Question de M. BOTREL Yannick (Côtes-d'Armor - SOC) publiée le 12/09/2013

M. Yannick Botrel attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les conséquences du dispositif des certificats d'économies d'énergie (CEE).
Conformément aux articles 14 à 17 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, la maitrise et la demande d'énergie s'est affichée comme un axe fort avec, notamment, la création du dispositif des certificats d'économies d'énergie.
Le dispositif des CEE impose aux fournisseurs d'énergie dont les ventes annuelles sont supérieures à un seuil, les obligés, un quota d'économies d'énergie à faire réaliser à leurs clients, en ayant envers eux un rôle actif et incitatif dans la réalisation d'opérations.
Sur la base d'un référentiel, des travaux éligibles réalisés par les collectivités sur les bâtiments de leur patrimoine permettent de valoriser des économies d'énergies qui peuvent être mesurées et rétribuées.
Les collectivités sont très fréquemment sollicitées par des sociétés ayant des contrats avec les obligés pour leur faire bénéficier de primes. En réalité, il semble s'agir, de manière détournée, de collecter les CEE de la collectivité. Or, ces CEE collectés sont, généralement, valorisés entre 15 et 40 % de leur valeur du marché.
Ce défaut d'information et de transparence est préjudiciable aux collectivités, en réduisant de 60 % à 85 % la capacité d'investissement de la valorisation des CEE dans leur engagement.
Il lui demande donc quelles mesures il souhaite mettre en œuvre pour corriger ce déficit d'information aux collectivités en faisant évoluer les obligations réglementaires du dispositif.

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Réponse du Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie publiée le 20/11/2013

Réponse apportée en séance publique le 19/11/2013

M. Yannick Botrel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les conséquences de l'application du dispositif des certificats d'économies d'énergie, les CEE.

Depuis la loi de programme de juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique, la maîtrise de l'énergie est affichée comme une priorité, avec notamment la création du dispositif des certificats d'économie d'énergie. La Cour des comptes, dans son récent rapport, souligne d'ailleurs l'efficacité de ce dispositif.

Concrètement, les CEE imposent aux fournisseurs d'énergie dont les ventes annuelles sont supérieures à un seuil déterminé, autrement nommés les « obligés », un quota d'économies d'énergie à faire réaliser à leurs clients.

En retour, sur la base d'un référentiel, les travaux éligibles réalisés par les collectivités sur les bâtiments de leur patrimoine permettent à celles-ci de valoriser les économies d'énergie, qui sont rétribuées au travers des CEE.

Toutefois, ces collectivités sont très fréquemment démarchées par des sociétés commerciales qui, ayant des contrats avec les obligés, leur proposent de les faire bénéficier de la « prime énergie » par la signature d'un contrat. En réalité, il s'agit de collecter de manière détournée les CEE des collectivités, lesquelles, ne recevant qu'une information sélective des démarcheurs, pensent réaliser une opération équilibrée. Tel n'est pas le cas, car les CEE collectés des collectivités sont généralement valorisés entre 15 % et 40 % de leur valeur du marché, loin de ce à quoi elles pourraient prétendre.

Face à ce constat de déficit d'information, il faudrait envisager de faire évoluer les obligations réglementaires du dispositif. Les structures qui collectent les certificats devraient être soumises à des contraintes de transparence et d'information.

Par ailleurs, pour faciliter les comparaisons, le volume de CEE, le prix de cotation unitaire de la plateforme publique EMMY à la date de signature du contrat et le prix de rachat effectif devraient faire l'objet d'une communication précise au client.

Au regard du chiffre global d'économies d'énergie réalisées de 432 térawattheures, seuls 10 térawattheures émanent des collectivités territoriales. Cette part minime pourrait être confortée en imaginant des formes de collectage groupé au profit des collectivités. Certaines font la proposition de regrouper entre elles les CEE, car plus la quantité de kilowattheures est importante, plus cela donne de poids pour en négocier la vente.

Enfin, une obligation de transparence et d'information des maîtres d'œuvre à l'égard de leurs clients, au travers des cahiers des clauses techniques particulières, serait pertinente et efficace.

Face au constat de la situation actuelle, encourageant en termes d'économie d'énergie, mais limité dans les faits pour les maîtres d'ouvrage sans un retour logique sur investissement, je souhaite connaître les mesures d'amélioration de la transparence et du cadre réglementaire du dispositif des CEE que le Gouvernement pourrait envisager de proposer.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le sénateur, vous avez raison de dire que l'amélioration de l'efficacité énergétique est un enjeu national considérable.

Vous le savez, les collectivités locales sont éligibles au dispositif des certificats d'économies d'énergie. Elles peuvent, si elles le souhaitent, les obtenir directement en présentant un dossier administratif, puis les vendre à un obligé.

Certaines collectivités préfèrent ne pas valoriser directement leurs CEE, compte tenu de la charge de gestion que cela peut représenter. Elles peuvent alors nouer un partenariat avec un obligé avant la réalisation des travaux. L'obligé doit alors prouver à l'administration qu'il a contribué activement à leur déclenchement.

Ce partenariat peut être réalisé avec un établissement public de coopération intercommunale ou une société d'économie mixte proposant le système du tiers-financement et dont l'objet est l'efficacité énergétique. Cette option a été adoptée, sur l'initiative du Gouvernement, dans le cadre de la loi du 16 juillet 2013.

Comme vous l'avez souligné à juste titre, ces collectivités peuvent enfin faire appel à un organisme privé.

Dans ce cas, un indicateur du prix des échanges de certificats est rendu public sur le site du registre des certificats d'économies d'énergie. Il s'agit d'une moyenne, le niveau de chaque transaction pouvant s'en écarter. Les collectivités ont donc connaissance de cet indicateur et sont libres de discuter la contrepartie à leurs certificats, que ce soit sous forme d'actions d'accompagnement ou de contribution financière.

Au regard de l'importance de ces certificats pour la politique française d'efficacité énergétique, le Gouvernement a entamé la phase de préparation de la troisième période des CEE, durant laquelle l'ensemble des réflexions seront prises en compte pour améliorer le fonctionnement du dispositif.

Durant cette période, qui s'étalera de 2015 à 2017, l'objectif affiché sera plus ambitieux, en ligne avec les engagements de la France en termes d'efficacité et de sobriété énergétiques. Il faudra également améliorer le système existant des CEE, notamment pour le rendre plus efficace et plus simple, comme le recommande la Cour des comptes.

La nécessité de mieux informer les collectivités fera l'objet d'une attention particulière.

Monsieur le sénateur, au moment où s'ouvre le congrès des maires, je voulais prendre l'engagement devant vous que toute contribution des représentants des collectivités locales sera naturellement prise en compte et étudiée avec une attention particulière, afin d'améliorer, comme vous le souhaitez, le dispositif des CEE.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Botrel.

M. Yannick Botrel. Monsieur le ministre, les exemples que j'ai cités montrent la nécessité de réguler davantage le dispositif des CEE. Dans le principe, ce dispositif est bon, mais on assiste en pratique à un dévoiement de la loi.

On détecte facilement les failles du système tel qu'il est actuellement conçu. C'est bien sur l'information du client que la réflexion et l'action doivent porter.

J'aimerais prendre un exemple que je n'ai pas cité dans mon intervention liminaire : aujourd'hui, certaines entreprises intègrent la possibilité de tirer parti du dispositif des CEE dès leur réponse aux appels d'offres, en minorant leur offre.

Je le répète, il y a des failles, mais des améliorations sont envisageables, et, à mon avis, facilement réalisables. L'enjeu de la réflexion qui va s'engager, dont vous avez indiqué le calendrier, est de faire en sorte que chacune des parties, et singulièrement les porteurs de projets, puisse se retrouver dans ce dispositif.

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