Question de M. PIRAS Bernard (Drôme - SOC) publiée le 11/10/2012

M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les dispositions de l'article 74-III 4° du code des marchés publics (CMP) qui prévoit que « si le pouvoir adjudicateur ne retient pas la procédure du concours, la procédure applicable est : a) soit la procédure négociée si les conditions de l'article 35 sont remplies. En cas de publicité et de mise en concurrence, la mise en concurrence peut être limitée à l'examen des compétences, références et moyens humains et matériels des candidats. Le pouvoir adjudicateur, après avis du jury tel que défini au I de l'article 24, dresse la liste des candidats admis à négocier, dont le nombre ne peut être inférieur à trois sauf si le nombre de candidats n'est pas suffisant. Le pouvoir adjudicateur engage les négociations. Au terme de ces négociations, le marché est attribué ; b) soit la procédure de l'appel d'offres si les conditions de l'article 35 ne sont pas remplies. Dans ce cas, un jury composé dans les conditions définies au I de l'article 24 émet un avis motivé sur les candidatures et sur les offres ». Les cas de l'article 35 du CMP auxquels il peut être recouru directement – sachant que la maîtrise d'œuvre relève de la catégorie des prestations de services (article 29 12° du CMP) –, se limitent à ceux précisés au 2° et au 4° du I de cet article pour ces marchés qui sont le plus couramment soumis à une obligation de publicité et mise en concurrence. Le cas énoncé au 2° concerne « les marchés de prestations intellectuelles telles que la conception d'ouvrage, lorsque la prestation de services à réaliser est d'une nature telle que les spécifications du marché ne peuvent être établies préalablement avec une précision suffisante pour permettre le recours à l'appel d'offres », alors même qu'il est précisé au III de l'article 74 que « si le pouvoir adjudicateur ne retient pas la procédure du concours, la procédure applicable est : b) la procédure de l'appel d'offres si les conditions de l'article 35 ne sont pas remplies ». Quant au cas énoncé au 4°, il concerne « des cas exceptionnels, lorsqu'il s'agit […] de services dont la nature ou les aléas qui peuvent affecter leur réalisation ne permettent pas une fixation préalable et globale des prix ».

La question se pose ici de savoir en quoi, si l'on considère ce dernier cas, la nature, notamment, de la maîtrise d'œuvre peut rendre impossible la fixation préalable et globale du prix d'un marché dans ce domaine et si cette impossibilité de fixer ce prix est en rapport avec les dispositions de l'article 29 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 qui précise que « dans le cas où le coût prévisionnel des travaux n'est pas encore connu au moment de la passation du contrat avec le maître d'œuvre, le montant provisoire de la rémunération de ce dernier est basé sur la partie affectée aux travaux de l'enveloppe financière prévisionnelle fixée par le maître de l'ouvrage ». Ceci est le cas le plus fréquent en matière de maîtrise d'œuvre, en particulier, de bâtiment.
Il lui demande ce qui, à son avis, justifie pour des prestations de maîtrise d'œuvre le recours à la possibilité de passer un marché en procédure négociée avec publicité et mise en concurrence dans le cas énoncé au 4° du I de l'article 35.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 17/01/2013

L'article 74 du code des marchés publics (CMP) relatif aux marchés de maîtrise d'œuvre a fait l'objet de plusieurs rédactions successives. Les procédures applicables à ces marchés n'ont pas, pour autant, été modifiées fondamentalement au fil du temps. Les marchés de maîtrise d'œuvre comprennent certaines spécificités, telle la présence d'un jury, mais n'en constituent pas moins des marchés de service classiques soumis à l'intégralité de la règlementation des marchés publics issue des directives européennes. Ils ne bénéficient d'aucune procédure dérogatoire liée à leur objet. Un pouvoir adjudicateur peut ainsi recourir à la procédure négociée, lorsque son marché correspond à une des hypothèses prévues par l'article 35 du CMP, et uniquement dans ce cas. Plusieurs dispositions de cet article peuvent trouver à s'appliquer dès lors que les conditions mentionnées sont remplies : à la suite de marché infructueux (1° du I ou 4° du II selon le cas) ou pour les marchés complémentaires des 5° et 6° du II du même article. Les hypothèses évoquées qui semblent, en effet, être souvent utilisées pour des marchés de maîtrise d'œuvre, ne peuvent l'être que si l'acheteur public peut démontrer qu'il entre dans un de ces cas de figure. S'agissant d'une dérogation aux règles du concours ou de l'appel d'offres, les conditions de leur application doivent être strictement interprétées. En tout état de cause, le recours au marché négocié autorisé par l'article 35 ne peut être justifié par l'objet du marché : on ne peut pas considérer que, par principe, le cahier des charges d'un marché de maîtrise d'œuvre est toujours complexe ou que le prix de la prestation ne peut être établi. Plus précisément, sur le 4° du I, ce n'est pas parce que la rémunération du maître d'œuvre est évolutive qu'elle justifie un recours normal au marché négocié. La rémunération du maître d'œuvre repose sur trois phases. Tout d'abord, les parties définissent une rémunération initiale, qui peut être provisoire (on connaît les modalités de détermination du prix) ou définitive (on connaît le prix de la prestation future à la signature du contrat). La deuxième phase de la rémunération est constituée par les versements de sommes d'argent prenant en compte les avances, acomptes, variations de prix, etc. Enfin, la troisième phase intervient à la fin de la mission, c'est la rémunération finale définitive qui est déterminée à partir de la rémunération initiale et des variations de prix. Le fait pour la rémunération d'être fixée contractuellement signifie que le montant de la rémunération ou les éléments de son évolution doivent être fixées dans le marché. Les hypothèses visées par l'article 29 du décret du 29 novembre 1993, décret d'application de la loi sur la maîtrise d'ouvrage publique de 1985, dite loi MOP, ne peuvent aucunement justifier le recours au marché négocié dans le cas prévu au 4° du I de l'article 35 du CMP.

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