Question de M. POHER Hervé (Pas-de-Calais - SOC) publiée le 27/06/2013

M. Hervé Poher appelle l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur ses inquiétudes concernant la hausse constante des dépenses départementales d'action sociale. Tandis que les recettes des départements continuent de décliner, la compensation versée par l'État au titre des allocations de solidarité reste insuffisante et grève dangereusement les budgets des conseils généraux. Selon une étude de l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée (ODAS), publiée en juin 2013, les dépenses liées au revenu de solidarité active (RSA) ne sont compensées qu'à 80 % et celles liées à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH) qu'à hauteur de 30 %. En 2012, l'État a ainsi remboursé 7,8 milliards d'euros aux départements, soit un manque à gagner de 24,7 milliards (+ 4,4 %). La hausse de leurs dépenses sociales et leur non-compensation intégrale par l'État ont des conséquences graves pour les départements : chute des dépenses d'investissement et recours plus fréquent à l'endettement. Il lui demande donc quelles mesures elle entend prendre, dans cette nouvelle phase de la décentralisation enclenchée par le Gouvernement, pour alléger les finances départementales et ménager enfin ces acteurs majeurs du développement territorial.

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Réponse du Ministère de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique publiée le 03/10/2013

Les dépenses de solidarité telles que l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), la prestation de compensation du handicap (PCH) et le revenu de solidarité active (RSA) représentent un poids important au sein des dépenses départementales. Les compensations allouées par l'État en contrepartie des transferts de compétences organisés par le législateur couvrent partiellement la charge afférente. D'un point de vue juridique, l'État a toujours respecté les dispositions de l'article 72-2 de la Constitution, soit en transférant aux collectivités territoriales des ressources équivalentes aux charges qu'il consacrait à l'exercice des compétences avant leur transfert, soit en leur allouant des ressources évaluées en adéquation avec leurs nouvelles charges lorsqu'elles résultaient de création ou d'extension de compétence. S'agissant plus précisément des dépenses d'aide sociale, par trois décisions QPC du 30 juin 2011 (n° 2011-142/145, 2011-143 et 2011-144 QPC), le Conseil constitutionnel a confirmé que les mécanismes de compensation des transferts du revenu minimum d'insertion (RMI) et du RSA et d'accompagnement financier des extensions de compétences résultant de l'entrée en vigueur de l'APA et de la PCH étaient conformes aux articles 72 et 72-2 de la Constitution et ne portaient pas atteinte à la libre administration des départements. Ainsi, l'existence d'un différentiel entre les compensations versées par l'État et les charges effectivement supportées par les départements en la matière ne s'apparente pas à un défaut de l'État dans le respect de ses obligations constitutionnelles. L'effet de ciseaux constaté depuis 2008 entre les dépenses sociales exposées par les départements et les concours financiers versés par l'État à ce titre a toutefois fragilisé la situation financière d'un certain nombre de départements. En réponse, au-delà des mécanismes légaux de compensation, des mesures exceptionnelles ont été mises en œuvre, au titre desquelles figurent notamment récemment la création d'un fonds de soutien exceptionnel aux départements en difficulté, doté de 170 M€, par l'article 48 de la loi de finances rectificative pour 2012 et la reconduction en loi de finances pour 2013 du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI) doté de 500 M€ pour accompagner la montée en charge du dispositif RSA. En outre, le Gouvernement a mis en place un groupe de travail État/départements chargé de faire des propositions sur les moyens d'assurer le financement pérenne et suffisant du RSA, de l'APA et de la PCH, conformément au premier engagement de la déclaration commune État-Départements du 22 octobre 2012 - qui prévoit que « l'État s'engage à créer les conditions de mise en place, à compter de 2014, de ressources pérennes et suffisantes permettant aux départements de faire face, dans un cadre maîtrisé, au financement des trois allocations individuelles de solidarité dont la loi leur confie la charge ». Le groupe de travail ad hoc a été installé le lundi 28 janvier 2013 par le Premier ministre. Il a organisé ses travaux en deux temps : une phase de diagnostic, incluant des éléments prospectifs sur l'évolution des dépenses en matière d'APA, de RSA et de PCH jusqu'en 2016, suivie d'une phase de propositions relatives tant au volet « dépenses » qu'au volet « ressources » des collectivités locales. Les travaux de ce groupe, animé par un conseiller-maître à la Cour des comptes, ont été organisés autour de trois instances : le groupe de travail politique lui-même présidé par le Premier ministre, instance plénière composée à parité de représentants de l'État, les ministres concernés, et de présidents de conseil général, était assisté par une mission d'appui technique composée des représentants des directions d'administration de l'État concernées et pour les départements, de directeurs généraux de services et de représentants de l'assemblée des départements de France (ADF) et enfin, par un groupe d'experts, instance technique à laquelle participaient les services des ministères concernés et de l'ADF. De février à mai 2013, le groupe s'est réuni chaque semaine sous l'une de ces trois formes. Ces travaux ont abouti à l'annonce de mesures concrètes de nature à assurer la soutenabilité du financement par les départements des trois principales allocations individuelles de solidarité à savoir, d'une part, la mise en place d'un fonds de compensation péréquée, alimenté par le transfert aux départements du montant correspondant aux frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties, évalué à 830 M€, et dont les critères et modalités de répartition seront définis conjointement par l'ADF et par l'État, et d'autre part, la possibilité ouverte aux départements, pour deux ans (2014 et 2015), de relever le plafond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 3,8 % à 4,5 %, permettant ainsi de dégager des ressources complémentaires en cas de baisse des recettes de DMTO en 2013 (de l'ordre de 1,3 Md€ de recettes nouvelles potentielles). Ces mesures ont vocation à figurer dans le projet de loi de finances pour 2014 pour une mise en œuvre effective à compter de 2014. Elles constituent les deux principales mesures du volet départemental du pacte de confiance et de responsabilité conclu entre l'État et les collectivités locales en date du 16 juillet 2013, démarche globale que le Premier ministre avait confiée au comité des finances locales, en lien avec les associations d'élus. En application des dispositions du pacte, ces mesures financières ont également vocation à mettre en œuvre l'engagement du Gouvernement de compenser les charges nouvelles qui résulteront pour les départements de la revalorisation exceptionnelle du RSA annoncée dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion ; ce dispositif fera l'objet d'un bilan global fin 2015.

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