Question de M. CAPO-CANELLAS Vincent (Seine-Saint-Denis - UDI-UC) publiée le 29/03/2013

Question posée en séance publique le 28/03/2013

M. Vincent Capo-Canellas. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, la semaine dernière, vous avez déclaré à l'Assemblée nationale : « Je sais où je vais. »

Vous le mesurez tous les jours, le pays doute. Pourtant, la France a de formidables atouts. Elle ne peut, elle ne doit pas se résigner au déclin. La crise est réelle, vous l'avez d'abord niée en invoquant le retour de la croissance ; vous l'avez ensuite sous-estimée. Mais le sujet n'est pas tant là. Les effets se sont amplifiés avec la récession qui menace, le chômage à un niveau historique, le pouvoir d'achat en baisse. Vous ne pouvez cette fois nier, puisque cela fait maintenant près de onze mois que vous êtes aux responsabilités.

Nous vous reprochons d'avoir tardé à en mesurer les effets, d'avoir pris des mesures contre-cycliques, de n'avoir pas d'emblée dit aux Français qu'il fallait réformer, que ce serait dur mais que nous pourrions nous en sortir.

Oui, nous pouvons nous en sortir, à condition d'admettre qu'il faut refonder notre modèle de production, qu'il faut renégocier notre modèle social, car l'entreprise n'est pas l'ennemi de l'emploi, qu'il faut sortir de nos lourdeurs, admettre le monde tel qu'il est, en remédiant à nos rigidités.

Ces trois champs - refonder notre production, rénover notre modèle social, en finir avec nos rigidités - mériteraient d'être vos trois seules priorités.

Au lieu de cela, vous nous avez habitués à une bien curieuse valse où, d'un temps à l'autre, on passe d'une chose à son contraire.

Vous rétablissez la retraite à soixante ans puis vous prenez conscience qu'il faut allonger la durée de cotisation.

Vous niez le problème du coût du travail, ensuite vous découvrez le manque de compétitivité des entreprises.

Vous voulez favoriser le dialogue social, mais vous votez l'amnistie sociale, qui encourage la casse dans les entreprises !

Vous parlez de simplification et vous rajoutez une couche au millefeuille territorial.

Vous réduisez drastiquement les dotations aux collectivités et vous alourdissez leurs charges avec la réforme des rythmes scolaires.

Le désespoir guette, il est là. La révolte n'est pas loin. On le sent sourdement. Qui ne le perçoit ?

Vous savez où vous allez, dites-vous ?

Vous avez le choix entre trois attitudes : implorer la croissance – vous l'avez déjà fait, sans succès - ou continuer à dire que vous avez mis en place des outils et qu'ils vont porter leurs fruits – c'est sans aucun doute la méthode Coué, la méthode Ayrault, devrais-je dire (Protestations sur les travées du groupe socialiste.),…

M. Yannick Vaugrenard. C'est petit bras !

M. Vincent Capo-Canellas. … ou bien encore changer de politique et proposer au pays un nouveau compromis économique et social en faveur de l'emploi.

M. Claude Bérit-Débat. Regardez un peu derrière vous !

M. Vincent Capo-Canellas. Cette dernière solution est celle que nos voisins ont déjà mise en œuvre.

Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : allez-vous enfin vous engager sur la voie d'une autre politique, autour d'un vrai compromis économique et social qui seul permettra à notre pays de se redresser ? (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur plusieurs travées de l'UMP.)

- page 2537


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 29/03/2013

Réponse apportée en séance publique le 28/03/2013

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur Capo-Canellas, je commencerai par là où vous avez terminé, par un mot que j'affectionne, celui de « redressement ».

En effet, le Premier ministre et le Gouvernement savent où ils vont - nous savons où nous allons - et le Président de la République rappellera, ce soir, le cap, qui est précisément celui du redressement.

Mais pour qu'il y ait redressement, il faut qu'il y ait eu dégradation. (Exclamations sur plusieurs travées de l'UMP.)

M. Claude Bérit-Débat. Eh oui !

M. Pierre Moscovici, ministre. Et, si j'étais à votre place, je serais un peu plus discret sur ce point ; j'éviterais de donner des leçons, à voir l'état dans lequel vous et la majorité précédente avez laissé la France ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Et ce n'est pas une ritournelle, c'est un boulet pour nous, et le boulet est toujours là ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du groupe écologiste.)

Le boulet, ce sont les 600 milliards d'euros supplémentaires de dettes que vous avez laissé s'accumuler !

Le boulet, ce sont les déficits publics que nous sommes contraints de réduire, et qui, si nous n'étions pas intervenus en 2012, seraient en tendance nettement supérieurs à 5 % du PIB.

Le boulet, c'est la compétitivité que vous avez laissé se dégrader en dix ans (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. - Protestations sur plusieurs travées de l'UMP. ), si bien que la France, qui, en 2002, avait un commerce extérieur en excédent, se trouve aujourd'hui avec 70 milliards d'euros de déficit !

M. François Grosdidier. Et le boulet des 35 heures ?...

M. Pierre Moscovici, ministre. Le boulet, ce sont les emplois industriels que vous avez laissé partir, c'est la désindustrialisation qui s'est installée. (Protestations sur plusieurs travées de l'UMP.)

M. Claude Bérit-Débat. Eh oui !

M. Ladislas Poniatowski. Rendez-nous Cahuzac, il était meilleur !

M. Pierre Moscovici, ministre. Nous, nous sommes au travail, nous sommes aux responsabilités. C'est vrai que le redressement du pays prend du temps. En ce qui concerne le très important redressement des finances publiques, nous nous y employons en mettant en œuvre un effort structurel qu'aucun gouvernement n'avait consenti avant nous. Nous nous y employons en faisant en sorte de sauver la zone euro, qui était menacée dans son existence même.

M. François Grosdidier. C'est Sarkozy qui l'a sauvée !

M. Pierre Moscovici, ministre. Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, il y a eu un changement de cap.

Nous le faisons en mettant en œuvre un pacte de compétitivité qui est d'une importance sans précédent et qui prend justement en compte certaines des dimensions que vous avez évoquées.

C'est le cas du coût du travail, que nous réduisons au travers du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi.

M. François Grosdidier. Après avoir dit que ce n'était pas un problème !

M. Pierre Moscovici, ministre. Nous travaillons aussi sur la simplification, fondamentale, et qui est un engagement extrêmement fort du Président de la République. Nous nous efforçons de lever les rigidités, d'accélérer les procédures de manière que les entreprises puissent investir, embaucher rapidement et simplement.

M. Alain Gournac. En taxant les entreprises !

M. Pierre Moscovici, ministre. C'est aussi l'objet même de la Banque publique d'investissement, qui vient à leur appui.

Mais je ne veux pas être trop long, alors sachez que nous œuvrons actuellement au redressement du pays, parce que vous l'avez dégradé.

Oui, nous savons où nous allons, un cap est fixé, cela prendra sans doute du temps...

M. Ladislas Poniatowski. Charabia !

M. Pierre Moscovici, ministre. ... mais les résultats seront au rendez-vous...

M. Alain Gournac. Oh là là ! Ils savent où ils vont, c'est nouveau !

M. Pierre Moscovici, ministre. ... et je confirme, ici, l'engagement qui a été pris par le Président de la République, d'inverser, enfin, après vingt et un mois, la courbe du chômage dans ce pays d'ici à la fin de 2013.

Voilà, monsieur le sénateur, la réponse que je souhaitais vous apporter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

- page 2538

Page mise à jour le