telle qu'elle se construit à Luxembourg et à Francfort, il est plus que jamais nécessaire d'adjoindre l'Europe des peuples et des droits de l'homme telle qu'elle s'élabore depuis longtemps à Strasbourg.

Je vous remercie de vos réponses, monsieur le ministre, et de votre soutien sur ce dossier. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur quelques travées du groupe CRC, ainsi que sur plusieurs travées de l'UMP. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.)

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Réponse du Ministère chargé des relations avec le Parlement publiée le 26/10/2012

Réponse apportée en séance publique le 25/10/2012

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Bernard Cazeneuve, actuellement en déplacement en Bulgarie.

Vous connaissez l'attachement des autorités françaises au rayonnement européen de la ville de Strasbourg et au siège strasbourgeois du Parlement européen.

Notre position est simple : la France est attachée au respect des traités qui ont fixé le siège du Parlement européen à Strasbourg. Pour nous, cette décision est intangible et non négociable. La localisation des institutions européennes, et notamment du Parlement européen, dans plusieurs villes permet de préserver cette Europe polycentrique à laquelle nous tenons, car elle constitue un outil précieux pour lutter contre la perception au sein des opinions publiques d'institutions lointaines, opaques et déconnectées des préoccupations des citoyens.

C'est la raison pour laquelle nous sommes très vigilants sur le respect des traités. C'est dans cet esprit que nous avons saisi la Cour de justice de l'Union européenne contre la délibération du Parlement européen relative au calendrier des sessions 2012 et 2013, qui tend à réduire le nombre de sessions plénières à Strasbourg. Les conclusions rendues le 6 septembre 2012 par l'avocat général de la Cour de justice dans cette affaire vont dans le sens de la position défendue par les autorités françaises.

L'avocat général estime en effet que les sessions plénières d'octobre 2012 et 2013, artificiellement scindées en deux par le Parlement européen, ne peuvent être qualifiées individuellement de sessions plénières mensuelles, et propose à la Cour d'annuler les délibérations du Parlement européen relatives au calendrier des périodes de sessions parlementaires pour 2012 et 2013. Les autorités françaises ont pris note des conclusions dès leur publication. Il appartient maintenant à la Cour de rendre son arrêt, ce qui devrait être fait d'ici à la fin de l'année, si l'on se fonde sur les délais usuels.

Cette saisine de la Cour de justice est une illustration de plus de notre détermination s'agissant du sujet que vous évoquez.

M. Pierre Charon. C'est un orateur-né !

M. Francis Delattre. Quel charisme !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le siège strasbourgeois du Parlement européen n'est pas, selon nous, négociable. Telle est, monsieur le sénateur-maire, la position du Gouvernement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. Pierre Charon. Formidable réponse !

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