Question de M. LE SCOUARNEC Michel (Morbihan - CRC) publiée le 07/02/2013

M. Michel Le Scouarnec attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur l'avenir des activités sociales et de santé.
Issues de la Libération et de la mise en place du statut national du personnel, ces activités concernent entres autres pour les salariés et leur famille, l'accès au temps disponible, la santé, la culture….
Outre cette fonction de réalisation d'activités, la mission essentielle des organismes sociaux est de permettre à chacun de participer à la définition et à la gestion égalitaire des activités.
Composante des garanties collectives, qu'elles soient statutaires ou conventionnelles, les activités sociales constituent un élément indiscutable de progrès social et économique tant en termes d'accès aux vacances, de culture que de santé.
Toutefois, depuis 2004, ce secteur n'est pas épargné, comme par exemple, par l'ouverture du marché de l'électricité et du gaz à la concurrence à travers la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 dite NOME dont les dispositions pourraient mettre, à terme, ces activités en péril.
En effet, dans le secteur de l'énergie, sur 144 entreprises recensées, plusieurs dizaines d'entre elles ne participeraient pas au fonds du 1 %. Selon un rapport de la Cour des comptes, ce manque à gagner dans les dotations serait de l'ordre de 180 millions d'euros sur cinq ans pour la CCAS (Caisse centrale d'activités sociales) et les CMCAS (caisses mutuelles complémentaires et d'action sociale).
Il est inutile de rappeler que le 1 % actuel finançant les activités sociales est un droit lié à la création de richesse par le travail des salariés. Il constitue un élément du salaire social différé, au même titre que les autres prestations sociales.
Il s'agit d'une propriété collective des salariés dont tous doivent pouvoir bénéficier sur une base solidaire.
Pourtant, les associations patronales remettent en cause le financement des œuvres sociales et de santé dans les entreprises, en proposant, par exemple, une assiette de financement basée sur la masse salariale plutôt que sur la création de richesses dans une branche professionnelle comme actuellement.
Or, ce type de financement présente une menace non négligeable sur la pérennité des activités sociales.
La majorité présidentielle précédente avait apporté des garanties en ce sens aux organisations patronales, et s'était engagée « à éclaircir et réguler le financement des activités sociales et de santé des entreprises ». À l'époque, ces propos inquiétèrent légitimement les représentants syndicaux des salariés et ne sauraient être toujours d'actualité.
C'est pourquoi, en lui rappelant les incertitudes actuelles portant sur l'emploi salarié, il lui demande les mesures envisagées, en concertation avec tous les acteurs du secteur, pour maintenir, sécuriser et développer l'accès des pensionnés et de leurs familles aux activités sociales.

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Transmise au Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie


Réponse du Ministère chargé de la décentralisation publiée le 27/03/2013

Réponse apportée en séance publique le 26/03/2013

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Antoine Vitez a dit : « Une mise en scène n'est jamais neutre. Toujours, il s'agit d'un choix ».

En ces temps difficiles, notre choix doit être celui de la solidarité, pour développer les activités sociales et de santé et continuer la lutte contre les inégalités. Ce sujet peut paraître secondaire alors que des millions de nos concitoyens n'ont plus d'emploi. Pourtant, la solidarité est plus que jamais nécessaire, car nombreux sont ceux qui diffèrent la souscription d'une mutuelle de santé ou leur départ en vacances.

Face au recul constant de l'accès aux soins médicaux et à la baisse continue du pouvoir d'achat des ménages, tout le monde a besoin de cette garantie complémentaire pour l'accès à la santé, mais aussi au repos personnel et au dépaysement.

Composante des garanties collectives, qu'elles soient statutaires ou conventionnelles, les activités sociales et la santé des salariés des industries électriques et gazières constituent un élément indiscutable de progrès social et économique, en termes d'accès aux vacances, à la culture et à la santé. J'en veux pour preuve que 400 000 personnes partent chaque année dans un des centres de vacances qui leur sont ainsi proposés, ou que 339 000 contrats d'assurance complémentaires soient souscrits.

Toutefois, le secteur de l'énergie subit l'ouverture du marché de l'électricité et du gaz à la concurrence, avec, en particulier, des dizaines d'entreprises qui ne participeraient pas au fonds du 1 % prélevé sur les recettes des ventes d'électricité et de gaz.

Selon un rapport de la Cour des Comptes, le manque à gagner serait de l'ordre de 180 millions d'euros en cinq ans pour les bénéficiaires de ce fonds que sont les CMCAS, les caisses de mutuelle complémentaires et d'action sociale, et la CCAS, la caisse centrale d'activités sociales.

Pourtant, le prélèvement de 1 % actuel est un droit lié à la création de richesse par le travail des salariés. Il constitue un élément du salaire social différé, au même titre que les autres prestations sociales. Le fonds ainsi constitué est une propriété collective des salariés, dont tous doivent pouvoir bénéficier sur une base solidaire.

Malgré cela, les associations patronales n'ont de cesse de remettre en cause le financement des œuvres sociales et de santé dans les entreprises, en proposant, par exemple, une assiette de financement basée sur la masse salariale plutôt que sur la création de richesses, comme c'est actuellement le cas dans la branche professionnelle.

Or ce changement de financement porterait un coup fatal à la pérennité des activités sociales et, au-delà, aux acquis sociaux des salariés concernés.

La précédente majorité présidentielle avait apporté des garanties en ce sens aux organisations patronales et s'était engagée « à éclaircir et réguler le financement des activités sociales et de santé des entreprises ». Ces propos ne sauraient être encore d'actualité.

Madame la ministre, en la matière, quels choix de mise en scène allez-vous effectuer en concertation avec les représentants syndicaux des salariés ? Celui de la destruction des acquis ou celui du maintien, de la sécurisation et du développement de l'accès des pensionnés et de leurs familles aux activités sociales et aux prestations de santé ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le sénateur, Delphine Batho, qui n'a pu se rendre disponible, m'a chargée d'apporter des éléments de réponse à votre question, qui s'inscrit dans la problématique de la solidarité, et d'essayer de vous dire ce que seront les choix du Gouvernement, qui seront des choix politiques et non pas simplement de mise en scène.

Vous le savez, la Caisse centrale d'activité sociale est le fruit de l'histoire. Elle trouve son origine dans le statut des personnels des industries électriques et gazières issu de la loi de 1946. Elle gère les œuvres sociales des agents et des retraités du secteur, soit plus de 600 000 ayants droit. Il s'agit donc non pas d'un comité d'entreprise de droit commun, mais d'un comité de branche, dont la dimension doit être prise en compte.

Cette caisse est financée par un prélèvement de 1 % sur le chiffre d'affaires des entreprises du secteur. Cette assiette de financement, vous l'avez relevé, est devenue fragile depuis la fin du monopole de l'opérateur historique. En effet, l'introduction de la concurrence dans le secteur de l'énergie a entraîné la séparation des activités de production, de distribution et de fourniture, ainsi que l'arrivée de nouveaux opérateurs alternatifs.

Ces évolutions rendent le calcul de plus en plus difficile : certains opérateurs sont soumis au prélèvement alors qu'ils n'ont pas d'agents sous statut, tandis que d'autres ne le sont pas alors qu'ils ont des agents sous statut. Le constat de l'essoufflement de cette assiette est donc partagé.

En 2010, à la suite de plusieurs rapports de la Cour des comptes, dont la presse s'était fait l'écho, le ministre alors en charge de l'énergie, M. Jean-Louis Borloo, a demandé aux employeurs d'engager une réforme pour faire évoluer la façon dont était géré le prélèvement de 1 % sur le chiffre d'affaires des entreprises du secteur.

Il avait fixé trois axes à cette réforme. Le premier était le mode de calcul du prélèvement - en d'autres termes, son assiette. Le deuxième axe avait trait à la gouvernance des œuvres sociales qui sont alimentées par ce prélèvement. Le dernier axe concernait les modalités de contrôle et la transparence du système.

En avril 2012, le ministre alors en charge de l'énergie, M. Besson, avait demandé aux employeurs chargés de mener la concertation, conformément à leur rôle, de lui en remettre un bilan assorti d'un relevé de positions final au mois de décembre 2012.

Comme vous l'imaginez, l'actuel gouvernement a considéré que, sur un sujet aussi important pour les agents, une concertation réduite à six mois - un délai que vous avez dénoncé -, qui touche au statut des industries électriques et gazières, n'était pas suffisante. Il a donc fait savoir qu'il n'accepterait pas que des conclusions clôturant la concertation lui soient remises par les employeurs dès le mois de décembre 2012.

Il faut du temps pour s'approprier un sujet difficile sur lequel nous avons bien l'intention d'avancer, mais seulement conformément à la méthode générale fixée par le Premier ministre, c'est-à-dire en respectant le rôle de chacun - celui des employeurs et des organisations syndicales, d'un côté, et celui des pouvoirs publics, de l'autre, et en donnant à la concertation le temps et le cadrage dont elle a besoin pour se dérouler dans de bonnes conditions.

Delphine Batho a fait savoir que, au cours de ces discussions, chacun devrait assumer ses responsabilités dans l'intérêt général. Les organisations syndicales et les employeurs seront tous reçus. Ce n'est qu'à l'issue de ces discussions, qui prendront le temps nécessaire, dans un cadrage redéfini, que des conclusions pourront être apportées, avec pour objectif la pérennisation des œuvres sociales de la branche des industries électriques et gazières.

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Madame la ministre, j'ai bien compris que la concertation se développerait et que vous prendriez votre temps. L'essentiel est que nous allions dans la bonne direction et que le progrès social, ainsi que la justice sociale, inspirent la décision finale.

J'ai reçu des délégations syndicales sur le sujet. Elles ne demandent pas une réponse pour demain matin ! Ce qui est important pour elles, ce qui leur tient à cœur, c'est la pérennisation des œuvres sociales qui ont été mises en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en 1946.

Il faut donc être très vigilant sur la position adoptée, et ces délégations espèrent que celle du Gouvernement sera différente de celle de la précédente majorité.

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