Question de Mme GONTHIER-MAURIN Brigitte (Hauts-de-Seine - CRC) publiée le 25/04/2013

Mme Brigitte Gonthier-Maurin appelle l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les conditions d'accès aux soins des populations du nord des Hauts-de-Seine, au regard du regroupement, décidé et engagé, des activités des hôpitaux Beaujon et Bichat.

Elle rappelle que ces deux hôpitaux possèdent, aujourd'hui, une capacité cumulée de 1 400 lits. Or, le projet de leur regroupement sur un nouveau site n'offrirait plus qu'une capacité de 800 à 1 000 lits. L'hôpital Beaujon de Clichy disposant actuellement de 464 lits, ce projet, lancé par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et l'agence régionale de santé, pose donc clairement la question de la disparition pure et simple de l'hôpital Beaujon.

À Beaujon, de premières mesures de restructuration ont déjà entraîné la disparition de nombreux emplois et la fermeture du service de psychiatrie. Les services de cardiologie et d'otorhinolaryngologie. doivent, également, être supprimés dans le courant du mois de mai 2013. Des menaces pèsent sur la maternité.

Pourtant, elle rappelle que l'hôpital Beaujon représente une offre de soins de proximité pour les communes de la boucle nord des Hauts-de-Seine que sont Asnières, Clichy, Gennevilliers et Villeneuve-la-Garenne. L'hôpital couvre, ainsi, un bassin très dense d'environ 600 000 habitants et salariés. De plus, il dispose d'une zone d'attractivité beaucoup plus large sur l'Île-de-France et le territoire national du fait de ses activités très spécialisées. L'hôpital Beaujon assure, enfin, des missions d'enseignement, en lien avec l'université Paris VII-Diderot.

Ce regroupement est donc incompréhensible pour les personnels, les élus des territoires concernés et les populations qui se mobilisent, notamment au travers d'une pétition, pour que soit maintenu un accès public aux soins de proximité. D'autant que, depuis l'adoption de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, le service public de la santé a, déjà, été fortement mis à mal dans le département, rompant ainsi avec le principe d'égalité des soins.

C'est pourquoi, elle lui demande d'intervenir pour que ce regroupement, qui va se traduire par une forte réduction de l'offre publique de soins de proximité dans une partie du département socialement défavorisée, soit abandonné.

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Réponse du Ministère chargé de la francophonie publiée le 19/06/2013

Réponse apportée en séance publique le 18/06/2013

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. « L'hôpital Beaujon n'est pas menacé de fermeture ! » C'est en ces termes que Mme Michèle Delaunay s'est exprimée dans cet hémicycle, au nom du Gouvernement, voilà deux semaines.

Mais de quel hôpital parle-t-on ?

En effet, le regroupement des hôpitaux Beaujon et Bichat, engagé selon la logique mortifère de la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », s'est déjà concrétisé. Le conseil de surveillance de la nouvelle structure a d'ailleurs été mis en place.

À Beaujon, cela s'est déjà traduit par la disparition de nombreux emplois et la fermeture du service de psychiatrie, l'an dernier. Au début du mois de mai, treize nouveaux lits ont été supprimés et les services de cardiologie et d'oto-rhino-laryngologie doivent connaître le même sort. La fermeture de la maternité est de nouveau envisagée, alors que naissent chaque année dans cet établissement 1 500 bébés.

Le projet mené par la direction générale de l'AP-HP, l'Assistance publique- Hôpitaux de Paris, en lien avec l'agence régionale de santé d'Île-de-France, avance donc à grands pas.

Il suscite la mobilisation des personnels, des élus et des usagers, qui refusent la disparition de Beaujon et se battent pour le maintien d'un hôpital à part entière. Une manifestation est d'ailleurs prévue samedi prochain devant le ministère des affaires sociales et de la santé, à l'issue de laquelle sera remise la pétition unitaire, qui a déjà recueilli 8 000 signatures.

Cette mobilisation est parfaitement justifiée par les caractéristiques mêmes de l'hôpital Beaujon : il représente une offre de soins publique de proximité pour les communes de la boucle nord des Hauts-de-Seine que sont Asnières, Clichy, Gennevilliers et Villeneuve-la-Garenne ; il couvre ainsi un bassin très dense d'environ 600 000 habitants.

Parallèlement, la zone d'attractivité de Beaujon s'étend beaucoup plus loin en Île-de-France et sur le territoire national, en raison de ses activités très spécialisées.

Enfin, cet hôpital assure des missions d'enseignement, en lien avec l'université Paris VII-Diderot.

Ce sont ces trois missions qui font de Beaujon un hôpital à part entière. Ce regroupement est donc incompréhensible pour les populations, les personnels et les élus des territoires concernés. Les conseils municipaux de Gennevilliers et de Saint-Ouen ont d'ailleurs émis des vœux pour le contester.

C'est pourquoi je vous demande, madame la ministre, d'intervenir pour que ce projet de regroupement, qui va se traduire par une forte réduction de l'offre publique de soins de proximité dans une partie socialement défavorisée de mon département, soit abandonné.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie. Madame la sénatrice, l'hôpital Beaujon répond aux besoins de santé des populations du nord des Hauts-de-Seine. C'est aussi un établissement de référence de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, mondialement reconnu dans ses domaines d'excellence en matière de soins, d'enseignement et de recherche.

Ouvert en 1935, Beaujon est un bâtiment emblématique de l'architecture hospitalière d'avant-guerre, mais l'hôpital est désormais confronté à des enjeux techniques et architecturaux majeurs. L'hôpital Bichat, qui appartient également au groupe hospitalier Paris Nord Val-de-Seine et est rattaché à la même université, est lui aussi confronté à des contraintes immobilières importantes.

Une réflexion a été engagée par l'AP-HP, en lien avec l'agence régionale de santé, sur l'organisation de l'offre de soins, d'enseignement et de recherche au nord de Paris. Cette réflexion, portant sur les champs médical et immobilier, en est à un stade préliminaire d'évaluation des besoins de santé futurs et d'anticipation de l'organisation hospitalière des prochaines décennies. Elle portera également sur l'articulation entre les enjeux hospitalo-universitaires et l'évolution urbaine de la région francilienne. L'offre de proximité assurée par la maternité de l'hôpital Beaujon est intégrée à cette réflexion.

Tous les scénarios devront être étudiés. Ils impliqueront l'élaboration d'un projet de soins de territoire, mais aussi, en lien avec l'université, d'une stratégie, nécessaire au rayonnement international de l'AP-HP et indispensable au dynamisme et à l'attractivité de ce territoire. Un travail de concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, notamment les collectivités locales, sera indispensable.

Madame la sénatrice, concernant les sujets précis que vous évoquez, Mme la ministre des affaires sociales et de la santé tient à vous apporter deux précisions.

D'une part, le transfert de l'activité d'hospitalisation de cardiologie s'inscrit dans le cadre d'une meilleure organisation du groupe hospitalier ; c'est à ce même titre que, par le passé, d'autres activités ont pu être renforcées sur le site de Beaujon.

D'autre part, le transfert du service d'oto-rhino-laryngologie s'inscrit lui aussi dans la logique de constitution d'un centre de référence au sein de l'AP-HP.

Les patients de Beaujon continueront donc de bénéficier d'une offre de proximité organisée par le groupe hospitalier.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la ministre, cette réponse me fait réagir.

Comme je l'ai souligné dans mon propos introductif, nous avons largement dépassé le stade de la réflexion. Les hôpitaux Beaujon et Bichat totalisent à eux deux 1 400 lits ; avec le projet de regroupement, la capacité d'accueil pourrait être ramenée entre 800 et 1 000 lits. Or, comme Beaujon ne dispose que de 464 lits, on devine comment pourrait s'effectuer la réorganisation : par la disparition pure et simple de l'hôpital Beaujon.

Je sais que Mme Touraine veut dissocier, dans la nouvelle organisation, un service de prise en charge de proximité, assuré territorialement, et les activités de recours, pouvant être regroupées via « l'élaboration d'un projet de soins territorial impliquant tous les établissements et tous les acteurs sanitaires ». Ce qui nous gêne le plus, c'est que la notion de service public disparaît complètement avec le projet de regroupement.

En réalité, ce projet relève de la volonté de regrouper au sein de seulement douze structures les trente-sept hôpitaux publics que compte actuellement l'AP-HP. Nous considérons que cela revient, de fait, à organiser une réduction de l'offre publique de soins de proximité. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons de surseoir à cette réorganisation. Nous pensons vraiment que Beaujon et Bichat doivent tous deux demeurer des hôpitaux publics à part entière. Puisque vous parlez de concertation, nous vous demandons d'écouter les populations concernées et leurs élus, qui manifesteront samedi prochain devant le ministère.

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