Question de M. RAOUL Daniel (Maine-et-Loire - SOC) publiée le 22/02/2013

Question posée en séance publique le 21/02/2013

M. Daniel Raoul. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé de la ville.

Depuis la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine de 2003, les politiques menées par les gouvernements successifs n'ont atteint aucun des objectifs qu'ils s'étaient fixés. Il est vrai que la baisse constante des crédits alloués aux politiques de la ville depuis 2008 – moins 50 % ! – n'est sans doute pas étrangère à cet échec.

Selon l'Observatoire national des zones urbaines sensibles, les écarts de développement ne se sont pas réduits, bien au contraire ! Aujourd'hui encore, plus d'un résident sur trois habitant dans un quartier populaire est pauvre, contre un sur huit dans le reste du territoire ; le taux de chômage y est 2,5 fois plus élevé qu'ailleurs ; une famille sur quatre est monoparentale, contre une sur dix dans les aires urbaines environnantes ; et je pourrai poursuivre la liste des indicateurs.

La Cour des comptes, dans le rapport sévère qu'elle a rendu en juillet 2012 sur la politique de la ville, analysait cette absence de progrès comme le résultat d'une dilution des interventions sur un nombre beaucoup trop grand de quartiers. Elle pointait des défauts persistants de gouvernance et de coordination, un manque d'articulation entre rénovation urbaine et accompagnement social, une répartition inadéquate des crédits dédiés à la politique de la ville et, enfin, une trop faible mobilisation des politiques publiques de droit commun.

Monsieur le ministre, vous avez lancé, à l'automne dernier, une large concertation, qui rassemblait environ 150 membres représentant l'ensemble des acteurs locaux et nationaux concernés et à laquelle notre collègue Claude Dilain a été étroitement associé puisqu'il coprésidait l'un des groupes de travail, en vue de réformer la politique de la ville. Cette concertation, qui est une démarche novatrice, a abouti à la formulation de propositions nombreuses et opérationnelles. Celles-ci ont été soumises au Gouvernement et sans doute présentées lors du comité interministériel des villes, qui s'est tenu mardi dernier.

Toutes ces propositions doivent tendre vers le même objectif : mettre un terme aux stigmatisations territoriales des quartiers…

M. Robert Hue. Très bien !

M. Daniel Raoul. … et aux discriminations dont sont victimes les habitants des quartiers populaires. Il s'agit d'un changement de philosophie en faveur du rétablissement de l'égalité républicaine dans les quartiers.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire davantage sur les propositions retenues tant il y a urgence pour ces huit millions d'habitants des quartiers populaires ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du Ministère chargé de la ville publiée le 22/02/2013

Réponse apportée en séance publique le 21/02/2013

M. François Lamy, ministre délégué auprès de la ministre de l'égalité des territoires et du logement, chargé de la ville. Monsieur le sénateur, la situation des quartiers populaires concerne, me semble-t-il, toutes les sénatrices et tous les sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, et je vous remercie de m'avoir interrogé sur ce sujet.

Vous l'avez souligné, la situation de ces quartiers est plus difficile encore en cette période de crise économique et sociale. L'élément le plus frappant est le taux de chômage, qui est, en général, deux fois supérieur au taux national et même trois fois supérieur pour ce qui concerne les jeunes de seize à vingt-cinq ans.

Vous l'avez également rappelé, ces quartiers ont trop souvent été stigmatisés dans les discours publics.

Aussi le Premier ministre a-t-il décidé d'engager l'ensemble du Gouvernement sur cette question, en prenant vingt-sept décisions lors du conseil interministériel des villes, qui s'est tenu mardi dernier.

Une convention sera signée par mon ministère avec l'ensemble des ministères concernés - l'intérieur, le logement, l'emploi, l'éducation nationale, la famille, les outre-mer, les droits des femmes, notamment -, afin de fixer les objectifs, de définir les méthodes et de déterminer les moyens nécessaires pour agir dans ces quartiers. Il s'agit de la levée du droit commun pour ces quartiers et, surtout, de la reconnaissance des fractures territoriales et des fractures urbaines entre les villes et en leur sein.

Il est nécessaire d'orienter les politiques publiques vers les quartiers les plus en difficulté.

Les conventions serviront concrètement à alimenter les futurs contrats de ville, qui concernent tant les opérations de rénovation urbaine en cours, tel le programme national de rénovation urbaine, que la nouvelle génération d'opérations de rénovation urbaine, lesquelles pourront être engagées dès la signature des contrats de ville, c'est-à-dire dès 2014.

M. François Rebsamen. Très bien !

M. François Lamy, ministre délégué. Des actions de cohésion urbaine seront également menées, et les crédits consacrés à la politique de la ville dans les quartiers les plus prioritaires seront attribués selon une géographie prioritaire rénovée établie sur la base des critères les plus objectifs possibles. À ce stade, le pourcentage de foyers en dessous du revenu médian national et, éventuellement, local est le critère qui a été retenu.

Cette méthode permettra de faire émerger - cela vous intéresse tous - les poches de pauvreté existant dans les villes moyennes. Pour avoir procédé, ces derniers jours, à quelques simulations, je puis vous dire que les villes de Guéret et d'Auch, par exemple, seraient concernées.

Vous le voyez, le Gouvernement lance un plan concret. Il ne s'agit pas d'un énième plan d'urgence, qui serait enterré aussi vite qu'il a été annoncé. Non, c'est un plan structurel que le Gouvernement a décidé d'engager ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

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