Question de Mme PROCACCIA Catherine (Val-de-Marne - UMP) publiée le 12/12/2013

Mme Catherine Procaccia attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, sur l'obligation de mise aux normes des cabinets médicaux, pour l'accessibilité aux personnes handicapées, à partir du 1er janvier 2015.

Depuis le 1er janvier 2007, les cabinets médicaux créés doivent déjà répondre à la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées et être équipés d'aménagements spécifiques pour l'accès des personnes handicapées. Les arrêtés du 1er août 2006 et du 30 novembre 2007 précisent quels sont les équipements obligatoires, comme les rampes d'escalier et les dimensions minimum pour l'accès aux salles d'eau.

Par contre, la mise en conformité des cabinets médicaux existants a, elle, été fixée au 1er janvier 2015 et ce, quelle que soit leur date de création. Cette mise en conformité, qui va entraîner des travaux souvent importants, soulève des difficultés dans certains locaux anciens mais surtout dans les immeubles collectifs.

Elle lui demande donc si, dans ce dernier cas, le professionnel de santé devra en supporter seul le financement. Il est, en effet, prévisible que les copropriétaires refusent de contribuer à financer un aménagement qui ne s'impose qu'à un seul occupant.

En outre, en ville, de nombreux cabinets médicaux sont installés en étage, dans des immeubles sans ascenseur et où il est impossible d'en installer un, avec des portes inadaptées aux personnes en fauteuil roulant qui, de toutes façons, ne peuvent monter dans les étages. Il avait été annoncé que certains cabinets pourraient obtenir des dérogations. Elle souhaite, en conséquence, savoir si une liste précise de ces dérogations existe et si les cas, cités ci-dessus, d'immeubles collectifs en font bien partie. Elle remarque enfin que les médecins et autres praticiens ne semblent, en tous cas, pas informés.

De plus, elle appelle son attention sur les risques de fermeture anticipée de certains cabinets : compte tenu des dépenses considérables et des contraintes des copropriétés, des praticiens proches de l'âge de la retraite évoquent déjà leur départ. Dans certaines zones, y compris urbaines, l'arrêt d'activité des professionnels ne ferait qu'accroître la désertification médicale accentuée par l'impossibilité de ces médecins de trouver un successeur confronté aux normes d'accessibilité du cabinet.

À un an de la mise en application de ces normes, elle aimerait obtenir des précisions et savoir si une communication spécifique en direction des professionnels de santé est envisagée.

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Réponse du Ministère chargé de la famille publiée le 19/02/2014

Réponse apportée en séance publique le 18/02/2014

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l'obligation de mise aux normes des cabinets médicaux pour l'accessibilité aux personnes handicapées à partir du 1er janvier 2015.

Depuis le 1er janvier 2007, les cabinets médicaux nouvellement créés doivent répondre à la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Les locaux doivent être équipés d'aménagements spécifiques, et deux arrêtés de 2006 et de 2007 précisent quels sont les équipements obligatoires.

La mise en conformité des cabinets médicaux existants a été fixée au 1er janvier 2015, et ce quelle que soit leur date de création. Cette mise en conformité va entraîner des travaux importants et soulever des difficultés dans les locaux anciens. Mais les problèmes les plus importants se poseront dans le cas des immeubles collectifs.

Madame la ministre, le professionnel de santé devra-t-il supporter seul le financement ? Il est prévisible que les copropriétaires refuseront de contribuer à financer un aménagement qui ne s'impose qu'à un seul occupant.

En ville, de nombreux cabinets médicaux sont situés en étage, dans des immeubles anciens où il est impossible d'installer un ascenseur. Il avait donc été annoncé que certains cabinets pourraient obtenir des dérogations. Existe-t-il une liste précise de ces dérogations et, si oui, quels en sont les critères ?

Enfin, vous le savez, cette situation entraînera des risques de fermeture anticipée. Compte tenu des dépenses et des contraintes, de nombreux médecins proches de l'âge de la retraite évoquent déjà leur départ. Cette situation va accroître la désertification médicale, y compris dans les villes, avec l'impossibilité de trouver un successeur, puisqu'il sera lui aussi confronté aux mêmes obligations.

Les médecins semblent peu ou pas informés. Que va-t-il se passer si les frais sont prohibitifs, ou en cas de refus des copropriétaires de procéder aux aménagements, ou pour les immeubles, il est vrai en petit nombre, classés monuments historiques ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille. Madame la sénatrice, je vous demande tout d'abord de bien vouloir excuser Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, qui est actuellement en concertation, justement, sur les mesures que prendra le Gouvernement afin de donner une nouvelle dynamique à la mise en accessibilité.

Vous avez raison de rappeler, madame la sénatrice, que la mise en accessibilité des cabinets médicaux existants a été fixée au 1er janvier 2015 par la loi du 11 février 2005.

Le Gouvernement ne crée donc pas de nouvelles obligations. Il doit faire face à une situation qui est la conséquence du manque de portage politique de la loi de 2005 pendant de trop nombreuses années. La loi de 2005 prévoit déjà plusieurs types de dérogations possibles, notamment lorsque le bâtiment est classé, en cas d'impossibilité technique ou de disproportion manifeste entre les coûts et les bénéfices résultant des travaux à réaliser.

Ces dérogations s'appliquent aux cabinets médicaux et permettent de prendre en compte, par exemple, la question du coût financier des travaux sur l'activité ou bien les situations de refus d'une copropriété d'aménager les locaux. Un guide de l'accessibilité spécifique aux locaux des professionnels de santé est déjà disponible sur le site de l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle. Il précise également la nature des dérogations, et je ne peux qu'encourager les représentants des professionnels de santé à diffuser ce dernier.

Par ailleurs, au printemps, sera déposé sur le bureau du Sénat un projet de loi habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnances dans deux domaines : d'une part, l'adaptation des normes de mise en accessibilité afin d'ouvrir ces dernières à tous les types de handicap ; d'autre part, l'introduction dans la loi des agendas d'accessibilité programmée, ou Ad'AP. Tous les gestionnaires d'établissements recevant du public - cela inclut les cabinets médicaux existants - et de systèmes de transports qui ne seront pas en conformité avec la loi s'engageront sur un calendrier précis et resserré de travaux d'accessibilité. La signature d'un Ad'AP permettra de lever le risque pénal auquel seront exposés les intéressés dès l'échéance du 1er janvier 2015, et ce sur toute la durée de l'agenda, en contrepartie, bien sûr, de son respect.

Mme Claire-Lise Campion, sénatrice de l'Essonne et présidente de l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle, vient de terminer les concertations dans ces deux domaines avec l'ensemble des acteurs afin de recueillir le plus large consensus possible.

Je tiens à appeler chacun à la responsabilité. L'accessibilité des cabinets médicaux est naturellement une condition sine qua non de l'accès aux soins et donc de la santé des personnes handicapées. Nous ne pouvons imaginer de société inclusive sans un accès égal au système de santé, exigence qui est au cœur de notre modèle social.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Madame la ministre, si j'ai bien compris votre réponse, il faut attendre le printemps pour obtenir un peu plus de précisions, et les médecins devront signer ces Ad'AP, dont pour ma part je découvre l'existence. Mais je ne suis pas un professionnel de santé, et je vais donc me rapprocher de ma collègue Mme Claire-Lise Campion pour en savoir plus sur les normes d'accessibilité.

Cela étant, peut-être une autre solution aux problèmes d'accessibilité pourrait-elle être envisagée ? Ne pourrait-on concevoir que, pour toutes les personnes handicapées, quel que soit leur handicap, les déplacements à domicile des médecins soient automatiquement pris en charge, sans autorisation préalable, dès lors que le cabinet du médecin n'est pas accessible ? Compte tenu du rapport coût-bénéfice des travaux, que vous avez évoqué, ce pourrait être une bonne solution. Je pense donc qu'il y a plusieurs moyens de régler le problème de l'accessibilité.

Mais je veux surtout insister sur un point - c'était d'ailleurs l'esprit de ma question -, à savoir le problème de la désertification médicale. En effet, étant donné les dépenses et les contraintes liées à la question de l'accessibilité, de nombreux médecins proches de l'âge de la retraite songent à arrêter leur activité. Parallèlement, il n'y a pas de médecins repreneurs. En effet, si le cabinet repris est considéré comme un cabinet nouvellement créé, le repreneur ne pourra pas satisfaire aux normes de mise en accessibilité en vigueur depuis le 1er janvier 2007. Voilà qui va freiner l'installation de nouveaux médecins.

Il y a donc un réel problème, pas seulement pour les médecins, mais aussi relativement à leur implantation. Et la question se pose aussi en milieu urbain : ainsi, dans mon département du Val-de-Marne, le président du conseil départemental de l'ordre des médecins évalue à quelque 15 à 20 % la part des cabinets situés en étage et donc non accessibles aux personnes handicapées, et ce dans un territoire qui, compte tenu d'une démographie médicale en chute, connaît une certaine forme de désertification médicale. Il est donc important de progresser sur ce sujet.

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