Question de M. MARSEILLE Hervé (Hauts-de-Seine - UDI-UC) publiée le 26/12/2013

M. Hervé Marseille attire l'attention de M. le Premier ministre sur la pénalisation de la négation du génocide arménien.

Le 24 avril 2012, M. François Hollande, candidat à la présidence de la République, s'exprimait devant la statue de Komitas à l'occasion de la 97ème commémoration du génocide arménien. À cette occasion, et après avoir rappelé la censure par le Conseil constitutionnel de la proposition de loi n° 229 (2011-2012) adoptée par le Sénat le 23 janvier 2012, il s'était engagé à : « prendre une initiative au lendemain de l'élection présidentielle ». Pour cela, il présentait sa méthode : d'abord l'efficacité, afin de ne pas conforter les négationnistes, puis la sécurité juridique, afin que le texte proposé ne soit pas censuré par le Conseil constitutionnel et enfin, la sérénité, en estimant qu'un accord transpartisan pouvait être trouvé à ce sujet. En conclusion, il garantissait qu'en dépit des pressions il tiendrait bon et aboutirait à obtenir la pénalisation de la négation des génocides et en particulier le génocide arménien. Lui président, il s'engageait à être présent chaque 24 avril pour : « participer à l'hommage et pour partager le combat de la recherche de la vérité et de la justice ».

Le 24 avril 2013, M. François Hollande, président de la République, n'a pas été en mesure de tenir son engagement, il était absent lors de la 98ème commémoration du génocide arménien. Qui plus est, un an après son élection, aucun projet de loi n'a été présenté afin de pénaliser la négation des génocides.

C'est pourquoi il lui demande si le Gouvernement entend seconder les promesses de M. le président de la République.

- page 3697

Transmise au Premier ministre


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes publiée le 16/04/2014

Réponse apportée en séance publique le 15/04/2014

M. Hervé Marseille. Mon collègue Masson vient de souligner que certaines questions n'avaient pas pu être posées. Pour ma part, je vais insister sur les réponses qui n'ont pas été apportées aux questions posées.

Voilà près d'un an, j'avais adressé au Premier ministre d'alors une question écrite sur la pénalisation de la négation des génocides. Ayant procédé à une relance et n'ayant toujours pas obtenu de réponse, il me faut aujourd'hui transformer ma question écrite en question orale pour espérer obtenir enfin une réponse. Je ne puis que regretter à mon tour un tel manque de considération à l'égard des parlementaires.

Les promesses datent du mois d'avril 2012 ; depuis lors, rien ! Des promesses ont encore été formulées lors de la visite officielle du chef de l'État en Turquie au mois de janvier dernier ; depuis lors, toujours rien ! Le Président de la République s'exprimait à cette occasion de la manière suivante : « Le travail de mémoire est toujours douloureux, mais il doit être fait. Ce que nous avons à mener [...], c'est la réconciliation à travers la recherche de ce qui s'est produit et la reconnaissance de ce qui s'est fait. »

Deux ans après les faits, je me permets de rappeler quelques éléments.

Le 24 avril 2012, M. François Hollande, candidat à la présidence de la République, s'exprimait devant la statue de Komitas à l'occasion de la quatre-vingt-dix-septième commémoration du génocide arménien. À cette occasion, et après avoir rappelé les conditions de la censure par le Conseil constitutionnel de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 23 janvier 2012, il s'était engagé à prendre « une initiative au lendemain de l'élection présidentielle ». Il garantissait qu'il tiendrait bon en dépit des pressions et qu'il finirait par obtenir la pénalisation de la négation des génocides, en particulier du génocide arménien.

Les attentes sont nombreuses, et elles sont fondées. Malheureusement, l'attente est bien longue !

Lui président, il s'engageait à être présent chaque 24 avril pour « participer à l'hommage et pour partager le combat de la recherche de la vérité et de la justice ». Or, le 24 avril 2013, il n'a pas été en mesure de tenir son engagement, étant absent lors de la quatre-vingt-dix-huitième commémoration du génocide arménien.

Aujourd'hui, après quasiment deux ans, aucun projet de loi tendant à pénaliser la négation des génocides n'a été présenté.

Au mois de janvier dernier, à l'occasion d'une conférence de presse conjointe avec M. Abdullah Gül, Président de la République de Turquie, le Président français s'engageait de nouveau à la présentation par son gouvernement d'un projet de loi pour transposer en droit interne la décision-cadre européenne de 2008 prévoyant la pénalisation de l'apologie, la négation et la banalisation grossière publique des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre.

J'observe que le Président de la République n'a pas précisé le calendrier. Au demeurant, cette démarche repose sur le même fondement que la proposition de loi qui avait été déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale par notre collègue députée Valérie Boyer.

Nous approchons du 24 avril, date à laquelle de nombreux élus vont se retrouver avec les représentants de la communauté arménienne dans les cérémonies de commémoration de ce triste anniversaire, dont le retentissement sera d'autant plus fort que nous approchons de 2015, année du centenaire du génocide.

Par conséquent, j'aimerais savoir, d'une part, pourquoi ma question est restée sans réponse - c'est un manque de considération à l'égard non seulement du travail des parlementaires, mais également des attentes de la communauté arménienne - et, d'autre part, à quelle date sera déposé le projet de loi promis par le Président de la République.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la pénalisation de la négation du génocide arménien. Je suis là pour vous répondre.

L'engagement du Président de la République est clair : toutes les victimes ont le droit à la protection de leur mémoire. Les négationnistes doivent être combattus, et leurs propos et actions doivent être sanctionnés.

Je crois que nul ne peut douter de la plus totale détermination du Gouvernement et du Président de la République à lutter avec la plus grande fermeté dans ce domaine.

Notre responsabilité est de choisir des voies juridiques qui respectent les principes fixés par notre Constitution et par le droit européen. Le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel ont déterminé à cet égard un cadre particulièrement strict.

Perdre de vue cette exigence serait prendre le risque de faire naître de nouvelles contestations et d'ouvrir de nouveaux espaces aux tentations négationnistes. Il n'en est pas question. C'est pourquoi je puis vous assurer que le Gouvernement est déterminé à poursuivre le travail nécessaire pour mobiliser toutes les ressources de notre droit et les procédures offertes par le droit européen à cette fin.

Comme vous le savez sûrement, la Cour européenne des droits de l'homme a rendu récemment un arrêt qui constitue un élément nouveau dans ce dossier complexe. Nous en évaluons la portée et les conséquences. Nous n'entendons pas, en effet, nous placer en contravention avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Ce principe, vous en conviendrez, ne peut pas être mis en cause.

Au-delà, nous avons la conviction que chaque commémoration doit être l'occasion de faire progresser le travail de mémoire, d'avancer dans la réconciliation et de refermer les plaies du passé. C'est la raison pour laquelle le Président de la République, alors en déplacement officiel en Chine, a tenu à se faire représenter par le ministre de l'éducation nationale lors des cérémonies du 24 avril 2013.

Nous poursuivons le travail, en lien avec les associations représentant les Arméniens de France, en vue de la commémoration du centenaire du génocide arménien. « Participer à l'hommage et partager le combat de la recherche de la vérité et de la justice », telle reste bien la volonté du Président de la République et du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille.

M. Hervé Marseille. Je remercie M. le secrétaire d'État de sa réponse, mais je ne suis pas plus avancé qu'avant de poser ma question.

Je me réjouis de la détermination - c'est bien le moindre - du Président de la République et d'apprendre que le Gouvernement est au travail. Je rappelle qu'il s'agissait d'une promesse. Je rappelle également qu'il y a eu un texte. Tous les éléments sont donc bien connus depuis deux ans.

Encore une fois, j'espère que nous saurons bientôt quand le Gouvernement déposera un projet de loi allant dans le sens souhaité par tous les Arméniens de France.

- page 3069

Page mise à jour le