Question de M. WATRIN Dominique (Pas-de-Calais - CRC) publiée le 22/11/2012

M. Dominique Watrin attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la situation sanitaire du département du Pas-de-Calais.

La zone de proximité de Lens-Hénin représente une population de près de 400 000 habitants qui cumule des retards dans les domaines économique, social et sanitaire. Elle se place trois cent quarante-huitième sur trois cent quarante-huit en matière de mortalité prématurée et évitable, c'est-à-dire au dernier rang du classement national en termes de développement humain croissant (surmortalité de 70 % par rapport à la moyenne nationale).

Il lui demande quelles actions urgentes elle compte entreprendre afin de remédier à cette situation de crise, probablement unique sur le territoire français.

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Réponse du Ministère chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion publiée le 06/02/2013

Réponse apportée en séance publique le 05/02/2013

M. Dominique Watrin. Madame la ministre, vous connaissez, comme moi, la situation sanitaire préoccupante du Nord-Pas-de-Calais : une espérance de vie de deux à trois ans inférieure à la moyenne nationale et une mortalité évitable sur l'ex-bassin minier supérieure de 60 % à 70 % à la moyenne nationale.

Les centres de santé du régime minier aujourd'hui ouverts au régime général sont l'un des meilleurs atouts de ce territoire sous-médicalisé, confronté à un taux de chômage record, pour réduire les retards de santé et pour répondre aux besoins de la population. Celle-ci peut ainsi accéder à des soins de qualité, sans dépassement d'honoraires et sans avance de frais - tiers-payant. C'est toute la population qui peut bénéficier d'une prise en charge globale dans le cadre d'une filière médicale, sanitaire et médicosociale cohérente, héritée des mines. Pourtant, de 2010 à 2012, le nombre de centres de santé est passé de cent vingt-huit à cent douze dans le Nord-Pas-de-Calais.

Les investissements nécessaires à la mise à niveau des locaux, des équipements médicaux et des projets de santé à porter ont été bloqués par le gouvernement précédent et sont devenus urgents. Trois projets d'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou EHPAD, pourtant opérationnels à Avion, Billy-Montigny et Auchel/Lozinghem, sont même toujours bloqués par la direction de la sécurité sociale du ministère de la santé, alors que le taux d'équipement sur les territoires concernés est pourtant inférieur de près de moitié à la moyenne nationale. Le Nord-Pas-de-Calais subit un traitement discriminant. Pis, au nom du moratoire qui a été décrété, les services du ministère de la santé bloquent les projets positifs, tandis que l'hémorragie de l'offre de soins se poursuit.

Madame la ministre, entendez-vous rompre avec la politique de la droite et les contraintes étouffantes imposées par Xavier Bertrand dans la convention d'objectifs et de gestion 2012-2013 imposée au régime minier ? Vous le savez, plusieurs clauses de cette convention interdisent de fait tout projet d'investissement qui n'aurait pas pour résultat des économies financières ou qui développerait l'offre de soins.

Quand entendez-vous redonner à l'offre de soins du régime minier les moyens de son équilibre financier, largement remis en cause par l'ouverture des pharmacies libérales aux ressortissants du régime minier ?

Madame la ministre, l'annonce du regroupement de la plupart des activités du centre de santé d'Auchel sur un nouveau site à Bruay a suscité la réaction légitime des élus et des syndicalistes soucieux du bien-être sanitaire des populations du régime général comme du régime minier. Ceux-ci ne peuvent se résoudre à la perte du système de consultations en radiologie, dermatologie, ophtalmologie, dentaire... alors que les besoins ne feront qu'exploser.

Je vous demande donc l'organisation dans les meilleurs délais, sous l'égide de l'Agence régionale de santé d'Île-de-France et de Mme la sous-préfète de Béthune, d'une table ronde avec toutes les parties concernées - élus, représentants des ayants droit... - pour faire le point sur ce dossier et pour envisager les évolutions nécessaires.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, le territoire correspondant au bassin minier dans l'Artois-Douaisis connaît des difficultés importantes en matière de santé publique. L'offre de soins aujourd'hui disponible est tout juste suffisante pour répondre à l'ensemble des besoins de la population. Il ne s'agit pas que cette situation difficile s'aggrave.

Le Gouvernement s'est engagé à trouver des solutions concrètes et pragmatiques pour permettre à tous les Français de continuer à être soignés par le bon professionnel de santé, situé à proximité. C'est le sens du « Pacte territoire-santé » : douze engagements pour lever tous les obstacles à une bonne répartition de l'offre de soins qui répondent aux besoins des Français.

Des solutions opérationnelles doivent donc être trouvées pour le territoire du bassin minier. Or les grandes difficultés du régime minier pourraient aggraver la situation.

En effet, de nombreuses structures dépendent du régime minier : centres polyvalents, centres spécialisés, centres dentaires, laboratoires d'analyses médicales, cabinets d'optique, pharmacies et laboratoires de prothèses dentaires. Elles constituent une part non négligeable de l'offre de soins utile et nécessaire. Le schéma régional d'organisation des soins intègre pleinement ces moyens disponibles, et la disparition de ces centres nuirait à l'accès aux soins.

Or l'équilibre économique de ces structures n'est aujourd'hui absolument pas garanti. Le déficit des centres de santé, notamment, est très important.

Mme la ministre de la santé a demandé à l'Agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais et aux responsables du régime minier de se rapprocher, afin de travailler et de trouver les solutions pour que l'offre de soins soit toujours adaptée aux besoins des patients du bassin minier.

Il est important de connaître plus précisément l'activité de ces centres, leur zone d'attraction et les populations concernées, qui relèvent du régime minier mais pas uniquement, pour prévoir les évolutions nécessaires. À ce jour, un certain nombre de mesures, notamment la mise en œuvre de la mutualisation, ont pu être prises par la CARMI, qui est le gestionnaire de ces centres.

Monsieur le sénateur, un plan d'action va donc être élaboré pour anticiper les évolutions nécessaires de l'offre de soins du régime minier dans le Nord-Pas-de-Calais.

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Madame la ministre, je prends acte des précisions que vous m'avez apportées. Vous avez dit très justement que la disparition des centres de santé nuirait à l'offre de soins. Je partage évidemment ce constat. Malheureusement, je vois ces centres disparaître les uns après les autres et l'offre de proximité que vous vantez s'amenuiser. Il faut donc réagir sans attendre trop longtemps.

Je regrette en particulier que vous n'ayez pas répondu à ma demande expresse de mettre en place une table ronde sur le problème particulier du centre de santé d'Auchel. Selon moi, c'est en mettant toutes les données sur la table qu'on pourra avancer. En tout cas, vous ne vous êtes pas opposée à cette proposition, que je souhaite bien évidemment voir aboutir.

J'attendais également une avancée sur la problématique des pharmacies du régime minier. Vous avez évoqué les « difficultés » de ce régime. Mais elles sont pour une grande part artificielles.

En effet, auparavant, les déficits des centres de santé étaient compensés par les excédents des pharmacies des mines. Or, aujourd'hui, ce sont 20 millions d'euros des assurés sociaux qui sont passés aux mains des officines privées, au lieu que les excédents servent à conforter l'offre publique et gratuite de soins. Si je comprends une telle philosophie de la santé venant d'un gouvernement de droite, j'attendais aujourd'hui autre chose !

Enfin, les centres de santé, quel que soit leur statut - mutualiste, municipal ou minier -, posent un problème général.

Dès son arrivée au ministère, Mme la ministre de la santé avait fait des déclarations positives et encourageantes concernant le devenir des centres de santé. Pourtant, à ce jour, je n'ai vu aucun acte concret. Ces centres continuent même à être discriminés par rapport à la médecine libérale : pas d'abondement financier en ce qui concerne le suivi des affections de longue durée ou la prise en charge des patients âgés ; aucune compensation financière pour les frais induits par le système du tiers-payant.

En conclusion, je dirai que le changement, c'est maintenant, et de façon urgente !

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