Question de M. BOURQUIN Christian (Pyrénées-Orientales - RDSE) publiée le 18/10/2012

M. Christian Bourquin appelle l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le caractère incomplet de l'information donnée aux femmes alors que la campagne annuelle de communication autour du dépistage systématique du cancer du sein - « octobre rose » - a déjà commencé. Il apparaît en effet que les débats concernant le caractère favorable ou non de la balance bénéfice/risque d'un tel dépistage ne sont pas clos. En effet, si l'étude observationnelle de Nickson récemment publiée conclut que le dépistage systématique peut être bénéfique en termes de réduction du taux de mortalité des femmes, elle ne peut mettre un point final au débat scientifique car - aux dires mêmes de ses auteurs qui l'indiquent dans le résumé de leur étude – elle comporte des biais. Il en va de même pour l'étude récente de Puliti et Duffy qui, si elle détermine un taux plutôt faible de surdiagnostic (10 %), semble peu fiable dans la mesure où elle écarte d'emblée les données issues de deux autres études de référence (étude de Zahl de 2008 et étude de Junod en 2011). Ainsi, en matière de surdiagnostic du cancer du sein, les données disponibles restent très sensiblement différentes : en 2006, la revue indépendante Prescrire évaluait les diagnostics par excès des mammographies de dépistage entre 30 % et 50 % des diagnostics de cancer du sein ; l'étude publiée cette année par le réseau Cochrane, réseau non lucratif de chercheurs indépendants, concluait quant à elle que le dépistage systématique, quand il permet d'éviter le décès prématuré d'une femme par cancer du sein, en expose dix autres au surdiagnostic et aux traitements inutiles et dangereux qui en découlent. Il lui demande en conséquence s'il ne lui apparaît pas utile de veiller à ce que la campagne d'information « octobre rose » mentionne également les risques que comporte ce type de dépistage et de permettre ainsi aux femmes sollicitées, comme le préconise la Haute Autorité de santé, de faire « un choix en connaissance de cause ».

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Réponse du Ministère des affaires sociales et de la santé publiée le 20/12/2012

En France, le programme de dépistage organisé du cancer du sein est conforme aux recommandations européennes et aux recommandations de bonnes pratiques établies par la Haute autorité de santé (HAS). Il est basé sur le libre choix des femmes à consulter un radiologue et le respect du colloque singulier entre la personne et le médecin. Ce programme généralisé en 2004 invite les femmes entre 50 et 74 ans à bénéficier tous les deux ans d'un dépistage de qualité pris en charge à 100 % par l'assurance maladie, sans avance de frais. La balance bénéfice risque est un des éléments qui a été pris en compte au moment de la décision de la généralisation du programme. Cette balance qui a fait l'objet de controverses récemment, est réévaluée régulièrement. Ainsi, les publications scientifiques européennes très récentes (numéro spécial du « Journal of medical screening » de fin septembre 2012), présentent les analyses statistiques très précises des données des programmes européens de dépistage en population générale et une analyse critique des études publiées dans la littérature scientifique. Les essais randomisés montrent une baisse de 21 % de la mortalité par cancer du sein suite à l'invitation au dépistage et la plupart des études observationnelles des programmes européens de dépistage organisé obtiennent des résultats similaires ou légèrement plus favorables. Les estimations dues au sur-diagnostic induit par le dépistage sont extrêmement variables selon les études, principalement car certaines études ne prennent pas pleinement en compte les effets liés à l'avance au diagnostic résultant du dépistage et les évolutions de l'incidence sous-jacente du cancer du sein. Les études prenant en compte ces effets, estiment des taux de sur-diagnostic de l'ordre de 10 % ou moins et jugent que les bénéfices du dépistage par mammographie l'emportent sur les risques. Contrairement aux autres pays européens, en France le principe de la liberté du choix du médecin est conservé et le programme de dépistage organisé gratuit sur invitation, coexiste avec un dépistage individuel non organisé mais remboursé. Cette coexistence introduit un biais important pour l'évaluation de l'impact du programme de dépistage organisé. La direction générale de la santé a récemment réinterrogé la HAS sur la coexistence du programme de dépistage organisé avec un dépistage individuel non organisé. La HAS recommande aux pouvoirs publics de maintenir et de renforcer le dépistage organisé en s'assurant que les conditions sont réunies pour permettre un choix libre et éclairé des femmes concernant leur participation ou non au dépistage du cancer du sein, quelle qu'en soit la modalité.

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