Question de Mme MORIN-DESAILLY Catherine (Seine-Maritime - UDI-UC) publiée le 25/01/2013

Question posée en séance publique le 24/01/2013

Mme Catherine Morin-Desailly. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.

Monsieur le ministre, d'ici à la fin du mois de mars, les communes de nos départements sont appelées à se prononcer sur une réforme des rythmes scolaires, applicable en 2013 ou en 2014, pour laquelle les élus n'ont pas été sérieusement informés et encore moins consultés.

Ce projet aux contours flous, dont l'impact financier n'a absolument pas été évalué, a été sévèrement retoqué par toutes les instances de concertation : comité technique ministériel, Conseil supérieur de l'éducation, commission consultative d'évaluation des normes.

Dans un contexte de baisse annoncée des dotations de l'État pour 2014 et 2015, les élus se sentent pris à la gorge et s'interrogent sur la faisabilité du projet en l'état. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

Que se passera-t-il lorsque l'aide exceptionnelle de 250 millions d'euros promise pour 2013 – aide qui, selon les premières estimations de nos collègues, apparaît déjà très en deçà des dépenses engendrées – disparaîtra ?

Sous quelle responsabilité seront placés les enfants entre quinze heures trente et seize heures trente ? Qui les encadrera ? Aura-t-on partout – en ville comme en milieu rural – les moyens de recruter des personnels qualifiés pour les activités culturelles ou sportives annoncées ?

Un sénateur du groupe socialiste. Vous les aviez supprimés !

Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le ministre, ces questions toutes simples, auxquelles vous n'avez pas franchement répondu tout à l'heure, sont celles que se posent des élus qui nous interpellent tous les jours ! Savez-vous réellement ce qu'est la gestion de l'école d'une petite commune ou encore d'un regroupement scolaire en milieu rural ?

Ces élus, qui font déjà beaucoup d'efforts, revendiquent tout autant que vous le bien-être et l'intérêt de l'enfant. Dès lors, ils appréhendent une réforme qui menace de creuser les inégalités entre les territoires.

Les sénateurs de l'UDI-UC jugent que l'éducation est une priorité. Aussi, monsieur le ministre, ils veulent vous mettre en garde contre un passage en force risquant d'être contreproductif pour l'aménagement du temps de l'école, qui est en effet nécessaire. C'est bien à cette conclusion qu'est parvenue la Conférence nationale sur les rythmes scolaires, installée par Luc Chatel, au sein de laquelle j'ai d'ailleurs travaillé, comme deux de mes collègues appartenant à des groupes politiques différents.

M. Alain Néri. Parlez-nous plutôt de M. Darcos !

Mme Catherine Morin-Desailly. Parmi nos recommandations, au travers desquelles nous proposions par ailleurs un projet plus global, intégrant aussi le rythme à l'année – que je ne retrouve pas vraiment dans votre projet, monsieur le ministre –, nous insistions sur la nécessité d'une méthode qui privilégie la concertation.

M. Alain Gournac. Avec les maires !

Mme Catherine Morin-Desailly. À la précipitation qui a été la vôtre depuis le début, et contre laquelle le Premier ministre vous a d'ailleurs mis en garde en juin dernier, il faut privilégier l'expérimentation et la souplesse, qui permettent des adaptations dans le respect des objectifs.

En clair, monsieur le ministre, pour réformer, vous devez échanger avec l'ensemble des partenaires de l'école et, en premier lieu, avec les représentants des collectivités qui en assumeront la mise en œuvre.

M. Alain Gournac. Les maires !

Mme Catherine Morin-Desailly. Ces élus dont nous nous faisons les porte-parole vous demandent des moyens pour appliquer la réforme. Surtout, ils vous demandent du temps ! Et ce n'est pas le mois de réflexion supplémentaire accordé aux communes qui permettra de résoudre le problème, car, aujourd'hui – il faut bien le dire –, la plus grande confusion règne ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 25/01/2013

Réponse apportée en séance publique le 24/01/2013

M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Madame la sénatrice, vous avez opportunément rappelé que vous aviez fait partie du comité de pilotage de la grande consultation nationale sur la réforme des rythmes scolaires menée par mon prédécesseur pendant plusieurs mois.

Cette consultation a tiré le bilan de ce qui avait été l'une des plus tristes réformes mises en œuvre par la majorité précédente : la suppression des quatre jours et demi de classe hebdomadaires. (Vives protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Avec concertation !

Mme Catherine Procaccia. Quoi de triste là-dedans ?

M. Vincent Peillon, ministre. Vous avez vous-même tiré la conclusion qu'il fallait revenir à ces quatre jours et demi, à raison de cinq heures d'école par jour si cela était possible. Vous avez même préconisé de rajouter deux semaines de cours. Puis, avec les autres membres du comité de pilotage, vous en êtes restés là.

C'est dommage, parce qu'il est dans l'intérêt des élèves que nous soyons capables de réaliser, tous ensemble, cette réforme, comme vous l'aviez vous-même reconnu.

La concertation est nécessaire.

M. Alain Gournac. Avec les maires !

M. Vincent Peillon, ministre. À votre époque, elle a duré plus d'un an. Après notre installation, elle s'est poursuivie plusieurs mois. Toutes les associations de maires - y compris des maires de zones montagneuses et des maires ruraux, qui se sont prononcés pour, ainsi, bien sûr, que l'Association des maires de France - ont été reçues à plusieurs reprises.

Madame la sénatrice, je constate que vos informations ne sont pas toujours justes. Vous avez parlé de la commission consultative d'évaluation des normes, où les élus sont représentés. Hier, cette commission a validé le projet de décret, par huit voix pour et deux voix contre. Pourquoi ? Parce que les informations sont enfin parvenues à ses membres, (M. Alain Gournac s'exclame.), alors que, jusque-là, elles avaient du mal à passer, étant donné le travail de désinformation auquel vous vous employiez malgré votre préoccupation de façade. (Vives protestations sur les travées de l'UMP. - Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

C'est dommage, parce que, pour des raisons purement politiciennes, vous prenez les enfants de France en otage. On a vu d'ailleurs pendant cinq ans quelles étaient vos pratiques envers l'éducation nationale !

M. Gérard Larcher. Arrêtez !

M. Vincent Peillon, ministre. Aujourd'hui, nous sommes obligés de réparer. C'est vrai pour les rythmes scolaires, car c'est vous qui avez fait la semaine de quatre jours, unique au monde ! C'est vrai pour les remplacements, car vous avez supprimé 80 000 postes ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) C'est vrai pour la formation des enseignements, car vous l'avez elle aussi supprimée !

Nous, nous pensons à l'avenir de la France, nous apportons des réponses concrètes, qu'il s'agisse des taux d'encadrement ou du financement de la réforme, en nous attachant à consulter les uns et les autres.

M. Alain Gournac. Ce n'est pas vrai !

M. Vincent Peillon, ministre. Si vous avez encore des inquiétudes, au-delà de celles que vous entretenez pour des raisons politiciennes (Protestations sur les travées de l'UMP.), mes services sont entièrement à votre disposition pour vous aider à élaborer ces projets territoriaux pour lesquels les élus locaux auront une responsabilité particulière.

Certains ne veulent pas - je vois ici le maire de Marseille... - accorder à l'école la priorité qu'elle mérite. (M. Jean-Claude Gaudin proteste.) L'État français le veut, l'école le veut... Alors, mettez-vous en mouvement ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Alain Gournac. Ça coûte trop cher !

M. Jean-Claude Gaudin. C'est scandaleux ! Qui va payer ? Vous ?

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