Question de M. CAMBON Christian (Val-de-Marne - UMP) publiée le 20/12/2012

M. Christian Cambon appelle l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le risque sanitaire qu'engendre l'utilisation de phtalates dans les produits industriels.
Le Sénat vient d'adopter définitivement la proposition de loi visant à la suspension de bisphénol A dans les contenants alimentaires. Cette étape est une première victoire face aux polluants qui se nichent dans les produits de consommation pouvant être en contact avec la peau ou les muqueuses. Ces substances, comme les phtalates, perturbateurs hormonaux, se retrouvent toujours dans de très nombreux produits industriels car elles ont la propriété de ramollir les matières plastiques. On retrouve ces polluants cancérigènes dans les plastiques souples, le revêtement de sol, les cosmétiques, les parfums et même dans les poches de transfusion. L'Europe a d'ailleurs interdit six d'entre eux dans les articles de puériculture, huit dans les cosmétiques. La Commission européenne a décidé en 2011 d'interdire « dans les trois à cinq ans à venir » les phtalates utilisés dans l'industrie en raison de leurs dangers pour la santé. Il l'interroge sur les mesures rapides que le Gouvernement souhaite prendre face à cet enjeu sanitaire.

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Erratum : JO du 27/12/2012 p.3103


Réponse du Ministère des affaires sociales et de la santé publiée le 11/04/2013

Les phtalates représentent une large famille d'une quarantaine de substances qui sont utilisées comme agents plastifiants dans des applications que l'on retrouve dans de très nombreux produits de consommation courante. Leur différence de structure chimique implique aussi une différence dans leurs effets toxiques, ce qui fait qu'on ne peut pas attribuer les effets observés avec certains phtalates à l'ensemble des molécules de cette famille. Certains phtalates sont classés comme toxiques pour la reproduction de catégorie 1A et 1B et, à ce titre, ont déjà fait l'objet de mesures de restriction ou d'interdiction spécifiques. Dans les préparations destinées au grand public (telles que peintures, colles...) au titre de l'annexe XVI du règlement REACH et dans les cosmétiques au titre de l'annexe II du règlement relatif aux cosmétiques, les phtalates classés toxiques pour la reproduction de catégorie 1A et 1B tels que le DEHP, le DBP et le BBP sont interdits. Dans les articles tels que les jouets et articles pouvant être portés à la bouche par les enfants, plusieurs phtalates (DEHP, DBP, BBP, DINP, DIBP, DNOP) ont fait l'objet de restrictions d'utilisations d'usage. Concernant les matériaux en contact avec les aliments, il existe également des restrictions d'utilisation. Des limites spécifiques de migration sont ainsi déterminées afin de préciser les conditions d'utilisation de ces substances (directive 2007/19/CE). Concernant plus spécifiquement les produits cosmétiques, la plupart des phtalates utilisés ont déjà été interdits au niveau communautaire, via la mise en œuvre des procédures prévues à cet effet par la directive modifiée n° 76/768/CEE relative aux produits cosmétiques. Concernant le seul phtalate qui reste utilisé dans les produits cosmétiques, le DEP, les différentes évaluations menées au niveau européen ont toutes conclu à son innocuité dans le cadre d'un usage cosmétique. Concernant les dispositifs médicaux, l'entrée en vigueur le 21 mars 2010 de la directive n° 2007/47/CE, modifiant la directive 93/42/CEE relative aux dispositifs médicaux, a pris en compte la question des phtalates par rapport aux populations les plus à risque. En effet, elle a introduit l'apposition d'un étiquetage spécifique pour les dispositifs médicaux contenant ces substances. En outre, la directive 2007/47/CE prévoit l'obligation spécifique pour le fabricant de justifier l'utilisation de ces substances et l'indication dans la notice d'information des risques résiduels et des mesures de précaution appropriées dans le cas où les dispositifs médicaux sont spécialement destinés aux enfants, ou aux femmes enceintes ou allaitant. Par ailleurs, dans le cadre du règlement REACH, quatre phtalates DEHP, BBP, DBP et DIBP ont été récemment inscrits à l'annexe XIV du règlement REACH comme substances très préoccupantes soumises à autorisation. Ils ne pourront donc plus être fabriqués ou importés s'ils n'ont pas obtenu, pour un usage bien défini, une autorisation spécifique de la Commission européenne d'ici le 21 janvier 2015. Quatre autres phtalates sont par ailleurs entrés dans ce processus d'autorisation de REACH en étant inscrits sur la liste des substances candidates à l'annexe XIV. La protection de la santé et de l'environnement est un intérêt partagé par les États membres de l'Union européenne et les dispositions nationales, outre le fait qu'elles ne peuvent être adoptées que dans les domaines ne faisant pas l'objet d'une réglementation d'harmonisation communautaire, sont souvent difficilement applicables aux produits ou articles importés ou en provenance d'autres États membres de l'Union européenne, en raison du principe de libre circulation des marchandises. Il convient donc d'effectuer l'encadrement règlementaire des produits chimiques en privilégiant les procédures européennes plutôt que par des dispositions nationales qui peuvent présenter un risque d'incompatibilité avec les règles communautaires ou internationales. Les autorités françaises souhaitent être force de proposition dans ce domaine. Le ministère de la santé a pour cela saisi en janvier 2009 les agences nationales de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES et ANSM) pour qu'elles évaluent le risque attribuable à différentes substances toxiques pour la reproduction de catégorie 2 ou suspectées d'être des perturbateurs endocriniens, dont les phtalates, dans les produits grand public et les produits cosmétiques. Ces études dont le rendu est attendu pour fin 2013, comporteront la détermination de l'ensemble des usages, l'évaluation des expositions et du risque, et enfin, l'évaluation des procédés ou substances de substitution, étape indispensable pour une gestion des risques adaptée. L'ensemble des données et conclusions recueillies par ces agences permettra d'engager une action, tant au niveau national qu'au niveau communautaire pour améliorer et accélérer la prise de décisions quant aux usages et autorisations de certaines substances.

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