Question de M. GUERRIAU Joël (Loire-Atlantique - UDI-UC) publiée le 05/04/2013

Question posée en séance publique le 04/04/2013

Concerne le thème : L'industrie pharmaceutique

M. Joël Guerriau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'industrie pharmaceutique est un secteur clef de notre économie, mais sa principale source de financement est la sécurité sociale, qui doit exiger, en contrepartie, l'adaptation de la production et la rationalisation des coûts. C'est d'autant plus important que la demande de soins augmente avec le vieillissement de la population et l'accroissement des pathologies chroniques.

Or l'industrie pharmaceutique encourage au contraire la surconsommation en créant parfois des comportements d'addictions. Cela pèse sur les comptes sociaux et, plus grave encore, peut avoir des conséquences néfastes sur la santé publique.

En septembre dernier le Guide des 4000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux des professeurs Debré et Even a eu le mérite de porter dans le débat public le problème du prix du médicament et de sa surconsommation en France.

Ce problème avait déjà été soulevé par la Cour des comptes dans son rapport de septembre 2011, mais aussi par la Haute Assemblée dès juin 2006 puis après le drame du Mediator, et enfin avec la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé.

Toutefois, le problème principal demeure : la France dépense de 1,5 à 2 fois plus que les autres pays occidentaux en médicaments, pour un niveau de santé comparable, les prix autant que les volumes étant en cause.

Ma question est donc très simple, madame la ministre : quel plan le Gouvernement va-t-il mettre en place pour mieux encadrer les prix et combattre la surconsommation ?

À cet égard, permettez-moi de vous faire part d'une situation que j'ai vécue au Ghana. Ma fille de quatorze ans est tombée malade loin de la capitale. Un médecin lui a prescrit le nombre exact de comprimés à prendre, et c'est ce qui lui a été délivré : pas un comprimé de plus, pas un comprimé de moins !

Madame la ministre, n'est-il pas possible de promouvoir les prescriptions médicamenteuses sur mesure, qui participent des bonnes pratiques en matière de lutte contre le gaspillage ?

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Réponse du Ministère des affaires sociales et de la santé publiée le 05/04/2013

Réponse apportée en séance publique le 04/04/2013

Mme Marisol Touraine, ministre. Même si des progrès ont été réalisés au cours de ces dernières années, la France se caractérise encore par une forte consommation de médicaments. En volume, notre pays se situe certes non plus au premier rang, mais au deuxième, mais un Français consomme, en moyenne, une boîte de médicaments par semaine, ce qui est évidemment excessif.

De plus, notre structure de prescription est telle qu'elle avantage les médicaments les plus coûteux, ce qui pèse sur les comptes de la sécurité sociale.

Néanmoins, nous devons faire en sorte que les médicaments puissent être utilisés à bon escient. Une publication du genre de celle que vous avez citée, monsieur le sénateur, risque de créer une défiance généralisée à l'égard de l'ensemble des médicaments.

Même si cela avait suscité certains sarcasmes, j'ai déjà eu l'occasion de dire que les médicaments étaient là pour soigner.

M. Jean-Jacques Mirassou. Oui !

Mme Marisol Touraine, ministre. Certes, il ne faut pas en consommer trop, ni favoriser leur consommation, mais il ne faut pas non plus faire comme si tous les médicaments devaient être écartés d'un revers de la main.

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. Il convient plutôt d'engager une politique qui permette une juste prescription. Le soutien et l'aide à la bonne prescription passent aussi par de nouvelles formations des professionnels de santé.

Ensuite, il nous faut également engager une politique en faveur de l'éducation au médicament.

M. Roland Courteau. Exactement !

Mme Marisol Touraine, ministre. C'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai souhaité mettre en place une base de données publiques, afin que les citoyens puissent accéder de manière transparente à une information sur les médicaments fiable et qui ne dépende pas d'agents privés.

Enfin, il faut garantir l'indépendance de la prescription.

À cet égard, des mesures ont été prises dans la loi de financement de la sécurité sociale pour garantir une meilleure indépendance des prescripteurs par rapport aux laboratoires et faire en sorte que la formation des prescripteurs ne relève plus de ces mêmes laboratoires.

Ce n'est qu'avec un tel ensemble de mesures que nous rétablirons la confiance et permettrons de bonnes prescriptions. J'aurai sans doute l'occasion d'intervenir ultérieurement sur la nécessité de valoriser les médicaments génériques, qui constituent l'une des réponses à la situation financière que connaît notre pays.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour la réplique.

M. Joël Guerriau. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse, qui reflète bien le fait que la surconsommation de médicaments est, en France, un problème culturel : le médicament est un réflexe !

Permettez-moi de revenir sur la question du conditionnement du médicament.

L'automédication étant une pratique répandue, les personnes puisent dans leur stock de médicaments précédemment prescrits mais inutilisés et les associent de manière plus ou moins judicieuse. Chaque année, ce sont 140 000 personnes qui sont traitées dans nos hôpitaux pour ces raisons, et on déplore 13 000 décès, ce qui n'est pas rien et qui démontre l'importance du sujet.

Aussi est-il en effet nécessaire, comme vous l'avez dit, madame la ministre, de mieux informer. Cependant, il importe aussi de reconsidérer la question du conditionnement du médicament, en veillant à éviter les excès, car cela a aussi, comme vous l'avez souligné, des conséquences sur la santé publique.

Permettez-moi de citer un exemple. En cas de rhume, on utilise un spray - celui qui est le plus utilisé en France est vendu à trois millions d'exemplaires ! -, mais le flacon est trop grand par rapport à la durée du traitement, comprise entre quatre et cinq jours.

Voilà l'un des exemples de cette surconsommation médicamenteuse qui entraîne les difficultés que j'ai évoquées.

M. Roland Courteau. C'est vrai !

M. Joël Guerriau. Il s'agit donc d'un sujet important, madame la ministre.

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