Question de Mme CUKIERMAN Cécile (Loire - CRC) publiée le 07/06/2013

Question posée en séance publique le 06/06/2013

Mme Cécile Cukierman. Ma question s'adresse également à M. le Premier ministre.

La violence fasciste, la violence d'extrême droite – c'est bien d'elle dont il s'agit – a frappé, hier soir, dans les rues de Paris.

Un jeune homme de 19 ans, Clément Méric, serait aujourd'hui en état de mort cérébrale après l'agression sauvage dont il a été victime.

Sa famille, ses amis, ses camarades sont dans la souffrance et se préparent à un deuil que nul ne pouvait prévoir. La vie ouvrait les bras à Clément, étudiant à Sciences-Po.

Les membres du groupe communiste républicain et citoyen partagent cette souffrance, de même, nous en sommes persuadés, que l'ensemble des élus démocrates et républicains.

Nous serons ce soir, à 18 heures 30, place Saint-Michel, aux côtés de tous ceux qui, peinés, choqués, révoltés, viendront faire savoir que la France ne veut pas de cette haine primaire, qu'ils refusent la multiplication des actes violents, xénophobes, racistes, homophobes auxquels nous assistons depuis plusieurs mois. Nous avons demandé que le Sénat suspende ses travaux durant cette manifestation. Ensemble, ce soir, nous dirons : « Ça suffit ! »

Cette violence n'est pas le fruit du hasard. Depuis des années, l'agressivité se développe dans notre société. La crise profonde et la montée effroyable du chômage et de la précarité suscitent – des heures sombres de l'histoire du monde en attestent – le repli sur soi et la recherche de boucs émissaires.

Le racisme et la xénophobie se développent et la démocratie est mise en cause quand la société va mal. Malheureusement, le mal se répand parfois si vite que le temps peut manquer pour réagir.

Le crime commis hier soir par des individus qui, de toute évidence, appartiennent à la mouvance de l'extrême droite, doit être un avertissement suprême. La République doit réagir. Elle doit empêcher de nuire ceux qui sapent l'idéal de fraternité et de solidarité qu'elle porte en son sein.

Monsieur le Premier ministre, nous ne pouvons plus attendre, il faut prendre des mesures pour dissoudre certains groupes fascistes. La République se doit de combattre les idées de haine véhiculées par l'extrême droite. Chaque atteinte à l'idéal républicain doit être combattue fermement, pied à pied.

Monsieur le Premier ministre, nous comptons sur le Gouvernement pour que les auteurs présumés de cette agression mortelle soient jugés et sanctionnés. Nous attendons des décisions fortes, et vous pouvez compter sur nous pour affirmer plus que jamais notre vigilance républicaine et ne plus tolérer un seul discours de cette extrême droite qui, aujourd'hui, a tué. Un tel crime ne doit pas se reproduire. La République doit se dresser pour dire « stop » à la haine. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 07/06/2013

Réponse apportée en séance publique le 06/06/2013

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur le président du Sénat, tout à l'heure, vous avez trouvé les mots justes pour rendre hommage à Clément Méric et dénoncer solennellement l'agression dont ce jeune homme a été victime.

Dans de tels moments, ainsi que l'ont souligné Mmes Rossignol et Cukierman, il est important que la représentation nationale s'exprime avec force et se rassemble pour défendre sans faiblesse, sans hésitation, sans aucun doute, les valeurs républicaines.

L'agression, le crime odieux qui a été commis hier soir et dont nous avons eu tardivement connaissance a profondément troublé, indigné les Français. Je ne parle pas seulement des membres de la représentation nationale ou du Gouvernement, mais de l'ensemble de nos compatriotes, qui, dans leur immense majorité, ne se reconnaissent pas dans la haine et la violence, les rejettent et entendent que nous les combattions avec la plus grande fermeté.

Je tiens à le dire devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, l'engagement du Gouvernement est total. Nous serons sans faiblesse.

Le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, m'a informé, juste avant le début de cette séance de questions d'actualité, que les auteurs présumés de ce crime ont été arrêtés. Je fais toute confiance à la direction régionale de la police judiciaire pour mener l'enquête jusqu'à son terme, sous l'autorité du procureur de la République. Je ne doute pas que la justice fera preuve de la plus grande sévérité, en application des lois de la République.

En cet instant, je veux exprimer à mon tour ma solidarité et ma profonde affection aux parents de Clément Méric, qui ont déjà connu d'autres drames familiaux.

Je veux dire aussi notre soutien à tous les jeunes qui défendent leurs idées avec des mots, avec la vigueur qui convient, mais en refusant la violence et la haine.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Aujourd'hui, nous avons la responsabilité non seulement de veiller à ce que les idées qui ont inspiré ce crime ne prospèrent pas et ne trouvent pas leur place dans notre société, mais également de trouver les réponses juridiques et politiques adéquates pour combattre ces mouvements défendant des thèses racistes, antisémites, xénophobes ou homophobes contraires à toutes les valeurs de la République.

J'ai demandé au ministre de l'intérieur et à la garde des sceaux d'étudier tous les moyens pouvant permettre de tailler en pièces, de façon démocratique et sur la base du droit, ces mouvements d'inspiration fasciste et néonazie qui portent atteinte à la République et à la France. Certes, ces mouvements sont ultra-minoritaires, mais ils veulent parfois tenir le haut du pavé, notamment en recourant à la violence. C'est d'abord la haine qui les anime, nourrie par des idéologies qui ont fait tant de mal à la France et à l'Europe. Nous le savons, elles n'ont pas complètement disparu.

M. Roland Courteau. La preuve !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Nous devons les combattre sans relâche. C'est ce que fera le Gouvernement, et je ne doute pas que le Parlement sera à ses côtés. (Applaudissements.)

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