Question de M. NAMY Christian (Meuse - UDI-UC) publiée le 16/05/2013

M. Christian Namy appelle l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, sur la feuille de route pour le numérique du Gouvernement.
L'accès au très haut débit est fondamental à l'attractivité des territoires ruraux. Mais, il représente des investissements financiers colossaux, compte-tenu de la faible densité de population.
Il souligne que le nouveau règlement du fonds pour la société numérique prévoit des taux de subvention différenciés selon que l'intervention porte sur la collecte du débit ou sur la desserte des foyers. En outre, s'agissant de la desserte, il fixe des montants plafonds. Or, compte-tenu de la distance importante qui sépare les points de mutualisation des habitations dans le monde rural, cette desserte représente des coûts très importants. Il souhaite donc que les règles de subventionnement prennent en compte cette spécificité des territoires ruraux.
En outre, il demande de rendre éligible aux subventions la technologie FH-FTTH, mixant la collecte par faisceau hertzien et la desserte par la fibre optique jusqu'à l'abonné, car elle participe à l'objectif d'une couverture intégrale du territoire national.

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Réponse du Ministère chargé des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique publiée le 10/07/2013

Réponse apportée en séance publique le 09/07/2013

M. Christian Namy. Madame la ministre, le déploiement du très haut débit est un enjeu national. Le Président de la République, François Hollande, a fixé pour objectif la couverture intégrale de notre pays à l'horizon 2022.

Dans le département de la Meuse, le conseil général s'inscrit dans cette dynamique. Il a adopté en décembre dernier son schéma directeur territorial d'aménagement numérique, document stratégique qui planifie la montée en débit sur son territoire.

S'il est certain que le déploiement du très haut débit dans toute la France constitue un enjeu financier lourd - il est estimé a minima à 20 milliards d'euros -, c'est d'autant plus vrai pour les territoires ruraux qui sont confrontés à une faible densité de population et à un éparpillement de l'habitat.

Il est donc indispensable de tenir compte des spécificités de ces territoires dans les règles de subventionnement par l'État des investissements des collectivités locales par le biais du Fonds national pour la société numérique.

Or les règles qui viennent de nous être communiquées ne prennent à mon avis pas assez en compte les difficultés financières et la spécificité rurale non seulement de mon département, mais également, de manière générale, des départements ruraux.

Je souhaite par conséquent, en premier lieu, une augmentation du taux de subvention. En Meuse, le coût moyen de la prise s'élève à 2 600 euros dans les zones où le déploiement relève de l'initiative publique. Si le taux de subvention affiché est de 54,5 %, il n'est en réalité que de 41 %, car les règles de calcul du Fonds national pour la société numérique imposent de déduire des prévisions de recettes d'exploitation et prévoient des plafonds.

Par ailleurs, j'invite à la non-extension des zones confiées aux opérateurs privés. Aujourd'hui, le déploiement du très haut débit est confié aux opérateurs privés dans les zones denses, dites zones AMII, et aux réseaux d'initiative publique dans les autres zones. Si l'on confiait de nouvelles zones au secteur privé, on risquerait de concentrer les investissements publics dans les zones les plus isolées. En conséquence, le prix moyen de la prise augmenterait encore, rendant le coût du déploiement plus lourd pour les collectivités locales.

Enfin, je suis favorable à l'éligibilité de la technologie FH-FTTH aux subventions accordées par le Fonds national pour la société numérique. Le conseil général de la Meuse a fait le choix de déployer la fibre optique en deux étapes. Si la partie « collecte » se fera exclusivement par la fibre optique, la partie « desserte » se fera en partie, dans un premier temps, par la technologie FH-FTTH.

Cette technique allie le faisceau hertzien, du point de mutualisation au répartiteur du village, et la fibre optique, du répartiteur au domicile de l'abonné. Elle est donc particulièrement adaptée aux territoires ruraux où des distances importantes, souvent de plusieurs kilomètres, séparent les points de mutualisation des villages raccordés.

Les solutions de mix technologique semblent désormais étudiées par l'État lorsqu'elles favorisent ses objectifs nationaux, si j'en crois les récentes déclarations d'Antoine Darodes, directeur de la mission «Très haut débit ».

Madame la ministre, j'ai bien conscience de la précision et de la technicité de mes questions, mais je crois relayer, au travers de l'exemple de mon département, les préoccupations d'un grand nombre de territoires ruraux qui se mobilisent pour éviter que le numérique ne soit le fondement d'une nouvelle fracture entre les territoires.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique. Monsieur le sénateur Christian Namy, le plan « France Très haut débit », ou FTHD, est l'un des chantiers d'infrastructures les plus ambitieux qu'ait connus la France au cours de ces dernières années.

Comme vous l'avez rappelé, le Gouvernement, fidèle à l'engagement pris par le Président de la République pendant la campagne électorale et à l'objectif affiché de permettre à tous les Français d'accéder au très haut débit d'ici à 10 ans, a conçu un plan de déploiement soucieux à la fois d'efficacité et de solidarité.

Plus de 120 millions d'euros ont déjà été engagés depuis la publication du nouveau cahier des charges à la toute fin du mois d'avril, et trente-sept collectivités ont déposé leur dossier technique auprès du Commissariat général à l'investissement.

D'emblée, monsieur le sénateur, je peux vous dire qu'aujourd'hui, concrètement, les dossiers des collectivités locales avancent ; mais je veux revenir sur les deux volets de votre question, pour vous répondre avec précision.

S'agissant du premier volet de votre question, je tiens à préciser que le plan « France Très haut débit » est un plan solidaire qui organise la péréquation territoriale en renforçant l'aide aux territoires les plus ruraux, comme le vôtre. Ce n'est pas seulement un discours, mais une réalité inscrite dans la manière même dont j'ai souhaité concevoir le plan.

Ainsi, pour votre département de la Meuse, le niveau de l'aide apportée par l'État connaît une augmentation significative de près d'un tiers dans le nouveau plan par rapport au précédent : le taux d'aide passe en effet de 42,2 % à 54,4 %.

J'ajoute que le plafond de subventionnement a été substantiellement relevé de 54 %, passant de 367 euros à 566 euros par prise.

Le Gouvernement a parfaitement conscience de l'effort financier très important que représente pour les collectivités, malgré l'augmentation de son soutien, ce défi crucial pour la vie économique, sociale et citoyenne des territoires. Une mobilisation générale de l'ensemble des collectivités territoriales est donc nécessaire pour engager des projets ambitieux. Ce défi appelle des choix exigeants de leur part, mais il est indispensable au maintien de la vitalité de zones rurales. Pour accompagner ces efforts, le plan FTHD met à leur disposition une enveloppe de prêts de plusieurs milliards d'euros à des taux extrêmement attractifs et sur des maturités longues - de vingt ans à quarante ans - qui permettent de lisser financièrement cet effort très important.

Enfin, le Gouvernement se bat en ce moment même auprès de la Commission européenne pour que les prochaines enveloppes des programmes opérationnels des fonds FEDER 2014-2020 puissent soutenir les projets de déploiement d'infrastructures numériques à très haut débit.

Monsieur le sénateur, le second volet de votre question concerne la solution FH-FTTH. Je vous confirme que celle-ci n'est pas, à ce jour, soutenue par le plan « France Très haut débit ». Je connais les contraintes très lourdes de la réalisation des réseaux de collecte en fibre optique dans les zones rurales, parfois isolées, et je comprends aisément qu'il puisse être très tentant de céder à des solutions alternatives moins onéreuses, parfois un peu à l'économie, et apparemment efficaces. Elles sont d'ailleurs habilement proposées par certains opérateurs, notamment en utilisant des technologies hertziennes.

Néanmoins, nous avons la profonde conviction qu'il faut dès aujourd'hui préparer l'avenir : il est nécessaire de déployer des réseaux de fibre optique dans les campagnes afin d'amener dans tous les villages la fibre optique, formidable arme contre l'isolement et la relégation économique. En effet, la fibre optique se joue des distances et laisse entrevoir des potentialités sans limites, ou presque, en matière d'usages. Elle seule offre une solution pérenne, évolutive et d'une grande fiabilité, de nature à développer de nouvelles applications, notamment pour l'éducation, la télémédecine ou les services publics.

De même qu'il était important, hier, de goudronner les routes nationales et départementales irriguant les villages de nos territoires pour rompre l'isolement physique, il est fondamental, aujourd'hui, de déployer des réseaux de collecte en fibre optique vers tous les villages pour neutraliser cet insupportable isolement numérique, aussi appelé « fracture numérique ».

Par ailleurs, je vous précise que la solution FH-FTTH repose sur un raccordement activé de la boucle locale FTTH qui pourrait soulever des interrogations au regard de la réglementation établie par le régulateur indépendant.

Monsieur le sénateur, je sais que les équipes du conseil général de la Meuse ont engagé des discussions avec la mission FTHD, dirigée par Antoine Darodes, qui m'est directement rattachée. Sachez que je veillerai à ce que celle-ci puisse poursuivre l'accompagnement de votre département dans le déploiement de la fibre.

J'ai intégré, depuis des mois maintenant, l'urgence de l'aménagement numérique des territoires. Le rythme d'instruction des dossiers par la mission « Très haut débit » me donne bon espoir de réduire enfin la fracture numérique dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. Christian Namy.

M. Christian Namy. Madame la ministre, je reconnais que le plan actuel est meilleur que le précédent. Je salue aussi votre engagement personnel sur ce dossier du tout-numérique, et vous en remercie.

En revanche, s'agissant du taux de subvention, je peux vous dire que les méthodes de calcul ne permettent pas d'atteindre le taux de 54 % dont vous avez fait état : nous sommes largement en dessous.

Ensuite, vous avez remis en cause la technologie FH-FTTH en disant qu'elle n'était pas forcément la meilleure formule aujourd'hui. Je pense au contraire qu'elle permet d'aborder le tout-fibre dans un deuxième temps, d'abord parce qu'elle amène la fibre optique dans tous les foyers de nos communes, ensuite parce qu'elle évite des remplacements à court terme des lignes de cuivre enfouies qui ne sont plus en état. Elle est donc susceptible de fournir à l'abonné le haut débit rapide à un coût raisonnable.

À mon sens, il s'agit donc actuellement de la meilleure solution en milieu rural, compte tenu des capacités financières de nos départements. Nous reverrons ce dossier avec votre collaborateur, mais permettez-moi de vous remercier de ce que vous faites.

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