Question de M. RIES Roland (Bas-Rhin - SOC) publiée le 28/02/2013

M. Roland Ries attire l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur la situation délicate des communes isolées intégrant une communauté de communes à fiscalité additionnelle.

La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales impose aux dernières communes isolées d'adhérer à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Ces communes sont alors amenées à intégrer, pour certaines d'entre elles, une structure intercommunale à fiscalité propre selon le régime de la fiscalité additionnelle.

Cependant, l'adhésion de ces communes, au titre de la mise en œuvre du schéma départemental de coopération intercommunale, s'est produite concomitamment à la mise en place d'une autre réforme, celle de la fiscalité locale. La conséquence principale a consisté, pour ces communes, en une majoration des cotisations de taxe d'habitation pour les contribuables concernés.

En effet, le taux départemental de la taxe d'habitation est perçu à la fois par la commune adhérente et par l'intercommunalité car c'est la situation de 2010 de chaque collectivité ou établissement public de coopération intercommunale qui est prise en compte pour la taxe d'habitation en 2011.

Cependant, en 2011, les communes qui figuraient encore parmi les communes isolées ont bénéficié de la réforme de la taxe professionnelle et ont donc subi un prélèvement au titre du fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR), tandis que les intercommunalités, et chacune des communes membres, ont perçu une fraction du taux de taxe d'habitation 2010 dévolue précédemment au département.

En conséquence, à la suite de l'adhésion d'une commune isolée à une communauté de communes à fiscalité additionnelle, les contribuables en viennent à supporter deux fois la part départementale de la taxe d'habitation, l'une étant affectée à la commune devenue membre de l'EPCI, l'autre revenant à l'EPCI lui-même, l'adhésion de la commune n'ayant pas été accompagnée d'une révision du mécanisme de compensation.

Cette situation baroque, et à l'époque non perçue par le législateur, contribue aujourd'hui à dissuader les dernières communes isolées de rejoindre une structure intercommunale à fiscalité additionnelle. Les maires de ces communes craignent, en effet, de contraindre leurs habitants à une surimposition à la taxe d'habitation, souvent mal comprise.
Il souhaiterait donc savoir quelles mesures, à effet rétroactif, le Gouvernement entend prendre afin que les communes isolées rejoignant un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité additionnelle ne soient plus pénalisées.

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Réponse du Ministère chargé de la décentralisation publiée le 10/04/2013

Réponse apportée en séance publique le 09/04/2013

M. Roland Ries. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention sur la situation des communes isolées intégrant une structure intercommunale à fiscalité additionnelle et, plus particulièrement, sur le phénomène de double imposition au titre de la taxe d'habitation dont sont victimes les contribuables résidant dans ces communes.

La loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales prévoit l'achèvement de la carte intercommunale en juin 2013, imposant ainsi aux dernières communes isolées d'adhérer à un établissement public de coopération intercommunale, un EPCI, avant cette date. Certaines de ces communes isolées sont amenées à intégrer une structure intercommunale à fiscalité propre, selon le régime de la fiscalité additionnelle.

L'adhésion de ces communes, au titre de la mise en place du schéma départemental de coopération intercommunale, s'est produite concomitamment à l'instauration d'une autre réforme, celle de la fiscalité locale. La conséquence principale a été, dans les communes isolées rejoignant un EPCI après le 1er janvier 2011, une majoration de la taxe d'habitation des contribuables concernés.

En effet, dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale applicable à compter du 1er janvier 2010, la part départementale de la taxe d'habitation, du fait de la réforme de la taxe professionnelle, a été transférée du département au bloc communal. Cette part départementale est affectée, pour une part, à chaque commune membre d'un EPCI et, pour une autre part, à l'EPCI lui-même. En revanche, les communes isolées ne faisant pas encore partie d'un EPCI à cette date, percevaient alors l'intégralité du taux départemental de la taxe d'habitation et subissaient, parallèlement, un prélèvement au titre du Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR.

Par la suite, l'adhésion de ces communes isolées à un EPCI, comme c'est le cas dans mon département pour la commune d'Urmatt, qui a rejoint la communauté de communes de la Vallée de la Bruche en janvier 2012, n'a pas été accompagnée d'une révision du mécanisme de compensation de la réforme des finances locales, comme si la fiscalité locale et l'achèvement de la carte intercommunale n'étaient pas étroitement liés. Dès lors, les habitants de cette commune isolée ayant rejoint un EPCI sont contraints de supporter deux fois la part départementale de la taxe d'habitation. En effet, le taux de la taxe d'habitation appliqué à ces contribuables se décompose en un taux communal, qui inclut la totalité du taux départemental, et un taux intercommunal, qui inclut une fraction du taux départemental.

Cette situation fiscale baroque, qui n'avait pas, à l'époque, était repérée par le législateur, pose, comme vous pouvez l'imaginer, madame la ministre, de sérieux problèmes. D'une part, elle contribue à mettre en difficulté les élus locaux vis-à-vis de leurs concitoyens et, d'autre part, elle affecte l'image de l'intercommunalité. De ce fait, elle fragilise le consentement fiscal en grevant davantage le pouvoir d'achat des familles les plus modestes dans un contexte économique difficile.

Parce que cette situation concerne, à ma connaissance, quelque 1 000 communes en France, dont cinq dans mon département, je souhaiterais savoir, madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement entend prendre rapidement afin de la corriger.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le sénateur, vous avez soulevé un problème que, en vous appuyant sur le cas de la commune d'Urmatt, vous nous avez permis de bien appréhender. Cela étant, bien d'autres communes connaissent aujourd'hui le même problème et nous en mesurons aujourd'hui les conséquences.

En effet, du fait de la réforme de la taxe professionnelle, l'adhésion de communes isolées à des EPCI à fiscalité additionnelle entraîne une forte majoration des cotisations de taxe d'habitation des contribuables des communes en question.

C''est bien à la suite de vos interventions, que nous avons entrepris de régler ce problème. Nous travaillons aujourd'hui avec les services de Bercy pour essayer de trouver des solutions à une difficulté générale, que ces communes et leurs habitants sont susceptibles de rencontrer dans le cadre de l'achèvement de la carte intercommunale, la date butoir pour rejoindre une intercommunalité étant, vous l'avez rappelé, celle du 30 juin 2013.

À ce jour, seules 59 communes restent encore isolées, mis à part les cas particuliers que constituent les communes de la petite couronne de Paris et des îles monocommunales maritimes. On pourrait donc penser que le problème est relativement circonscrit.

À la suite du transfert au bloc communal des taux départementaux de taxe d'habitation, des taux de référence de taxe d'habitation communaux et intercommunaux ont dû être calculés pour 2011.

Deux cas de figure se présentent.

Pour les communes membres d'un EPCI à fiscalité additionnelle, le taux départemental de la taxe d'habitation a été ventilé entre la commune et l'EPCI.

Pour les communes isolées, le taux de la taxe d'habitation pour 2011 a intégré la totalité du taux de taxe d'habitation du département.

Ainsi, lorsqu'une commune isolée intègre un EPCI à fiscalité additionnelle, si chaque niveau de collectivité adopte des taux proches des taux de référence de 2011, la charge fiscale de taxe d'habitation pour le contribuable se trouve alourdie.

Dans ces conditions et parce que, je le répète, nous avons bien mesuré les conséquences de cette situation sur les collectivités, mes services vont travailler avec ceux de Bercy pour trouver une solution.

Il serait utile et opérant de travailler ensemble à l'élaboration d'un amendement qui serait introduit dans le projet de loi de finances pour 2014, car cette situation est effectivement insupportable pour les communes concernées et pour les citoyens qui y résident.

M. le président. La parole est à M. Roland Ries.

M. Roland Ries. Madame la ministre, je me tiens évidemment à votre disposition pour travailler sur un amendement qui permettrait de résoudre ce problème important pour les communes concernées. Et, bien entendu, je transmettrai votre réponse aux maires du Bas-Rhin - Bas-Rhin « maintenu », si je puis dire ! (Sourires.) - qui m'ont interpellé à ce sujet.

La conclusion qui s'impose au vu de cette situation est qu'il est indispensable de travailler selon une méthode de « transversalité législative » : le Parlement a en effet voté deux réformes - l'une sur la fiscalité locale, l'autre sur l'achèvement de la constitution des schémas intercommunaux - qui se sont en fait juxtaposées sans que personne, il faut bien le dire, mesure réellement les effets de cette conjonction.

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