Question de M. MAZARS Stéphane (Aveyron - RDSE) publiée le 11/04/2013

M. Stéphane Mazars attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le problème posé par la mise à disposition des moyens financiers attribués aux groupes d'opposition, dans les conseils généraux, en particulier, pour leur permettre de recruter des collaborateurs. Cette faculté n'a, actuellement, aucun effet contraignant, ce qui donne toute latitude aux chefs des exécutifs départementaux de supprimer telle ou telle dotation, fragilisant, de ce fait, la situation professionnelle de ces personnels, parfois licenciés faute de moyens suffisants. C'est pourquoi il lui demande s'il peut être envisagé de pérenniser ces dotations ou, tout au moins, de mettre en place un seuil plancher, afin de préserver l'expression du pluralisme au sein des collectivités territoriales et d'améliorer ainsi la vie démocratique.

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Réponse du Ministère chargé de la francophonie publiée le 05/06/2013

Réponse apportée en séance publique le 04/06/2013

M. Stéphane Mazars. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur la mise à disposition des moyens financiers attribués aux groupes d'opposition dans les conseils généraux, visant à leur permettre, en particulier, de recruter des collaborateurs. Ces moyens, vous le savez, ont pour objet de préserver l'expression du pluralisme au sein des collectivités territoriales, et, par là même, d'assurer le bon fonctionnement de la vie démocratique de ces dernières.

Cependant, une difficulté peut se poser lorsque l'exécutif d'un département refuse, limite, voire supprime, l'octroi de ces moyens.

La Constitution, en son article 1er, consacre l'organisation décentralisée de la République. En son article 4, elle précise que « la loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation ».

En vertu de ces principes, les différentes lois de décentralisation ont conféré aux collectivités territoriales un certain nombre de compétences, qui ont accru la technicité de l'action locale et des responsabilités correspondantes.

Parallèlement, le législateur a instauré, au cours de ces vingt dernières années, un ensemble de garanties visant à renforcer l'attractivité et l'exercice du mandat local.

À ce titre, le rôle des assistants et collaborateurs constitue une ressource indispensable aux élus dans l'exercice quotidien de leur fonction, notamment pour ceux qui concilient une activité professionnelle avec leur mandat - et ils sont nombreux ! -, de même que pour ceux qui siègent dans des groupes minoritaires au sein des départements.

Cependant, si la loi accorde aux collectivités territoriales la faculté de recruter des collaborateurs, elle n'a pas d'effet contraignant. Dès lors, la mise à disposition de moyens relève du pouvoir discrétionnaire de l'exécutif local.

Madame la ministre, pensez-vous qu'il soit utile de garantir et de pérenniser les moyens permettant, notamment aux groupes d'opposition des conseils généraux, de recruter des collaborateurs, afin d'éviter que, dans cette période de contrainte budgétaire, ils ne puissent devenir une variable d'ajustement ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie. Monsieur le sénateur, actuellement en déplacement en Corse, M. le ministre de l'intérieur vous prie d'excuser son absence. Il m'a chargée de vous faire part de sa réponse.

Vous l'avez interrogé sur la possibilité de pérenniser tout ou partie des moyens financiers attribués aux groupes d'opposition dans les conseils généraux, afin que le maintien dans leur fonction de leurs collaborateurs ne soit pas remis en question.

Conformément aux dispositions des articles L. 2121-28, L. 3121-24 et L. 4132-23 du code général des collectivités territoriales, les communes de plus de 100 000 habitants, les conseils généraux et les conseils régionaux peuvent affecter des moyens matériels et des collaborateurs aux groupes d'élus.

C'est une faculté : la collectivité territoriale concernée peut mettre des moyens à disposition des groupes d'élus régulièrement constitués. Il peut s'agir de moyens consacrés au recrutement de personnels affectés auprès de chaque groupe d'élus. Il peut également s'agir de moyens matériels de fonctionnement - je pense à l'attribution d'un local ou à l'achat de matériel de bureau - ou de la prise en charge des frais de documentation, de courrier et de télécommunications.

Il revient à l'assemblée délibérante du conseil général de fixer, sur proposition des représentants de chaque groupe d'élus, les conditions dans lesquelles le président attribue une ou plusieurs personnes à chacun. Par ailleurs, les dépenses relatives aux personnels affectés auprès des groupes d'élus sont plafonnées à 30 % du montant des indemnités versées chaque année aux membres de la collectivité concernée.

À propos de la possibilité d'une pérennisation des fonds consacrés à ces emplois, je vous rappelle qu'il appartient à l'assemblée délibérante de déterminer le montant et la répartition par groupes d'élus des dépenses. Les recrutements sont prononcés par le président du conseil général, autorité statutaire de nomination des agents territoriaux de la collectivité, et non directement par le groupe d'élus.

La nature des aides accordées par l'assemblée délibérante aux groupes d'élus a été précisée par le Conseil d'État dans un arrêt du 2 février 1996, Région Alsace, qui peut être transposé aux conseils généraux. La haute juridiction souligne que les dispositions du code général des collectivités territoriales prévoient qu'il s'agit de moyens en personnels et en matériels. Elle en déduit que des subventions destinées au financement des groupes d'élus seraient illégales.

Dans ces conditions, il n'est pas envisageable de créer une dotation destinée aux collaborateurs de groupes. Conformément au principe de libre administration des collectivités territoriales, les dépenses de personnel restent soumises à la libre appréciation des organes délibérants des collectivités. Le Gouvernement n'envisage pas de fixer de montant plancher.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Mazars.

M. Stéphane Mazars. Madame la ministre, je vous remercie de nous avoir communiqué la réponse de M. le ministre de l'intérieur, même si elle ne sera probablement pas de nature à rassurer les collaborateurs de groupes minoritaires, dont la pérennité de l'emploi est, je l'évoquais à l'instant, remise en cause en ces temps de contrainte budgétaire. Il est à craindre que ces personnels ne servent de variables d'ajustement.

Ainsi que vous l'avez rappelé, l'attribution de moyens matériels et humains aux groupes politiques siégeant dans les collectivités territoriales constitue une faculté, non une obligation. Tout est fonction de la bonne volonté des assemblées saisies par les exécutifs locaux.

Nous sommes donc confrontés à une véritable difficulté. D'ailleurs, sur le terrain, des groupes d'opposition se retrouvent souvent dépourvus des moyens nécessaires à leur bon fonctionnement. C'est par exemple le cas dans certaines assemblées départementales.

Quoi qu'il en soit, j'ai pris bonne note de votre réponse, dont je répète qu'elle ne rassurera vraisemblablement pas les personnels concernés.

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