Question de M. VALLINI André (Isère - SOC) publiée le 22/03/2013

Question posée en séance publique le 21/03/2013

Concerne le thème : L'Europe de la défense

M. André Vallini. Monsieur le ministre, alors que le monde est en train de réarmer, l'Europe semble s'apprêter à désarmer.

Confrontés à la crise économique, et donc à celle de leurs finances publiques, la plupart des pays européens réduisent leur budget de la défense. Si elle continue dans cette voie, l'Europe risque un véritable déclassement stratégique. Pour reprendre l'expression d'Hubert Védrine, elle risque de « sortir de l'Histoire ».

En raison de la réorientation stratégique des États-Unis vers l'Asie-Pacifique, l'Europe ne peut plus tout attendre de ce pays en matière de défense, d'autant que, contrairement à ce que pensent trop souvent les opinions publiques, les menaces et les dangers n'ont pas disparu, bien au contraire.

Le moment semble donc venu de relancer l'Europe de la défense. Au risque de sembler paradoxal, je dirai que c'est au moment où la construction européenne traverse la crise de confiance la plus grave de son histoire qu'il faut relancer la défense européenne.

En effet, si l'on cumule l'ensemble des moyens militaires des 27 pays membres, l'Europe dispose de 1 500 000 soldats et de 175 milliards d'euros de budget : il est aisé d'imaginer les économies que nous pourrions tous réaliser en mutualisant ces forces !

Or aucun pays n'est mieux placé que la France pour s'engager dans cette démarche, a fortiori depuis qu'elle a rejoint le commandement militaire intégré de l'OTAN.

Monsieur le ministre, dans ce contexte, je pense, à l'instar d'autres collègues qui l'on dit avant moi, que le Conseil européen de décembre prochain est une occasion unique de relancer l'Europe de la défense.

Je souhaiterais donc savoir, dans cette perspective, si vos priorités sont plutôt d'ordre institutionnel, industriel ou opérationnel.

- page 2225


Réponse du Ministère de la défense publiée le 22/03/2013

Réponse apportée en séance publique le 21/03/2013

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Monsieur le sénateur, j'en viens directement à la fin de votre propos. À mon sens, il serait peu efficace d'envisager les mutations indispensables et la relance de l'Europe de la défense par le biais de la question institutionnelle, car une telle approche a déjà échoué.

Si la France abordait le débat qui va s'ouvrir, et c'est tant mieux, au Conseil européen de la fin de l'année par cette question, nous risquerions d'être en difficulté.

À cet égard, souvenons-nous des déboires de l'OHQ, tentative de mise en œuvre d'un quartier général européen qui avait été bloquée, provoquant un certain enlisement.

Nous voulons aborder cette question de manière pragmatique, en déclinant, je crois l'avoir indiqué tout à l'heure, toute une série d'initiatives concrètes et réalisables tant en matière de gestion opérationnelle des crises que de capacités et d'industrie. Sinon, c'est à désespérer du concept d'Europe de la défense !

Tels sont les souhaits du Président de la République, que j'ai repris en différentes occasions. Je sens apparaître quelques frémissements en ce sens du côté de nos partenaires.

Sur les crises et les opérations, il y a déjà eu des progrès. Contrairement à ce que certains ont pu dire, je considère que l'opération au Mali est un progrès pour l'Europe de la défense, car il y a bien une initiative européenne, qui permet d'avoir dès à présent 500 militaires européens sur le sol malien pour former la nouvelle armée malienne. Sans doute cela ne comble-t-il pas toutes nos attentes, mais c'est tout de même inédit.

Il y aura sans doute, demain, des interrogations sur des actions à mener, pas forcément sous la même forme, en Lybie et dans la région des Balkans, afin de reprendre l'initiative dans le nord du Kosovo.

Le même état d'esprit pragmatique concernera les capacités. Il a été dit tout à l'heure que, dans le secteur du ravitaillement en vol, des progrès avaient été enregistrés. D'autres secteurs importants peuvent faire l'objet de coopérations très concrètes, susceptibles d'être mises en œuvre rapidement.

S'agissant de l'industrie, la Commission européenne prépare une communication sur la coopération industrielle en matière de défense pour le mois de mai, qui servira de base à la préparation du Conseil européen. Tout cela est de bon augure.

Enfin, très brièvement, j'ajoute que le concept de coopération structurée permanente, qui avait un peu « disparu des radars », pour employer une expression militaire, est en train de revenir progressivement. Il est inscrit dans le traité de Lisbonne et il pourrait éventuellement réapparaître au cours des mois prochains, peut-être pour faire l'objet d'initiatives au moment du Conseil européen de fin d'année.

- page 2226

Page mise à jour le